Le célèbre narcotrafiquant mexicain Joaquin «El Chapo» Guzman, tenu à un régime de quasi-isolement en attendant son procès en septembre, a affirmé jeudi que son procès prévu en septembre serait «une farce» si les règles qui l'empêchent actuellement de financer sa défense n'étaient pas assouplies.

Lors d'une audience au tribunal fédéral de Brooklyn jeudi matin, son avocat, Eduardo Balarezo, avait expliqué que la défense ne pouvait pas préparer correctement le procès «faute d'argent».

Me Balarezo avait notamment évoqué quelque 100 témoins potentiels à charge, souvent des prisonniers espérant des réductions de peine en échange d'informations sur «El Chapo», sur lesquels il ne pouvait pas enquêter faute de fonds.

«J'ai reçu un paiement partiel de mes honoraires» mais les amis d'«El Chapo» qui l'ont aidé pour ce premier versement «ne peuvent pas payer le reste», avait indiqué l'avocat. Et comme «El Chapo» n'a le droit de donner aucune instruction à personne, «c'est un cercle vicieux».

Le narcotrafiquant de 60 ans, qui s'est évadé à deux reprises de prisons mexicaines, avait demandé lors de l'audience à lire une lettre à haute voix, mais le juge Brian Cogan ne l'y avait pas autorisé.

Cette lettre a cependant été versée au dossier jeudi soir. «Monsieur le juge, je demande une modification des règles et qu'on m'autorise à voir mon épouse en face-à-face pour régler ce problème», écrit «El Chapo».

Il demande à pouvoir donner des instructions à sa femme pour trouver de l'argent pour sa défense - ce qui lui est interdit actuellement par les règles d'incarcération fixées par le juge - «sinon mon procès sera une farce».

La jeune épouse d'«El Chapo», l'ex-reine de beauté Emma Coronel, assistait à l'audience avec leurs jumelles de six ans. L'accusé les a saluées de la main.

Interpellé en janvier 2016 au Mexique et extradé aux États-Unis un an plus tard, «El Chapo» est accusé d'avoir dirigé pendant 25 ans le cartel de Sinaloa, l'un des plus puissants que le continent américain ait jamais connu.

Les États-Unis estiment à quelque 14 milliards de dollars les revenus que Guzman aurait ainsi dégagés, et avaient indiqué lors de son extradition espérer «récupérer au moins une partie» de ce butin. Un responsable mexicain indiquait cependant en mai dernier que les États-Unis n'arrivaient pas à retrouver son argent, qui contournait les circuits financiers traditionnels.

En raison de ses précédentes évasions, «El Chapo» est détenu dans des conditions particulièrement strictes à Manhattan, avec des visites et des contacts téléphoniques très limités, des conditions que ses avocats n'ont cessé de dénoncer.

Jeudi encore, M. Balarezo a affirmé que son client souffrait «constamment de maux de tête et vomit presque tous les jours».

Dans sa cellule de la prison de fédérale de Manhattan où il est détenu, «il fait soit très froid, soit très chaud, il ne peut pas dormir, il ne peut pas se concentrer ou aider à sa défense dans ces conditions».

La sélection des jurés doit démarrer le 5 septembre, avant l'ouverture du procès qui pourrait durer «trois à quatre mois», selon l'avocat.

AP

Joaquin Guzman escorté par des soldats mexicains à Mexico, en janvier 2016.