Sa campagne, les zones d'ombre de ses affaires, ses liens éventuels avec Moscou : les démocrates, désormais en position de force au Congrès, veulent enquêter sur Donald Trump. Le président américain, lui, dénonce un « harcèlement présidentiel sans fin ».

Majoritaires à la Chambre des représentants pour la première fois depuis huit ans, les démocrates passent cette semaine à la vitesse supérieure avec, jeudi, les premières auditions sur un sujet sensible : les feuilles d'impôts du magnat de l'immobilier.

L'offensive, qui s'appuie sur les larges pouvoirs des commissions de la chambre basse, était annoncée, mais le fonctionnement du Congrès a été paralysé par le plus long shutdown de l'histoire américaine. Elle est désormais lancée alors que les deux camps ont les yeux rivés sur une seule échéance : l'élection présidentielle du 3 novembre 2020.

Le président de la commission du Renseignement de la Chambre Adam Schiff a promis mercredi une « enquête rigoureuse » sur les efforts de la Russie pour influencer le processus politique américain, déplorant que « de nombreuses pistes d'investigation » n'aient pas été explorées par le précédent Congrès, dominé par les républicains.

Or, la longue séquence d'auditions qui s'ouvre, avec son cortège de possibles révélations, n'est pas du tout du goût du milliardaire républicain.

« Voilà qu'Adam Schiff, après n'avoir pas trouvé la moindre collusion avec la Russie, annonce qu'il va scruter le moindre recoin de ma vie, sur un plan financier comme personnel, même s'il n'y a aucune raison de le faire », a-t-il tweeté jeudi.

« Du jamais vu ! Harcèlement présidentiel sans fin... », a-t-il ajouté, dénonçant une « poursuite de la chasse aux sorcières », surnom qu'il a donné à l'enquête du procureur spécial Robert Mueller notamment sur les liens présumés entre son équipe de campagne et Moscou lors de la présidentielle de 2016.

Comme toujours sous l'administration Trump, les échanges ont été vifs ces derniers jours et ont rapidement pris une tournure personnelle.

Le président américain a lancé l'offensive mercredi en accusant M. Schiff de n'être qu'un « politicard » cherchant à « se faire un nom ».

« Je peux comprendre pourquoi l'idée [...] terrifie le président. Plusieurs de ses proches vont en prison, d'autres attendent leur procès et les enquêtes judiciaires se poursuivent », a rétorqué ce dernier. « Nous ferons notre travail et nous ne nous laisserons pas distraire ou intimider par les menaces et les attaques ».

Enquêtes « ridicules »

Le Congrès organise jeudi les premières auditions sur une proposition de loi qui obligerait les présidents, vice-présidents et candidats désignés à la présidentielle à publier leurs déclarations d'impôts des dix années écoulées.

En campagne comme à la présidence, l'homme d'affaires de New York a toujours refusé de publier ces dernières contrairement à une tradition de transparence scrupuleusement respectée par tous les présidents et candidats à la Maison-Blanche depuis un quart de siècle.

La loi n'oblige actuellement que la publication d'une déclaration financière qui donne une approximation du patrimoine, des dettes et des revenus mais ne permet pas par exemple de vérifier le montant des impôts réglés.

Ce dossier est un test pour les démocrates qui s'interrogent sur la meilleure façon d'utiliser leurs nouveaux pouvoirs. Le degré d'urgence et d'agressivité avec lequel ils doivent exiger les documents fiscaux du 45e président suscite en effet des tensions dans leurs rangs.

Nombre de nouveaux élus, craignant les manoeuvres dilatoires du président, militent pour des mesures rapides et fortes. D'autres, plus chevronnés, appellent à une certaine prudence, redoutant que la démarche ne soit interprétée comme un pur coup politique.

Face à cette rude bataille qui s'annonce, M. Trump martèle le même message dès que l'occasion lui en est donnée.

Lors de son discours mardi soir sur l'état de l'Union dans le cadre solennel du Congrès, il a tempêté contre les enquêtes « ridicules » et « partisanes » qui se multiplient au moment même où un « miracle économique a lieu aux États-Unis ».

La présidente démocrate de la Chambre Nancy Pelosi a dénoncé « une menace » inacceptable dans cette enceinte.