Patrick Griffin travaillait à la Maison-Blanche sous le président démocrate Bill Clinton lors du plus long shutdown de l'Histoire récente américaine, qui avait duré 21 jours à partir du 15 décembre 1995.

Ce démocrate avait participé aux négociations avec les parlementaires républicains pour sortir de la paralysie complète du gouvernement fédéral, provoquée par une dispute budgétaire.   

Aujourd'hui professeur à l'American University, il analyse pour l'AFP le shutdown qui paralyse depuis le 22 décembre un quart des administrations fédérales américaines, à cause du « mur » que veut construire Donald Trump à la frontière avec le Mexique pour endiguer l'immigration clandestine.  

Le président américain « n'est pas un idéologue, c'est un commercial ». Il peut donc surprendre, avance Patrick Griffin.  

Les négociations semblent enkystées. Quand les choses vont-elles bouger ?  

« Tout va dépendre de qui clignera des yeux en premier. Et quelqu'un le fera, dans un avenir pas trop lointain. Je pense qu'aucun des camps ne voudra poursuivre cela indéfiniment parce qu'à partir d'un moment, cela donne une image d'incompétence. Mais certains sont moins soucieux de l'image qu'ils donnent alors... »

Pour l'instant le shutdown « n'impacte, de façon relative, qu'une partie réduite de la société alors que nous sommes en plus en période de fêtes. Cette dimension réduite donne aux acteurs une plus grande latitude pour jouer les durs. »

« Après le 1er janvier, la bataille va s'intensifier. »

Comment va évoluer la situation ?  

« Pour le moment, personne ne fait très attention à tout ça, mais lorsque la bataille va se jouer devant un plus grand public, je pense que le message du côté démocrate va être plus agressif. »

« J'ai le sentiment que Trump gagne pour l'instant auprès de sa base, mais pas auprès du public plus large. Mais cela peut changer. Et quand les démocrates vont prendre le contrôle » de la Chambre des représentants le 3 janvier, avec Nancy Pelosi à leur tête, « la bataille sera différente ».  

« Je ne pense pas que cela soit réglé avant cette date. Il semble que Trump veuille avoir un duel direct avec Pelosi. Mais je pense aussi que s'il y a un compromis, comme sur le programme DACA », concernant les « Dreamers », arrivés sans-papiers aux États-Unis quand ils étaient encore mineurs, « cela sera plus facile à trouver avec Pelosi qu'avec les républicains conservateurs. Souvenez-vous que Trump n'est pas un idéologue, c'est un commercial ».  

« Je ne sais pas encore où pourra se trouver l'accord. Si cela passe par quelques dollars de plus ou si Trump va être très imaginatif. Il en a le potentiel. S'il proposait quelque chose sur DACA, je pense que les démocrates lui donneraient l'argent. Mais cela déstabiliserait sa base. »

Ces shutdowns paralysent régulièrement l'économie américaine, ne faudrait-il pas s'en débarrasser ?  

« Non. Ils représentent la tension, définie constitutionnellement, entre la branche exécutive, qui propose et le Congrès, qui dispose. (Les parlementaires) contrôlent les cordons de la bourse. Et c'est cela qui maintient l'équilibre des pouvoirs, même si cela fait désordre, même si on n'aime pas le débat, ou ceux qui gagnent ou perdent. »