Près de deux semaines après la fusillade meurtrière qui a fait 17 morts, les élèves de l'école Marjory Stoneman Douglas maintenaient mardi la pression face à des parlementaires américains réticents à s'engager dans une réforme de la règlementation des armes à feu.

À Parkland, au nord de Miami, les gens continuaient de déposer gerbes de fleurs et bougies près des dix-sept croix blanches érigées en mémoire des victimes près de l'établissement qui doit rouvrir mercredi.

«Je vais être forte», a affirmé à l'AFP Jenna Korsten, une élève du lycée âgée de 17 ans. «Nous devons être forts dans ce genre de situation, car nous sommes une famille».

À Washington, des rescapés de la tuerie ont poursuivi leur campagne pour convaincre les élus de l'urgence d'une règlementation plus stricte sur les armes. Mais les bonnes intentions se heurtent à la résistance des parlementaires et de la National Rifle Association (NRA), le puissant lobby proarmes.

Pour le président de la Chambre des représentants, le républicain Paul Ryan, ce sont les failles du système de vérification des antécédents qui ont permis au tireur, Nikolas Cruz, d'acheter légalement un fusil semi-automatique malgré plusieurs alertes sur son comportement.

«Il y a eu un échec colossal dans le système localement, le FBI a échoué à enquêter sur une information claire», a-t-il expliqué devant la presse, évitant de répondre aux questions sur une éventuelle nouvelle loi.

«Bien sûr, je veux écouter les enfants», a-t-il dit. «Mais nous voulons aussi nous assurer que nous protégeons les droits des gens (à acheter une arme) et leurs droits constitutionnels».

M. Ryan a également souligné qu'un projet de loi voté par la Chambre attendait son examen au Sénat.

Il faisait référence à un texte incitant les autorités locales et fédérales à alimenter le Fichier national de vérification instantanée du casier judiciaire (NICS), et qui porte aussi sur l'autorisation du port d'arme dissimulée («concealed carry»), une mesure qui ne devrait pas passer à la Chambre haute.

«Alors que les gens pensent à de nouvelles lois, il faut d'abord regarder le nombre de lois qui n'ont pas été mises en application, qui ne sont pas appliquées de la bonne manière», a renchéri Steve Scalise, numéro trois des républicains de la Chambre.

Pas d'interdiction

M. Scalise a été grièvement blessé en juin 2017 lorsqu'un homme a ouvert le feu sur l'équipe de baseball républicaine du Congrès. Il a discuté lundi soir avec des rescapés de la fusillade lors d'une rencontre «remplie d'émotions», a-t-il dit à la chaîne CBS.

Mais il s'est dit opposé à toute interdiction spécifique, comme le semi-automatique de type AR-15 utilisé par Cruz, préférant la présence d'armes dans les écoles, ce que refusent de nombreux responsables politiques et une partie du personnel éducatif.

L'élu de Louisiane a rappelé que son assaillant avait été tué par un policier de faction. «J'aurais souhaité que cela arrive au lycée où, clairement, il y avait un policier sur place qui s'est caché au lieu d'affronter le tueur», a-t-il accusé.

Scot Peterson, ce policier vilipendé depuis le massacre, s'est défendu lundi en affirmant qu'il avait suivi la procédure.

Le président Donald Trump s'est lui aussi prononcé pour un contrôle plus sévère des antécédents et veut interdire les «bump stocks», un dispositif qui transforme des fusils semi-automatiques en quasi armes automatiques. Il a été utilisé par Stephen Paddock, l'auteur de la fusillade de Las Vegas (58 morts) en octobre 2017, la plus meurtrière de l'histoire moderne du pays.

La Maison-Blanche a souligné mardi qu'il était aussi favorable au relèvement de l'âge légal, de 18 à 21 ans, pour acheter «certaines armes», sans préciser s'il s'agissait de semi-automatiques. Le président doit rencontrer mercredi des parlementaires pour évoquer la question, mais la NRA, dont il affirme être un «grand fan», a déjà clamé son opposition sur ce point.

M. Trump n'a pas non plus évoqué la possibilité d'interdire les fusils d'assaut, une idée pourtant jugée cruciale par les rescapés du lycée de Parkland.

La Floride - qui a l'une des législations les plus favorables du pays pour la détention et l'usage des armes à feu - doit étudier cette semaine une série de propositions, notamment le relèvement de l'âge légal pour acheter une arme, l'allongement du délai de vérification des antécédents et l'interdiction des «bump stocks».

Le Sénat de l'État a toutefois retoqué lundi un amendement interdisant des armes semi-automatiques.

Après la fusillade, plusieurs sociétés, dont la compagnie aérienne Delta Air Lines, ont annoncé l'arrêt des rabais aux membres de la NRA. Le Sénat de Géorgie a menacé en représailles de couper une importante subvention à la compagnie basée à Atlanta.