L'ampleur de ses crimes pourrait le faire entrer dans l'histoire comme l'un des tueurs en série les plus meurtriers des États-Unis : à 78 ans, Samuel Little a confessé avoir commis 90 meurtres, dont la plupart étaient passés inaperçus.

Le FBI, qui continue de recouper ses dires, a déjà confirmé sa responsabilité dans la mort de 34 personnes, en grande majorité des femmes marginales, souvent des prostituées ou des droguées, plutôt noires ou hispaniques, tuées entre 1970 et 2005 dans une quinzaine d'États.

Cet ancien boxeur tuait ses victimes en leur portant des coups violents ou les étranglait, avant d'abandonner leurs corps sur un bord de route, en contre-bas d'une falaise ou dans une décharge.  Faute d'impact de balles ou de coups de couteaux, nombre de ses homicides ont été classés comme des surdoses, des accidents ou des causes naturelles, a expliqué la police fédérale dans un communiqué.

Arrêté des dizaines de fois pour des vols, enlèvements, ou autre violences, son errance meurtrière n'a été soupçonnée qu'à deux reprises, au début des années 1980. Lié à la disparition de deux jeunes femmes, l'une dans le Mississippi, l'autre en Floride, il avait toutefois été relâché faute de preuves.  

Ce n'est qu'en 2012 que les forces de l'ordre ont établi avec certitude sa responsabilité dans des meurtres. Interpellé dans le cadre d'une affaire de trafic de drogues, son ADN l'a impliqué dans la mort de trois femmes à Los Angeles entre 1987 et 1989.

Lors de son procès, qui s'est conclu en 2014 par une peine de réclusion à perpétuité, il avait crié son innocence et échangé des insultes avec le fils d'une victime, rapportait alors la presse locale.

Quatre ans plus tard, son discours a radicalement changé.

Sinistre record

Après sa condamnation, le FBI a rouvert de vieux dossiers dont le mode opératoire ressemblait à celui utilisé à Los Angeles. En mai 2018, des enquêteurs ont rendu visite à Samuel Little dans sa prison californienne pour l'interroger sur ces morts suspectes.

Désireux d'être transféré dans un autre établissement, le détenu, qui se déplace désormais en fauteuil roulant et souffre d'un fort diabète, a accepté de coopérer. Au-delà des attentes.

«Il a cité les villes, les États et a donné le nombre de personnes tuées dans chaque lieu», a raconté l'agent Christina Palazzolo citée dans le communiqué du FBI : «Jackson, Mississippi : une ; Cincinnati, Ohio : une ; Phoenix, Arizona : trois ; Las Vegas, Nevada : une...»

Quand il s'est arrêté, son addition macabre s'élevait à 90 morts, autant que le nombre de victimes imputées à Gary Ridgway, qui détient le sinistre record du tueur en série condamné pour le plus grand nombre de meurtres aux États-Unis.

Cet homme tuait lui aussi des prostituées ou des fugueuses dans les années 80 et 90 dans l'État de Washington. Il a été condamné pour 49 de ces meurtres et en a confessé 71, mais est lié à une vingtaine d'autres disparitions.

«Mon monde»

Dans les années 70 et 80, Donald Harvey, un aide-soignant surnommé «l'ange de la mort», est soupçonné d'avoir tué 80 patients. Trente-sept de ses crimes ont été prouvés.

Dans le cas de Samuel Little, qui a été interrogé quasi quotidiennement depuis ses aveux de mai, les autorités n'ont pour l'instant pu confirmer que 34 des meurtres confessés.

Le septuagénaire se souvient sans émotion mais avec une grande précision de ses victimes, de leur nom (Alice, Mary-Ann, Linda...), de leur âge, des lieux et des circonstances des crimes. Mais il est très flou sur les dates, ce qui complique les vérifications.

«C'est effrayant à quel point ses souvenirs sont clairs après toutes ses années», a confié au New York Times Michael Mongeluzzo, un policier de Floride qui l'a interrogé sur ses aveux concernant la mort d'une jeune femme dans cet État en 1982. «Il se rappelle des noms, des visages.»

Lors de leur échange, le policier lui a demandé comment il avait réussi à échapper pendant aussi longtemps à la justice. «Je pouvais aller dans mon monde et faire ce que je voulais », lui a répondu Samuel Little en évoquant sa vie aux marges de la société, au coeur de quartiers déshérités. « Je ne serai pas allé dans votre monde.»