(Washington) Les démocrates affichaient vendredi leur volonté d’aller vite dans la procédure de destitution de Donald Trump, après une semaine tumultueuse qui pourrait marquer un basculement dans la présidence du milliardaire républicain.

« Il ne faut pas que ça traîne », a déclaré la chef des démocrates au Congrès Nancy Pelosi sur la chaîne MSNBC. Refusant de préciser un calendrier, elle a jugé que « les documents fournis par la Maison-Blanche avaient de fait accéléré » la cadence en vue d’une mise en accusation du président.

Après avoir tempéré pendant des mois les ardeurs de l’aile gauche du parti démocrate, Mme Pelosi a créé la surprise mardi en décidant de lancer cette procédure rare et explosive. Si la démarche a peu de chances d’aboutir à la destitution de M. Trump pour cause de majorité républicaine au Sénat, elle jette une ombre sur sa campagne de réélection et augure de luttes acharnées jusqu’au scrutin de 2020.

Donald Trump « ne nous a pas laissé le choix », a assuré vendredi la leader démocrate pour expliquer son changement de position : il a « trahi son serment, mis en péril la sécurité nationale et l’intégrité des élections », a-t-elle assuré.

Les démocrates reprochent au président américain d’avoir demandé à l’Ukraine de l’aider à rassembler des informations compromettantes sur son rival Joe Biden, parmi les favoris pour l’affronter dans les urnes, dont le fils a fait des affaires en Ukraine quand il était vice-président de Barack Obama.

Cette requête a été formulée il y a deux mois lors d’un appel téléphonique entre Donald Trump et son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky.

Cet échange était « parfait », « tout à fait légal », « il n’aurait pas pu être plus honorable », a martelé Donald Trump dans une dizaine de tweets matinaux consacrés à l’affaire.  

Visiblement très en colère, le locataire de la Maison-Blanche, 73 ans, a égratigné à la fois les démocrates (« le parti qui ne fait rien »), les journalistes (« bidons ») et le lanceur d’alerte à l’origine du scandale (« l’agent d’un parti ? »).

« En guerre »

Signe de sa nervosité, M. Trump a déclaré « être en guerre » lors d’une conversation privée rendue publique par un témoin. Sur Twitter, le tempétueux président avait déjà appelé jeudi les républicains à « se battre », ajoutant en lettres capitales : « l’avenir de notre pays est en jeu ».

Ses ennuis sont dus à un membre de la communauté du renseignement qui, à la mi-août, avait notifié à sa hiérarchie ses inquiétudes sur la teneur de l’appel entre MM. Trump et Zelensky.  

Il y a huit jours, des fuites dans les médias ont fait éclater l’affaire au grand jour. Acculée, la Maison-Blanche a accepté de publier mercredi une transcription de leur échange dans l’espoir de convaincre qu’il était « anodin ».

Cette conversation, jugée au contraire « accablante » par les démocrates, jette une lumière crue sur l’asymétrie de la relation entre le dirigeant de la première puissance mondiale et celui de l’Ukraine, en guerre avec des séparatistes prorusses et très dépendant de l’aide occidentale.

Donald Trump s’y plaint d’en faire beaucoup pour l’Ukraine sans que « cela soit forcément réciproque », avant de formuler de vagues accusations contre Joe Biden et son fils Hunter. « Cela serait formidable si vous pouviez vous pencher dessus », dit-il à M. Zelensky.

« Gravité »

Le scandale a encore gagné en ampleur jeudi avec la publication du signalement du lanceur d’alerte.  

Après l’échange entre MM. Trump et Zelensky, les juristes de la Maison-Blanche sont « intervenus pour “verrouiller” toutes les archives », a-t-il écrit. Pour ce lanceur d’alerte, cela prouve que l’entourage du président « comprenait la gravité de ce qui s’était passé ».

Donald Trump et son entourage ont tenté de minimiser la portée du document, « une compilation de récits de troisième main et d’articles de presse » qui ne montre « rien d’inapproprié ».

Mais les démocrates y ont vu une tentative « d’étouffer » le scandale.

« Je ne crois pas qu’on ait besoin d’en savoir beaucoup plus », a déclaré vendredi sur CNN le parlementaire démocrate Eric Swalwell, qui siège dans les commissions judiciaire et du renseignement de la Chambre des représentants à la manœuvre dans l’enquête lancée contre Donald Trump.

« En tant qu’ancien procureur, je dois vous dire que c’est plus facile quand l’accusé reconnaît les faits et là, le président ne nie pas ses propos », a-t-il ajouté en souhaitant lui aussi avancer « rapidement ».