Les États-Unis n'ont «pas peur» de sanctionner «au plus haut niveau» le régime de Téhéran, accusé d'être «un cauchemar pour le peuple iranien», a prévenu dimanche le secrétaire d'État américain Mike Pompeo dans un discours de soutien aux manifestations en Iran.

Le 8 mai, le président Donald Trump, dont la République islamique est devenue la principale bête noire, décidait de claquer la porte de l'accord censé empêcher l'Iran de se doter de la bombe atomique et de rétablir toutes les sanctions levées dans le cadre de ce texte jugé trop laxiste.

Mike Pompeo dévoilait ensuite le 21 mai sa «nouvelle stratégie» visant à contraindre l'Iran à se plier à douze exigences draconiennes, sous la menace des sanctions «les plus fortes de l'Histoire».

Lors du troisième acte, le chef de la diplomatie américaine a prononcé dimanche devant la diaspora iranienne, à la bibliothèque présidentielle Ronald Reagan de Simi Valley, un discours intitulé «Soutenir les voix iraniennes».

Alors que les alliés européens des États-Unis tentent par tous les moyens de sauver l'accord sur le nucléaire iranien, il a appelé le monde à «cesser de flirter avec un régime révolutionnaire» accusé de «corruption», de «terrorisme», de violations des droits de l'Homme et de persécutions religieuses.

Il a confirmé que Washington souhaite que tous les pays réduisent leurs importations de pétrole iranien «au plus près de zéro» d'ici la date-butoir du 4 novembre, faute de quoi ils s'exposeront aux sanctions américaines.

«Ce n'est pas fini», a-t-il mis en garde au sujet des sanctions américaines, après avoir rappelé que les États-Unis avaient déjà ciblé en janvier l'ayatollah Sadegh Larijani, chef de l'Autorité judiciaire, pour violations des droits de l'Homme.

«Les dirigeants du régime, notamment ceux à la tête des Gardiens de la Révolution», l'armée d'élite iranienne, «et de la Force Qods», chargée des opérations extérieures, «doivent payer chèrement pour leurs mauvaises décisions», a-t-il estimé.

Alors que l'administration Trump est régulièrement soupçonnée de caresser l'espoir d'un changement de régime en Iran, Mike Pompeo a réaffirmé vouloir uniquement «que le régime change de manière significative son comportement, à la fois à l'intérieur de l'Iran et sur la scène mondiale».

«Quarante ans de kleptocratie» 

«Il reviendra in fine au peuple iranien de choisir ses dirigeants», mais «sous le président Trump, les États-Unis ne resteront pas silencieux», a-t-il lancé, longuement applaudi par les représentants de la diaspora, malgré l'interruption d'une manifestante rapidement écartée.

«Les États-Unis vous entendent, les États-Unis vous soutiennent, les États-Unis sont à vos côtés», a-t-il ajouté à l'intention des manifestants, qui selon lui descendent dans la rue comme jamais depuis la révolution islamique de 1979.

Concrètement, il a annoncé le lancement d'une chaîne multimédia (télévision, radio, numérique et réseaux sociaux) 24 heures sur 24 en langue farsi, «afin que les Iraniens ordinaires en Iran et à travers le monde sachent que l'Amérique est à leurs côtés».

L'idée de l'administration Trump est simple: tenter de profiter des tensions sociales qui semblent se multiplier en Iran, sur fond de difficultés économiques aggravées par l'annonce du retour des sanctions américaines qui fait partir de nombreuses entreprises étrangères.

Elle compte s'appuyer sur une date symbolique, les 40 ans de la République islamique, l'an prochain. «Quarante ans de kleptocratie, 40 ans de richesse détournée pour soutenir le terrorisme, 40 ans d'emprisonnement d'Iraniens ordinaires pour avoir pacifiquement exprimé leurs droits», a martelé Mike Pompeo.

La communauté diplomatique et les experts sont divisés à Washington quant à savoir si la République islamique est vraiment ébranlée par la crise sociale en cours, voire menacée de l'intérieur. Et le débat fait rage aussi sur les conséquences d'une éventuelle chute du pouvoir actuel.

«Un vrai changement de régime ne peut venir que de l'intérieur», explique à l'AFP Behnam Ben Taleblu, du think tank conservateur Foundation for Defense of Democracies, estimant que «des Iraniens de toutes classes sociales manifestent plus que jamais».

«Le résultat le plus probable d'un éventuel effondrement du régime serait un coup d'État militaire pour rétablir l'ordre, mené par l'homme que les faucons de Washington redoutent le plus: le général Ghassem Souleimani», qui commande la Force Qods, met en garde pour sa part Mark Fitzpatrick, de l'International Institute for Strategic Studies.

Mike Pompeo a balayé cet argument, refusant de faire la distinction entre radicaux et modérés. «Des gouvernements à travers le monde craignent que s'attaquer à la République islamique affaiblisse la cause des modérés, mais ces soi-disant modérés au sein du régime restent des révolutionnaires islamiques violents anti-Amérique et anti-Occident», a-t-il insisté, épinglant nommément le président Hassan Rohani et son ministre des Affaires étrangères Mohammad Javad Zarif.