(Washington) Les États-Unis ont rendu public samedi le volet économique de leur plan de paix pour le Proche-Orient, qui doit être présenté la semaine prochaine à Bahreïn — en l’absence des Palestiniens — et vise à lever plus de 50 milliards de dollars en une décennie.

Les Palestiniens ont aussitôt rejeté la proposition, estimant que Washington devait d’abord œuvrer à mettre fin au « vol par Israël » des terres palestiniennes.

Donnant pour la première fois des détails sur ce plan promis de longue date, l’administration de Donald Trump a précisé vouloir attirer d’énormes investissements internationaux au profit des Palestiniens et améliorer les infrastructures et la gouvernance en Cisjordanie et dans la bande de Gaza.

La conférence de mardi et mercredi à Manama, emmenée par le gendre et conseiller du président américain Jared Kushner, sera l’occasion de présenter cette initiative, qui inclura plus tard un volet politique selon des responsables. 

Mais l’Autorité palestinienne boycotte cet atelier intitulé « De la paix à la prospérité », estimant que l’administration Trump, qui affiche son plein soutien à Israël, cherche à acheter les Palestiniens et à les priver d’un Etat indépendant.

« La situation économique ne doit pas être discutée avant qu’il y ait une discussion de la situation politique, et tant qu’il n’y a pas de discussion de la situation politique, nous ne parlerons d’aucune situation économique », a dit samedi le président palestinien Mahmoud Abbas dans un communiqué.

« Commencez par lever le siège de Gaza, par arrêter le vol par Israël de notre terre, de nos ressources et de notre argent, donnez-nous la liberté de mouvement et le contrôle sur nos frontières, notre espace aérien, nos eaux territoriales (...) et ensuite regardez-nous construire une économie dynamique et prospère en tant que peuple libre et souverain », avait plus tôt lancé une conseillère de M. Abbas, Hanane Achraoui.

« Le plus ambitieux »

La Maison Blanche présente le plan, qui doit être discuté à Bahreïn avec des responsables financiers de riches Etats arabes du Golfe, comme étant historique.

Il « représente l’effort international le plus ambitieux et le plus complet pour le peuple palestinien jusqu’ici », a dit la Maison Blanche dans le document rendu public samedi.

« Pendant trop longtemps, le peuple palestinien a été piégé dans les structures inefficaces du passé », a de son côté affirmé Jared Kushner. Le plan de paix « est un cadre pour un avenir plus radieux, plus prospère pour le peuple palestinien et la région, et un aperçu de ce qui est possible quand la paix est là ».

L’objectif est de lever plus de 50 milliards pour les Palestiniens au cours de la prochaine décennie et de doubler leur PIB.

Selon la Maison Blanche, l’initiative peut transformer l’économie palestinienne en créant plus d’un million d’emplois.

Au risque de provoquer la colère des dirigeants palestiniens, l’exécutif américain indique que l’argent levé sera géré par une banque de développement internationale, afin d’assurer une meilleure gouvernance et d’éviter la corruption.

Suspicions

Qui va payer la facture ? Ce n’est pas encore clair. On ne sait pas non plus si les Etats arabes du Golfe — qui se sont trouvé des points communs avec Israël en raison de leur hostilité commune envers l’Iran — vont se montrer prêts à participer avant même qu’un accord politique soit conclu.

Selon Jason Greenblatt, un conseiller de M. Trump qui a travaillé aux côtés de M. Kushner, le volet politique pourrait n’être dévoilé qu’en novembre.

Le plan a déjà été retardé en raison des élections israéliennes en avril. Le pays doit à nouveau se rendre aux urnes après que le Premier ministre Benjamin Netanyahu a échoué à former une coalition.

Les dirigeants palestiniens sont extrêmement suspicieux à l’égard de Jared Kushner, un ami de la famille Netanyahu, et du président Trump, qui a reconnu Jérusalem comme capitale de l’Etat hébreu.

Considéré comme proche de M. Netanyahu, le ministre israélien de l’Energie Youval Steinitz a, lui, salué le plan présenté samedi. « Il a l’air bien (...). Tout le monde veut aider les Palestiniens, sauf les Palestiniens eux-mêmes », a-t-il dit à la chaîne 13 de la télévision israélienne. 

Des responsables américains ont laissé entendre que le plan de paix final pourrait ne pas mentionner la création d’un Etat palestinien indépendant, rompant avec la ligne suivie par la diplomatie américaine ces dernières décennies.