Des Américains furieux que Donald Trump ait décrété l'état d'urgence à la frontière américano-mexicaine ont exprimé leur frustration, lundi, lors de manifestations dans l'ensemble du pays pour dénoncer la «fausse urgence» du président et exhorter les élus du Congrès à agir pour contrer l'administration.

Au Lafayette Square de Washington, qui est situé de l'autre côté de la rue de la Maison-Blanche, plusieurs centaines de manifestants brandissaient des pancartes et scandaient des slogans en ce Jour des présidents.

Vendredi, Donald Trump, en quête de milliards de dollars pour financer un mur que le Mexique devait initialement payer, a décrété l'état d'urgence, ce qui lui donne accès à près de 7 milliards US en fonds additionnels.

«C'est la première urgence que je vois qu'on peut planifier trois semaines en avance. C'est la première que je vois où quelqu'un qui a décrété l'état d'urgence peut aller jouer au golf», a déclaré Elizabeth Beavers, directrice adjointe des politiques à l'organisme Indivisible.

«Je crois en fait qu'on a bel et bien une urgence et je crois qu'elle vit ici», a-t-elle ajouté, pointant vers la Maison-Blanche.

Donald Trump était la principale cible des manifestants qui ont défilé dans les rues, lundi. Ils arboraient des chandails et des pancartes où l'on pouvait lire «Impeach 45» («Destituons le 45e président») et «Abuse of Power» («Abus de pouvoir»).

Mais d'autres marcheurs visaient le Capitole, situé un peu plus loin sur la rue, où les démocrates contrôlent maintenant la Chambre des représentants.

«Pendant très longtemps, les démocrates et les républicains au Congrès se sont mis un peu trop confortables et ont laissé les présidents faire les choses au nom de la sécurité nationale, sans se manifester pour utiliser leurs pouvoirs et leurs privilèges», a déploré Mme Beavers.

Avec son annonce, Donald Trump a ainsi détourné le Congrès, qui ne lui a fourni que 1,4 milliard US pour assurer la sécurité à la frontière. C'est bien moins que les 5,7 milliards US qu'il réclamait pour ériger un mur à la frontière avec le Mexique, afin de lutter contre l'immigration illégale, le trafic de drogues et la criminalité.

Les démocrates et certains républicains plaident que cette stratégie représente une violation de la constitution et un abus de pouvoir flagrant.

L'Union américaine pour les libertés civiles, le gouvernement de la Californie et d'autres se sont déjà engagés à contester devant les tribunaux cette décision du président. De leur côté, les élus au Capitole préparent une résolution pour abroger la déclaration de l'état d'urgence.

L'organisme sans but lucratif MoveOn.org s'attendait à rassembler plus de 10 000 manifestants dans quelque 250 événements, qui se tenaient notamment à Chicago, Los Angeles, New York et Houston.

«Le président, comme c'est conçu dans notre constitution, est un gardien de notre démocratie... il doit servir les gens, pas ses propres intérêts», a déclaré au rassemblement de Washington l'agent de liaison au Congrès de MoveOn, Reggie Hubbard.

«Ce président a constamment démontré qu'il n'a aucun respect pour les droits civiques ou pour la constitution. Il a fermé le gouvernement pendant un mois pour nous forcer à construire ce mur raciste.»

Donald Trump, qui a reconnu que cette affaire finira probablement devant la Cour suprême, a semblé minimiser le sentiment d'urgence en admettant qu'il pourrait prendre plus de temps pour construire le mur.

«Je n'avais pas à faire cela, mais j'aimerais mieux le faire beaucoup plus vite», a-t-il dit en conférence de presse à la Maison-Blanche.

Mais ces commentaires ont été mal interprétés, a rétorqué le conseiller du président, Stephen Miller, en entrevue avec Fox News dimanche.

«Ce que le président disait, c'est que comme les anciens présidents, il pourrait choisir d'ignorer la crise, d'ignorer cette urgence comme les autres l'ont fait», a-t-il soutenu.