Donald Trump n'a pas manqué de dérouler le tapis rouge au général Kim Yong Chol, bras droit de Kim Jong-un, vendredi à la Maison-Blanche, faisant fi de tout protocole et se lançant dans un pari diplomatique aux enjeux considérables.

En tout début d'après-midi, un Chevrolet Suburban noir du gouvernement américain est arrivée au 1600 Pennsylvania Avenue.

En est d'abord sorti, précipitamment, un membre du service de sécurité nord-coréen visiblement un peu anxieux: un garde du corps a refermé par mégarde la porte de la voiture sur son collègue.

Le tant attendu général Kim Yong Chol a ensuite quitté le véhicule.

L'ancien chef espion de 72 ans, envoyé du régime nord-coréen, est devenu à ce moment-là le plus haut dirigeant nord-coréen à être reçu à la Maison-Blanche en 18 ans.

Le protocole habituel voudrait qu'un homme de son rang, en particulier quelqu'un, comme lui, visé par des sanctions économiques et représentant un pays ennemi, soit discrètement admis par la porte de derrière pour participer à une réunion secrète.

Mais pas sous la présidence Trump.

Un autre général, le secrétaire général de la Maison-Blanche, John Kelly, l'a accueilli avant de l'escorter dans le Bureau ovale. Un honneur habituellement rare pour qui n'est pas chef d'État, et surtout issu d'un régime autoritaire.

Le personnel de la Maison-Blanche avait prévu que s'il y avait rencontre avec Donald Trump, cette dernière serait courte, le temps d'échanger quelques amabilités en remettant la lettre de Kim Jong-un au président américain.

L'échange a duré près de 90 minutes.

« On a parlé de tout », a assuré, une fois le général Kim reparti, le président américain lors d'une allocution à la presse dans un cadre quasi-bucolique: sous le soleil de Washington et avec le gazouillis des oiseaux en fond sonore.

« Ça s'est très bien passé. C'est vraiment une situation où l'on a appris à se connaître », a-t-il abondé.

« Vous voyez notre relation »

Manquait à l'appel lors de la scène John Bolton, le conseiller à la sécurité nationale « faucon » de Donald Trump, qui a par le passé suggéré un changement de régime en Corée du Nord, provoquant l'ire de Pyongyang.

John Bolton est resté éloigné des caméras, et n'était pas de la réunion dans le Bureau ovale, ont expliqué des conseillers.

Au vu de la relation amicale que semble vouloir construire Donald Trump, son absence n'est pas anodine, même si les responsables de la Maison-Blanche se défendent de tout message politique sous-jacent.

Donald Trump a cependant expliqué à la presse ne plus vouloir utiliser l'expression « pression maximale » qu'il utilisait jusqu'ici pour décrire sa politique à l'égard de la Corée du Nord.

« Nous nous entendons bien. Vous voyez notre relation », a-t-il poursuivi.

Le président américain a même reconnu ne pas avoir évoqué la question des droits de l'Homme avec le général Kim, préférant se concentrer sur la tenue du sommet avec Kim Jong-un à Singapour, le 12 juin.

Le tableau était idyllique, à l'exception peut-être d'un léger détail sur la veste du Nord-coréen, lorsque les deux hommes ont posé côte à côte pour la photo dans les jardins de la Maison-Blanche, avant que le président américain ne raccompagne le général nord-coréen à sa voiture.

On pouvait alors voir épinglé sur la poitrine gauche de Kim Yong Chol une épinglette rouge, à l'effigie des deux précédents dirigeants nord-coréens: Kim Il Sung et Kim Jong Il, respectivement grand-père et père de l'actuel dirigeant.

Le premier a lancé le programme nucléaire nord-coréen, l'autre a refusé d'y mettre fin.