La doyenne de la Cour suprême américaine, Ruth Bader Ginsburg, 85 ans, s'est fait opérer pour des nodules cancéreux au poumon, au grand dam des démocrates qui craignent que cette icône progressiste ne doive être remplacée par un juge nommé par Donald Trump.

La nouvelle a provoqué une avalanche de commentaires attristés sur les réseaux sociaux, où nombre de ses fans ont fait part de leur préoccupation, certains disant même être prêts à « lui donner un poumon ».

« RBG », comme elle est affectueusement surnommée, a subi une intervention vendredi au Memorial Sloan Kettering Cancer Center, à New York, pour des tumeurs cancéreuses au poumon, a annoncé la haute cour dans un communiqué.

« Deux nodules dans le lobe inférieur de son poumon gauche avaient été découverts par hasard pendant des examens médicaux à l'hôpital universitaire George Washington, où elle était soignée pour des côtes cassées lors d'une chute le 7 novembre », a ajouté la Cour, précisant que les nodules s'étaient avérés être des tumeurs « malignes ».

« Après l'opération, il n'y a pas de signe d'autres [nodules]. Des scanneurs effectués avant l'opération montrent qu'il n'y a pas d'indication sur la présence de la maladie ailleurs dans le corps », selon la même source.

Mme Bader Ginsburg « se repose et doit encore rester à l'hôpital pendant quelques jours ».

Militante acharnée

« RBG », nommée à la Cour suprême par le président Bill Clinton en 1993, est devenue une icône pour les progressistes et un nouveau film sur sa vie, On the Basis of Sex (Une femme d'exception), sort dans quelques jours aux États-Unis.

Son état de santé est scruté non seulement parce qu'elle est appréciée par beaucoup mais aussi parce que les démocrates redoutent plus que tout une défaillance de la magistrate la plus connue du quatuor progressiste - sur neuf juges nommés à vie au total - de la Cour suprême. Si elle venait à partir, le président Donald Trump la remplacerait en effet par un juge conservateur.

Depuis son arrivée au pouvoir, M. Trump a pu nommer deux magistrats à la Cour suprême - Neil Gorsuch, 51 ans, et Brett Kavanaugh, 53 ans - faisant pencher la balance en faveur des conservateurs.

Et les démocrates sont encore échaudés par la confirmation tumultueuse à la Cour en octobre de Brett Kavanaugh, farouche défenseur des valeurs conservatrices, accusé par une universitaire d'une tentative de viol remontant à une soirée entre élèves en 1982.

Mme Bader Ginsburg a dit qu'elle ne prendrait sa retraite que lorsqu'elle ne se sentirait plus capable de travailler.

Née dans une famille juive à Brooklyn, elle a fait ses études à l'université de Cornell et a épousé un camarade de classe, Martin Ginsburg. Elle a ensuite étudié le droit, d'abord à Harvard puis à Columbia, à une époque où le monde des avocats était presque exclusivement masculin.

Elle a eu beau finir parmi les premiers de sa promotion à Columbia, les cabinets d'avocats de New York l'ont d'abord snobée.

« J'avais trois choses contre moi. Un, j'étais Juive. Deux, j'étais une femme. Mais, le plus grave, c'était que j'étais la mère d'un enfant de quatre ans », a-t-elle dit dans une entrevue à CBS.

Elle devient alors une militante acharnée des droits des femmes. Entre 1972 et 1978, elle plaide dans six affaires de discrimination basée sur le genre devant la Cour suprême, en remportant cinq, tout en élevant deux enfants.

Elle devient ensuite la deuxième femme à siéger à la Cour suprême après Sandra Day O'Connor.

Presque 40 ans plus tard, lorsqu'on lui demande si elle est satisfaite du nombre de femmes à la Cour (trois actuellement), elle répond qu'elle le sera « quand il y en aura neuf ».