(Washington) Le candidat centriste à la Maison-Blanche Joe Biden a été doublé vendredi par le jeune maire modéré Pete Buttigieg dans un sondage sur la primaire démocrate de l’Iowa, qui donne la progressiste Elizabeth Warren en tête dans une campagne focalisée sur l’épineuse réforme du système de santé.

Stagnant depuis des mois loin derrière ces grands noms dans les sondages, l’ex-élu de la Chambre des représentants Beto O’Rourke a annoncé dans la soirée qu’il jetait l’éponge.

Après avoir fait sensation lors de sa candidature malheureuse pour un siège de sénateur en 2018, le Texan de 47 ans a échoué à susciter le même enthousiasme pour la présidentielle. Dans un discours ému, retrouvant sa gestuelle passionnée, il s’est adressé aux supporteurs qui l’attendaient pour un événement dans l’Iowa :

«Bien que ce soit la fin de cette campagne, nous restons au cœur de ce combat. Je ferai tout ce que peux pour soutenir le candidat choisi» par les démocrates, a-t-il lancé.  

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Beto O'Rourke s'est adressé à ses partisans vendredi à Des Moines, dans l’Iowa.

Comme le veut la tradition, le petit État rural de l’Iowa joue un rôle central dans cette élection car il sera le premier à voter, le 3 février, pour choisir celui ou celle qui défiera Donald Trump en novembre 2020.

En perte de vitesse mais toujours premier au niveau national, Joe Biden, ancien vice-président de Barack Obama, a été relégué à la quatrième place dans l’Iowa, selon un sondage du New York Times/Siena College.

La sénatrice progressiste Elizabeth Warren est en tête, suivie par le sénateur indépendant Bernie Sanders puis Pete Buttigieg, jeune maire modéré de la ville de South Bend, dans l’Indiana, encore inconnu il y a un an.

À 37 ans, Pete Buttigieg arrive même deuxième dans l’Iowa (17%) dans la moyenne des sondages établie par le site RealClearPolitics.

Mme Warren est première (22,3%) et Joe Biden en troisième place avec 15,7%.

C’est un plongeon brutal pour le septuagénaire qui affichait 28,5% à la mi-septembre.

Depuis, Joe Biden a été happé par l’affaire ukrainienne qui vaut à Donald Trump une procédure de destitution : c’est en effet pour salir son rival démocrate potentiel que le président américain aurait fait pression sur l’Ukraine, soupçonnent les démocrates. M. Trump a demandé à Kiev d’enquêter sur la famille Biden.  

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Pete Buttigieg lors d'une rallye mercredi à Concord, au New Hampshire.

À l’échelle nationale, Joe Biden a vu son avantage nettement se réduire mais il reste au sommet. Au cours de l’été, la sénatrice Warren a grimpé jusqu’à la seconde place, suivie de Bernie Sanders puis de Pete Buttigieg, encore loin derrière.

«Irréaliste»

Puisqu’ils marquent le départ de la primaire, les «caucus» de l’Iowa peuvent influencer la suite de la course, en donnant un grand élan au candidat victorieux mais aussi à ceux qui sauront surprendre en haut du classement, tout en menaçant sérieusement les chances de ceux qui décevront.  

Signe de son importance stratégique, les candidats démocrates sillonnent l’État depuis des mois.

Et 14 d’entre eux ont été conviés vendredi soir à un traditionnel dîner où les candidats se succèdent devant de nombreux supporteurs pour prononcer de courts discours, sans notes ni téléprompteurs.  

Barack Obama y avait donné une impulsion décisive à sa campagne en 2007, racontent ses conseillers.

Elizabeth Warren y sera très attendue, quelques heures après avoir révélé comment elle comptait financer son projet coûteux de réforme de la santé, un sujet qui divise les prétendants centristes et progressistes à l’investiture démocrate.  

Il faudrait 20 500 milliards de dollars, estime-t-elle, pour faire passer les États-Unis vers un système de couverture universelle.  

AP

Elizabeth Warren rencontre des partisans vendredi à Des Moines, en Iowa.

Près de la moitié de cette somme viendrait des employeurs, qui contribueraient au système public de santé, au lieu de co-financer les assurances privées de leurs employés.  

Elle financerait le reste «avec des coupes ciblées dans la défense, de nouveaux impôts visant les groupes financiers, les grandes corporations et le 1% d’Américains les plus riches, tout en luttant contre l’évasion et la fraude fiscales», a expliqué son équipe de campagne, qui l’assure: «Elizabeth financera ce programme sans augmenter d’un centime les impôts des familles de classe moyenne».

«Irréaliste», a rétorqué la numéro deux de l’équipe Biden, Kate Bedingfield: ce projet nécessiterait «une augmentation géante des impôts».

Comme d’autres modérés, Joe Biden propose d’améliorer la réforme emblématique introduite par le président Barack Obama – surnommée Obamacare – mêlant systèmes privé et public.  

«On ne pourra pas battre Donald Trump avec un double discours sur la santé», a mis en garde Mme Bedingfield.