«Protégez notre avenir, pas les armes à feu» : des dizaines de milliers d'élèves américains ont interrompu mercredi les cours et exigé de Donald Trump des mesures pour prévenir de nouvelles tueries dans les écoles.

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De New York à la Californie, de Chicago jusqu'au Texas, ces adolescents avaient minutieusement préparé des pancartes et répété des slogans, pour cet événement baptisé «National School Walkout».

Pour beaucoup, il s'agissait de leur première manifestation et celle-ci s'est révélée la plus importante depuis des années sur le sujet des armes, que beaucoup d'Américains estiment relever de leurs droits les plus fondamentaux.

Des centaines de collégiens et d'élèves ont ainsi afflué vers la Maison-Blanche à Washington. «Les prières, cela ne suffit pas», ont-ils crié à l'intention du président américain.

Cette mobilisation visait aussi à rendre hommage aux victimes d'un massacre au fusil semi-automatique dans une école secondaire de Floride, un mois jour pour jour après le drame.

L'interruption des cours a débuté à 10h00 et était censée durer 17 minutes, une minute pour chacune des 17 personnes tuées par balle le 14 février à Parkland. Mais, dans de nombreuses écoles, les élèves ont dépassé cette durée.

«Stop à l'inaction», ont par exemple insisté les élèves de Parkland, à la pointe de cette contestation spontanée.

«Nos hommes politiques, nos représentants au parlement, notre président, notre gouverneur ne parlent pas en notre nom. C'est vraiment regrettable. Voilà pourquoi c'est à nous de réagir», a expliqué Emiro Portillo, un élève de l'école.

«Les prières ne sont pas pare-balles» 

Face à la Maison-Blanche, les élèves ont scandé des slogans hostiles à la NRA, le premier lobby des armes.

Ils ont ensuite rallié la colline du Capitole, siège du Congrès. Dans une initiative symbolique, 7000 paires de chaussures avaient été déposées mardi devant l'imposant bâtiment, en hommage aux 7000 enfants tués par arme à feu depuis cinq ans.

Plusieurs dizaines de membres du Congrès sont venus à la rencontre des jeunes manifestants, dont l'ex-candidat à la primaire démocrate Bernie Sanders, applaudi comme une rock star.

Le National School Walkout a monté en puissance avec les mots d'ordre #Enough (ça suffit) et #NeverAgain (plus jamais ça) sur les réseaux sociaux.

Le mouvement se déclare résolument opposé à «toute législation qui viserait à fortifier les écoles avec davantage d'armes».

Or c'est justement dans cette voie que l'exécutif s'est engagé lundi. La Maison-Blanche a présenté une série de mesures qui prévoient de former au maniement des armes des enseignants volontaires et de renforcer la présence des policiers et gardes armés dans les écoles.

Le président Trump a fait savoir mercredi qu'il partageait «les préoccupations des élèves sur la sécurité dans les écoles», sans revoir ces propositions.

«Armer les enseignants est tout simplement une mauvaise idée», jugeait Farah Parmah, 17 ans, devant le Capitole. «S'il se passe quelque chose, le professeur aura-t-il le courage de tirer?»

Deux incidents confortaient ceux qui craignent d'autoriser les enseignants à porter des armes: un professeur, également policier réserviste, a tiré mardi par accident en classe avec son arme, en vérifiant si elle était chargée. Il voulait montrer à des élèves comment désarmer quelqu'un. Un élève a été légèrement blessé au cou par un fragment de balle.

Le même jour, un incident similaire s'est produit à Alexandria en banlieue de Washington, quand un garde de sécurité a tiré par accident dans une école, sans faire de blessés.

AFP

7000 paires de chaussures avaient été déposées mardi devant le Capitole.

«Rien n'a bougé» 

À New York, une cinquantaine d'initiatives ont eu lieu mercredi. À l'école secondaire Edward Murrow de Brooklyn, le maire démocrate Bill de Blasio est venu encourager les participants qui s'étaient affublés d'accessoires orange, la couleur du mouvement anti-armes.

«Il faut des lois contre les armes. Nous comprenons que des gens aient besoin (d'une arme) pour protéger leur famille, mais cela est devenu incontrôlable», estimait Katherine Volovik, 17 ans.

À l'autre extrémité du pays, Makena Cioni, 16 ans, faisait le même constat: «J'étais en 5e année du primaire quand des enfants ont été tués à (l'école) Sandy Hook. Je me souviens que, même à cet âge-là, je me suis dit que les adultes devaient agir... Et plusieurs années plus tard, rien n'a bougé, les fusillades continuent».

Toujours dans la mégapole californienne, des élèves de la Granada Hills Charter High School ont formé le mot «enough» (assez) en s'allongeant par terre par dizaines.

Coïncidence du calendrier, Nikolas Cruz, le tireur de Parkland, a comparu mercredi pour sa mise en accusation formelle. Le jeune homme de 19 ans, les membres enchaînés, s'est assis prostré dans la salle d'audience.

Les procureurs de Floride veulent requérir la peine de mort à son encontre.

Les élèves américains ont prévu de se retrouver à nouveau le samedi 24 mars pour un grand rassemblement contre les armes à feu, qui font plus de 30 000 morts par an aux États-Unis.

AP

Des milliers d'élèves marchaient mercredi vers le Capitole.