L'autorité palestinienne a « rejeté » et « condamné » la décision des États-Unis vendredi de ne plus financer l'agence de l'ONU pour les réfugiés palestiniens (UNRWA), sur fond de crise de plus en plus profonde avec Washington.

Après avoir « attentivement examiné la question », l'administration de Donald Trump « a décidé que les États-Unis ne feraient pas de contribution supplémentaire à l'UNRWA », une « opération irrémédiablement biaisée », a indiqué la porte-parole du département d'État, Heather Nauert, dans un communiqué.

« Nous rejetons et condamnons cette décision américaine dans son intégralité », a réagi, dans un communiqué, le négociateur en chef palestinien et secrétaire général de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP), Saëb Erakat.

M. Erakat appelle les pays du monde « à rejeter cette décision et à fournir tout l'appui possible » à l'UNRWA.

Dans un communiqué, le porte-parole du secrétaire général de l'ONU, Stéphane Dujarric, a indiqué « regretter » la nouvelle décision américaine concernant l'UNRWA, qui « fournit des services essentiels aux réfugiés palestiniens et contribue à la stabilité de la région ».

« L'UNRWA bénéficie de la pleine confiance du secrétaire général », a-t-il ajouté, en saluant les efforts d'adaptation de l'organisation après la réduction au début de l'année des financements américains. Antonio Guterres « appelle les autres pays à aider à combler le déficit financier » de l'UNRWA afin qu'elle « puisse continuer à fournir son assistance vitale » aux Palestiniens, a précisé Stéphane Dujarric.

« Profonds regrets »

L'UNRWA, par l'entremise de son porte-parole, Chris Gunness, a également fait part de « profonds regrets » et de « déception ». « Nous rejetons dans les termes les plus forts possible la critique [estimant] que les écoles de l'UNRWA, les centres de santé et les programmes d'assistance d'urgence sont "irrémédiablement imparfaits" », a-t-il gazouillé.

La décision de Donald Trump de reconnaître unilatéralement Jérusalem comme capitale d'Israël, fin 2017, a marqué une rupture dans les relations avec les Palestiniens. Ses dirigeants ont immédiatement coupé tout contact avec Washington, lui déniant désormais tout rôle de médiateur dans le processus de paix avec Israël, malgré les ambitions affichées par le président des États-Unis.

En réponse, ce dernier avait annoncé fin janvier qu'il conditionnerait le versement de l'aide aux Palestiniens à leur retour à la table des négociations. Et son administration est progressivement passée à l'acte.

D'abord en ne versant, début 2018, que 60 millions de dollars à l'UNRWA, contre 350 millions l'année précédente. Cette décision, assortie d'un « examen » de toute éventuelle contribution supplémentaire, avait déjà plongé dans la crise cette agence de l'ONU, qui assiste plus de trois millions de Palestiniens sur les cinq millions enregistrés comme réfugiés, mais que le gouvernement américain accuse de « biais anti-Israéliens ».

Ensuite, en annonçant il y a une semaine l'annulation de plus de 200 millions de dollars d'aide bilatérale aux Palestiniens - soit la quasi-totalité de l'assistance américaine hors coopération en matière de sécurité.

Avant l'annonce de vendredi, les responsables palestiniens avaient accusé les États-Unis de « renier leurs engagements internationaux et leur responsabilité ».

« En faisant siennes les positions israéliennes extrêmes sur tous les sujets, y compris sur les droits de plus de cinq millions de réfugiés palestiniens, l'administration américaine a perdu son statut de médiateur et nuit non seulement à une situation déjà instable, mais aussi aux chances d'une paix future au Moyen-Orient », a dénoncé l'émissaire palestinien à Washington, Hossam Zomlot.

« Attaque politique »

L'annonce de vendredi devrait donc aggraver la crise diplomatique.

« Lorsque nous avons fait une contribution américaine de 60 millions de dollars en janvier, nous avions dit clairement que les États-Unis n'avaient pas l'intention de s'acquitter de la part très disproportionnée du fardeau des coûts de l'UNRWA, de laquelle nous nous sommes occupés pendant de nombreuses années », a rappelé Heather Nauert.

Quelques projets ont émergé pour tenter de pallier le retrait américain. Berlin a annoncé vendredi une hausse « substantielle » de la contribution allemande à l'agence de l'ONU et a appelé ses partenaires européens à en faire autant. La Jordanie a de son côté annoncé l'organisation d'une conférence le 27 septembre à New York afin de la soutenir.

D'ici fin septembre, « l'UNRWA n'aura plus un sou », avait averti mercredi son porte-parole, Chris Gunness. L'agence a besoin de 200 millions de dollars d'ici la fin de l'année pour remplir sa mission et financer ses écoles et centres de santé.

Heather Nauert a assuré que les autorités américaines étaient « conscientes et profondément préoccupées par les répercussions » de cette situation « sur les Palestiniens innocents, notamment les élèves », alors que les conditions de vie dans la bande de Gaza, contrôlée par le mouvement islamiste Hamas et soumise à un strict blocus israélien, se détériorent rapidement.

La porte-parole de la diplomatie américaine a par ailleurs mis en cause le « modèle » même de l'UNRWA, promettant d'« intensifier le dialogue avec les Nations unies » pour trouver « de nouvelles approches ». Surtout, elle a accusé l'agence d'augmenter « sans fin et de manière exponentielle » le nombre de Palestiniens admissibles au statut de réfugié : « Ce n'est simplement pas viable ».