L'ancien directeur de campagne de Donald Trump, Paul Manafort, aurait versé plus de 2 millions d'euros (3,1 millions de dollars CAN) à d'anciens hauts responsables européens pour faire du lobbying en faveur du gouvernement de l'ex-président ukrainien Viktor Ianoukovitch, soutenu par Moscou, selon un acte d'accusation le visant dans le cadre de l'enquête sur la présidentielle américaine de 2016.

Paul Manafort avait retenu ce «Hapsburg group», composé d'anciens hommes politiques, pour «prendre des positions favorables à l'Ukraine, y compris en faisant du lobbying aux États-Unis», peut-on lire dans l'acte d'accusation déposé devant un tribunal fédéral à Washington par Robert Mueller, le procureur spécial chargé de l'enquête sur l'ingérence russe dans la dernière présidentielle américaine.

Le groupe, dirigé par un «ancien chancelier européen», aurait en 2012-2013 fait du lobbying auprès de parlementaires américains et de responsables de la Maison-Blanche, toujours selon l'acte d'accusation.

Ils «avaient l'air de fournir des évaluations indépendantes sur les actions du gouvernement ukrainien, alors qu'en fait ils étaient payés pour faire du lobbying pour l'Ukraine», indique également le document de justice.

Ils avaient pour consigne d'«agir de façon informelle et sans aucune relation visible» avec le gouvernement ukrainien, selon une note rédigée par Paul Manafort en juin 2012.

Selon des médias autrichiens, un ancien chancelier européen, cité dans l'acte d'accusation, serait Alfred Gusenbauer, à la tête du gouvernement autrichien en 2007 et 2008.

Mais M. Gusenbauer a démenti samedi auprès de l'Agence de presse autrichienne et à la radio publique avoir été impliqué dans de telles actions de lobbying, affirmant même n'avoir jamais entendu parlé du «Hapsburg group».

«J'ai rencontré Manafort deux fois je crois (...) mais je n'ai rien à voir avec les activités de Paul Manafort en Ukraine ou avec le parti de Ianoukovitch et ses activités aux États-Unis», a déclaré M. Gusenbauer à la radio Oe1.

L'ancien président ukrainien Viktor Ianoukovitch, qui était soutenu par Moscou, a été renversé en 2014.

Paul Manafort a lui brièvement pris - entre juin et août 2016 - les rênes de la campagne de Donald Trump, avant d'être renvoyé en raison de «conflits potentiels» d'intérêts avec des pays étrangers, selon le président américain.

Il a été depuis visé par l'enquête sur l'affaire russe aux États-Unis et fait l'objet de plusieurs chefs d'inculpation, parmi lesquels complot contre les États-Unis, blanchiment, fausses déclarations et non-déclarations de comptes détenus à l'étranger.

Le dernier acte d'accusation n'inculpe cependant Paul Manafort d'aucun crime en lien avec les activités du «Hapsburg Group», mais ces activités sont détaillées dans le but de montrer qu'il faisait activement du lobbying pour l'Ukraine et aurait enfreint les lois américaines en ne s'enregistrant pas comme tel dans le pays.

Pour sa part, le Parquet ukrainien a annoncé samedi son intention de coopérer avec Washington dans l'affaire Manafort.

«Nous voulons comprendre comment ils vont coopérer avec nous», a indiqué à l'AFP Serguiï Gorbatiouk, chargé des investigations spéciales au sein du Parquet général ukrainien, en soulignant que les enquêtes visant Paul Manafort aux États-Unis se croisent avec celles menées en Ukraine.

Ainsi, les procureurs ukrainiens voulaient interroger M. Manafort il y a quelques années, mais les autorités américaines n'ont jamais répondu à une demande officielle de Kiev sur ce sujet, a-t-il affirmé.

Dans les prochains jours, le Parquet ukrainien doit envoyer une lettre à Robert Mueller pour évoquer ces enquêtes ukrainiennes concernant Paul Manafort, selon la même source.

«Pour obtenir un résultat, il est important de coopérer», a insisté M. Gorbatiouk.

AFP

L'ancien président ukrainien Viktor Ianoukovitch