Satisfait des conclusions de l'enquête russe qui éloignent le spectre d'une procédure de destitution, le président Trump a changé de ton lundi en saluant le comportement du procureur spécial Robert Mueller.

Même si plusieurs fronts judiciaires restent ouverts et que les puissantes commissions du Congrès vont poursuivre leurs auditions, la publication des principales conclusions du document est une véritable bouffée d'oxygène pour le président, qui entend se projeter vers l'élection de 2020.

«Je suis content que cela soit terminé», a déclaré le milliardaire républicain depuis le bureau Ovale où il recevait le premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou.

Estime-t-il que M. Mueller a mené ses investigations de façon honorable? «Oui», a-t-il répondu. Serait-il favorable à ce que son rapport, qui a conclu à l'absence de preuves d'une collusion entre son équipe et Moscou, soit rendu public? «Cela dépend du procureur général. Cela ne me poserait aucun problème».

Des réponses qui tranchent singulièrement avec ses propos des derniers mois. «J'ai eu la plus grande victoire électorale de l'histoire de notre pays, des dizaines de millions de voix [...]. Et maintenant on a quelqu'un qui va écrire un rapport et qui n'a jamais eu un seul vote!», tempêtait-il la semaine dernière.

Si M. Mueller, ancien patron du FBI, a été épargné, M. Trump a estimé que l'enquête aurait dû se terminer beaucoup plus rapidement et il a dénoncé avec agressivité ses détracteurs qui ont «fait des choses horribles» pouvant, selon lui, relever de la «trahison».

De retour en campagne jeudi

Donald Trump, qui retrouvera les estrades de campagne dès jeudi à Grand Rapids, dans le Michigan - l'un des États-clés lui ayant permis de l'emporter face à Hillary Clinton en novembre 2016 - pourrait se servir du rapport Mueller pour galvaniser sa base électorale.

Ses adversaires démocrates sont désormais confrontés à un dilemme : doivent-ils tourner la page de l'affaire Mueller et décliner un programme permettant de «mettre fin au trumpisme», selon les termes du candidat à la primaire Pete Buttigieg, ou doivent-ils continuer à insister, quotidiennement, sur les nombreuses zones d'ombre entourant de fait cette présidence?

Le procureur général des États-Unis, Bill Barr, a publié dimanche soir un résumé de quatre pages du document, mais les leaders démocrates du Congrès ont exigé de le voir dans son intégralité, soulignant que M. Barr, nommé par M. Trump, n'était «pas un observateur neutre».

Les démocrates insistent notamment sur le fait que, sur la question d'une potentielle entrave à la justice de la part de Donald Trump, le procureur spécial Robert Mueller n'a pas livré de conclusion définitive. «Si ce rapport ne conclut pas que le président a commis un crime, il ne l'exonère pas non plus», a écrit l'ancien patron du FBI.

Mais Bill Barr a conclu de son côté que le document, qu'il a passé en revue entre vendredi et dimanche, ne mentionnait aucun délit susceptible d'entraîner des poursuites judiciaires sur le fondement de l'entrave à la justice.

Grâce présidentielle ?

AP

Robert Mueller à sa sortie d'une église près de la Maison-Blanche, dimanche.

«Loin de la "disculpation complète" revendiquée par le président, le rapport Mueller n'innocente clairement pas le président», ont de leur côté réagi les démocrates Jerrold Nadler, Adam Schiff et Elijah Cummings, qui dirigent trois puissantes commissions parlementaires du Congrès.

Robert Mueller a mis un terme à ses investigations à l'issue d'une enquête de 675 jours qui a tenu le pays en haleine. Le chef d'inculpation de «collusion» n'a jamais été retenu pour les 34 personnes mises en cause dans ce dossier, parmi lesquelles six proches collaborateurs de M. Trump.

L'enquête a notamment entraîné la spectaculaire déchéance judiciaire de son ex-chef de campagne Paul Manafort, ou encore de son ex-avocat personnel Michael Cohen, tous deux condamnés à de la prison pour des malversations diverses et des déclarations mensongères.

Le président envisage-t-il d'user de son droit de grâce pour certains de ses anciens collaborateurs aujourd'hui écroués? «Je n'y ai pas réfléchi», a-t-il répondu, n'excluant pas clairement cette possibilité.

Hasard du calendrier, l'un de ses plus farouches et médiatiques détracteurs, l'avocat Michael Avenatti, a été arrêté lundi pour une tentative d'extorsion visant l'équipementier sportif Nike ainsi que d'autres malversations financières.

La chute est brutale pour celui qui avait représenté l'actrice porno Stormy Daniels dans son procès contre Donald Trump. Farouchement anti-Trump, il avait envisagé un moment de se porter candidat à la présidentielle de 2020 avant de renoncer.

AP

Jerrold Nadler et Elijah Cummings.