(Washington et Dubaï) Donald Trump rejette les dénégations de Téhéran sur sa responsabilité dans l’attaque de deux pétroliers en mer d’Oman, affirmant que les dégâts subis par les navires portaient la signature de l’Iran, alors que les appels au calme se sont multipliés par peur d’un embrasement dans la région du Golfe.

Deux pétroliers - norvégien et japonais - ont été la cible jeudi d’attaques d’origine indéterminée alors qu’ils naviguaient près du détroit d’Ormuz, un passage maritime stratégique à l’échelle mondiale.

Ces attaques interviennent un mois après le sabotage de quatre navires, dont trois pétroliers, au large des Émirats arabes unis. Washington avait alors déjà montré du doigt Téhéran, qui avait démenti.

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Trois explosions ont secoué le tanker Front Altair.

«On voit le bateau, avec une mine qui n’a pas explosé et c’est signé» de l’Iran, a assuré le président américain sur Fox News, en s’appuyant sur une vidéo publiée par le Pentagone. Celle-ci semble montrer l’accostage d’un des tankers par une vedette rapide des Gardiens de la Révolution, l’armée idéologique du régime iranien, qui retire une «mine ventouse non explosée» de la coque du pétrolier.  

Les Gardiens «ne voulaient pas laisser de preuves derrière eux», a estimé M Trump.

Moscou, allié de l’Iran, a condamné «sévèrement» les attaques et a demandé à Washington de ne pas «tirer des conclusions hâtives», alors que plusieurs analystes ont estimé que les images vidéo étaient inexploitables. L’ONU a réclamé une enquête indépendante pour trouver les auteurs de l’attaque.  

La Chine a appelé au «dialogue» tandis que l’Irak, proche à la fois de Téhéran et de Washington, a prôné «l’apaisement». La Ligue arabe a mis en garde contre «une confrontation qui ne laissera personne en sécurité».

Les alliés de Washington dans la région ont également condamné les attaques. L’Arabie saoudite a fait part de sa «grande inquiétude» et les Émirats ont dénoncé une «dangereuse escalade».

Londres, autre ennemi historique de la République islamique, a également estimé que l’Iran était «presque certainement» responsable de l’attaque qui s’est produite au large de ses côtes.

«Sabotage diplomatique»

L’Iran a démenti toute implication, jugeant les accusations américaines «sans fondement».

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Capture d'écran de la vidéo diffusée par le Pentagone.

Press TV, la chaîne d’information en anglais de la télévision d’État iranienne, a pour sa part affirmé que les Gardiens de la Révolution étaient «la force la plus proche du lieu de l’incident» et que l’Iran avait «été le premier à se rendre sur place pour sauver les équipages».

Le chef de la diplomatie iranienne Mohammad Javad Zarif a accusé sur Twitter les États-Unis «de sabotage diplomatique et de maquillage de son #TerrorismeEconomique contre l’Iran».

Et le président iranien Hassan Rohani, en visite au Kirghizstan, a accusé les États-Unis «de représenter une grave menace à la stabilité dans la région et dans le monde, en violant toutes les règles internationales».

Les tensions sont vives entre l’Iran et l’administration de Donald Trump qui a claqué la porte il y a près d’un an de l’accord international sur le nucléaire iranien et a rétabli les sanctions économiques et diplomatiques contre Téhéran. Les États-Unis ont envoyé début mai des renforts militaires au Moyen-Orient, accusant l’Iran de préparer des attaques «imminentes» contre des intérêts américains.

Washington accuse Téhéran de chercher à perturber l’approvisionnement du marché mondial en bloquant le détroit d’Ormuz par lequel passe 30% du pétrole transporté par voie maritime, une menace déjà évoquée par le passé par l’Iran.

Menaces sur Ormuz

Les Iraniens «ne vont pas fermer (le détroit). Il ne va pas être fermé, il ne va pas être fermé pendant longtemps et ils le savent. Cela leur a été dit dans les termes les plus forts», a toutefois assuré vendredi Donald Trump.

Mais les transporteurs maritimes sont inquiets : «Si ces eaux devenaient dangereuses, l’approvisionnement de l’ensemble du monde occidental pourrait être menacé», a expliqué Paolo d’Amico, le président d’Intertanko, une association de pétroliers dont font partie les deux propriétaires des navires touchés jeudi.

AP

Les membres d'équipage du Kokuka Courageous ont été transférés sur le destroyer américain USS Bainbridge.

Trois explosions ont secoué le tanker Front Altair, qui transportait du naphta, un produit pétrolier, provoquant un incendie finalement maîtrisé. Les 23 membres d’équipage ont été secourus par la marine iranienne et transportés au port iranien de Bandar Abbas avant leur rapatriement, selon Frontline, la compagnie propriétaire du navire.

Le Kokuka Courageous, un méthanier, a essuyé des tirs et sa cargaison est intacte, selon son opérateur japonais, Kokuka Sangyo. Le navire et les 21 membres d’équipage ont été secourus par l’US Navy et escortés vers le port de Khor Fakkan aux Émirats.

Selon le propriétaire, l’équipage a vu un «objet volant» viser le tanker. «Puis il y a eu une explosion».

Le secrétaire américain à la Défense, Patrick Shanahan, a appelé à «un consensus international pour régler ce problème international».

Signe de la fébrilité ambiante, les cours du pétrole ont terminé en hausse vendredi, les investisseurs s’inquiétant des potentielles répercussions de l’attaque sur le marché du brut.