La politique migratoire de Donald Trump a subi un nouveau revers judiciaire avec le gel d'une mesure restreignant le droit d'asile, alors que des milliers de migrants d'Amérique centrale se massent à la frontière sud des États-Unis.

« C'est une honte », a commenté mardi le président américain, en critiquant une décision politique prise par un juge « nommé par (son prédécesseur démocrate Barack) Obama ». « Ce n'est pas du droit », a-t-il encore assené.

« Mais on va contourner ça très vite », a-t-il assuré, en se disant confiant de gagner devant la Cour suprême.

L'an dernier, le magnat de l'immobilier avait déjà connu des déboires judiciaires avec un décret migratoire controversé. Sa première mesure phare dans le domaine - l'interdiction de voyager aux États-Unis pour des ressortissants de pays à majorité musulmane - avait elle aussi été bloquée à plusieurs reprises en justice, avant que la Cour suprême ne valide sa dernière version.

Cette fois, un juge californien a bloqué temporairement un décret signé le 9 novembre par Donald Trump, qui prévoyait de rejeter automatiquement les demandes d'asile déposées par des personnes ayant traversé illégalement la frontière.

« Quelle que soit l'étendue de l'autorité du président, il ne peut pas réécrire les lois sur l'immigration pour imposer des conditions que le Congrès a expressément interdites », a estimé le juge fédéral Jon Tigar de San Francisco dans sa décision rendue tard lundi.

Or le Congrès a « clairement ordonné que tout étranger qui arrive aux États-Unis, indépendamment de son statut, puisse demander l'asile », a-t-il ajouté en louant un principe au coeur « de l'histoire de notre nation : l'accueil des réfugiés sans abri à nos frontières ».

Le magistrat a suspendu le décret jusqu'à une audience sur le fond fixée au 19 décembre.

Il avait été saisi en urgence par trois organisations de défense des droits civiques, dont la puissante American Civil Liberties Union (ACLU) qui s'est réjouie de cette décision.

Le décret « est illégal et aurait mis des vies en danger. Le bloquer est une étape essentielle pour lutter contre les attaques de l'administration à l'encontre des demandeurs d'asile », a-t-elle tweeté.

Files d'attente

Comme lors de la présidentielle de 2016, Donald Trump avait fait de l'immigration un thème majeur de sa campagne avant les élections législatives de mi-mandat du 6 novembre, aux résultats mitigés.

Alors que des milliers de migrants fuyant la violence et la misère au Guatemala, Salvador et Honduras se dirigeaient vers les États-Unis, le milliardaire républicain avait évoqué une « invasion » de migrants et assuré, sur un ton alarmiste, que « des criminels et des personnes du Moyen-Orient » s'étaient glissés dans cette « caravane ».

Face à leur progression, le magnat de l'immobilier avait déployé à la frontière sud quelque 5800 militaires, qui déroulent actuellement des kilomètres de barbelés pour renforcer la barrière naturelle du fleuve Rio Grande.

Il avait également promulgué le décret contesté pour tenter de les décourager de franchir illégalement la frontière et pousser le Mexique à les prendre en charge.

L'administration Trump avait fait valoir que sa mesure visait à assurer la sécurité nationale et à désengorger un système déjà surchargé : quelque 700 000 dossiers sont en attente devant les tribunaux.

Mais le décret avait suscité de vives protestations, y compris de la part du Haut commissariat de l'ONU aux réfugiés (HCR), qui avait également critiqué les capacités d'accueil limitées des États-Unis à la frontière, provoquant des délais d'attente de plus en plus longs.

Et ces délais ne cessent d'empirer à mesure que les migrants continuent à affluer dans le nord du Mexique, notamment à Tijuana, où attendent déjà plus de 3200 personnes arrivées d'Amérique centrale ces derniers jours.

Vendredi, des centaines de migrants ont patienté au poste frontalier d'El Chaparral pour s'inscrire sur une liste de demandeurs d'asile, où figuraient déjà 1400 noms. En effectif insuffisant, les autorités américaines n'ont pu traiter qu'une trentaine de cas dans la journée.

Dimanche, environ 200 migrants ont formé une nouvelle caravane partant du Salvador vers l'eldorado américain.