Les virulentes attaques de Donald Trump contre les journalistes ne sont pas nouvelles. Mais au moment où, du commerce à l'immigration, il semble déterminé à revenir aux thèmes qui faisaient mouche en campagne, elles prennent une tournure plus systématique.

Après avoir moqué samedi le «Fake Washington Post», le locataire de la Maison-Blanche s'en est pris mardi aux «Fakers» de CNN, NBC, ABC ou encore CBS.

La nouvelle tirade de tweets présidentiels intervient sur fond de polémique sur les consignes données aux journalistes du puissant du groupe Sinclair Broadcast, qui possède ou gère près de 200 télévisions locales à travers les États-Unis.

Une vidéo, devenue virale au cours du weekend, compile les formules répétées à l'identique par des dizaines de présentateurs mettant en garde, dans un registre similaire à celui fréquemment utilisé par Donald Trump, contre les «fausses» informations diffusées par certains médias.

Reprenant tous la même formulation, ils dénoncent «la tendance troublante d'histoires irresponsables, ne présentant qu'un seul point de vue, qui gangrènent le pays».

«Le partage d'informations fausses et biaisées est devenu très répandu sur les réseaux sociaux. Plus alarmant encore, certains médias publient les mêmes histoires fausses sans d'abord vérifier les faits. Ceci est extrêmement dangereux pour notre démocratie», disent-ils encore.

Le débat prend un relief particulier au moment où le groupe envisage d'acquérir Tribune Media pour étendre encore son influence dans la télévision locale.

David Price, élu démocrate de Caroline du Nord, a défendu la nécessité de bloquer cette «méga-fusion» qui, si elle aboutissait, permettrait selon lui au groupe de toucher «72% des téléspectateurs avec cette propagande pro-Trump».

Le journaliste Dan Rather, qui a présenté pendant près d'un quart de siècle le journal du soir de la chaîne CBS, avant d'être évincé en raison d'un reportage erroné, a donné de la voix.

Disant son effarement face à des présentateurs de télévision qui, à l'unisson, «regardent la caméra et qui lisent un message transmis par leur direction», il a lancé: «Ce n'est pas du journalisme, c'est de la propagande».

«Les chaines Fake News»

Le président américain, lui, a pris sans détour la défense du groupe Sinclair.

«Les chaines Fake News, celles qui ont un parti pris écoeurant, s'inquiètent de la concurrence et de la qualité de Sinclair Broadcast», a-t-il tweeté.

«Les 'Fakers' à CNN, NBC, ABC et CBS ont fait tellement de journalisme malhonnête qu'ils ne devraient être en lice que pour des prix récompensant des fictions», a-t-il ironisé.

Scott Livingston, l'un des dirigeants du groupe, a jugé paradoxal d'être attaqué pour des messages «en faveur d'un journalisme objectif et honnête et plus particulièrement pour encourager le public à demander des comptes aux salles de rédaction».

Le président américain s'en est aussi pris une nouvelle fois mardi matin à CNN, dénonçant le positionnement «anti-Trump» de la chaîne.

L'un de ses journalistes, Jim Acosta, a été critiqué par certains de ses proches pour avoir tenté de poser une question sur l'immigration alors qu'il participait, avec son épouse Melania, à une événement pour Pâques avec des enfants sur les pelouses de la maison Blanche.

Brad Parscale, qui fut chargé de la stratégie numérique lors de la campagne de 2016 et vient d'être nommé responsable de son «comité de réélection», a dénoncé «un manque de respect» inacceptable, jugeant que son accréditation à la Maison-Blanche devrait lui être retiré.

«Je ne fais que mon métier...qui est protégé par le premier amendement de la Constitution», a répondu ce dernier.

Au-delà du débat sur les conditions dans lesquelles les journalistes interpellent le président, cette nouvelle polémique illustre un climat chaque jour plus tendu, sans précédent dans l'histoire politique américaine moderne qui a pourtant connu nombre de pics de tensions entre l'exécutif et les médias.

La dernière conférence de presse de Donald Trump seul face aux journalistes remonte au 16 février 2017.