La majorité républicaine du Sénat américain était en train de réécrire précipitamment son projet de réforme de la fiscalité jeudi soir, reportant à vendredi la suite des débats et des votes sur cette grande promesse de campagne du président Donald Trump.

Le chef de la majorité, Mitch McConnell, a annoncé que les débats se poursuivaient, mais qu'aucun vote sur des amendements n'aurait plus lieu jeudi soir, contrairement à ce qui était initialement prévu. Les sénateurs ont été priés de revenir vendredi à 11 h.

La cause du problème est la disqualification technique, par un office parlementaire, d'un article qui se trouvait en contravention avec la procédure budgétaire spéciale utilisée par la majorité. Cet article visait à remonter automatiquement les taux des impôts dans plusieurs années en cas de déficit public plus grand que prévu.

Les sénateurs sont donc repartis négocier en coulisses pour trouver un compromis satisfaisant pour les membres inquiets d'un creusement du déficit public.

S'ils en trouvaient un, il pourraient adopter dès vendredi la baisse d'impôt, ce qui représenterait une grande victoire politique pour Donald Trump.

La majorité républicaine est relativement soudée sur l'architecture de la réforme: une forte baisse d'impôts pour les entreprises et pour les particuliers, ainsi qu'une grande simplification fiscale qui permettrait aux Américains de remplir leur déclaration d'impôts sur une «carte postale», alors qu'aujourd'hui des millions de contribuables utilisent des logiciels payants ou des comptables pour remplir leurs feuilles d'impôts.

Le but affiché: soulager la classe moyenne et doper la croissance.

Jeudi matin, l'optimisme dominait. John McCain, l'un des trois sénateurs qui avait coulé l'abrogation de la loi santé de Barack Obama cet été, a annoncé qu'il voterait «oui», et plusieurs sénateurs promettaient que le vote final serait positif.

Mais il y a 52 républicains sur 100 sièges, et la majorité n'a donc droit qu'à deux défections, tous les démocrates étant opposés.

Déficit public

Certains conservateurs, emmenés par Bob Corker et Jeff Flake, s'inquiètent de voir leur parti fouler aux pieds l'orthodoxie budgétaire qu'il a longtemps prêchée lorsque Barack Obama occupait la Maison-Blanche.

La réforme ajoutera en effet 1000 milliards de dollars aux déficits publics sur la prochaine décennie, selon une nouvelle analyse publiée jeudi par le Joint Committee on Taxation.

Ces experts estiment que la baisse d'impôts coûtera 1400 milliards de dollars aux comptes publics entre 2018 et 2027, qui seront partiellement compensés par environ 400 milliards de recettes fiscales générées par un regain de croissance du PIB estimé à 0,8 points par an en moyenne sur la décennie.

D'autres républicains transigent sur tel ou tel article: le taux d'imposition des sociétés en nom propre, les avantages fiscaux pour les familles avec enfants, ou encore la suppression, glissée dans le plan, de l'obligation de souscrire une assurance maladie, qui est l'un des piliers d'«Obamacare». Même le taux final de l'impôt sur les sociétés pourrait être de 21 ou 22%, au lieu des 20% réclamés par Donald Trump (actuellement, ce taux est de 35%).

Enfin, l'inclusion d'une mesure qui ouvrirait des terres protégées de l'Alaska aux forages pétroliers est contestée par de nombreux démocrates et pourrait être rejetée pour des raisons techniques.

Mais pour le milliardaire, les républicains n'ont pas le droit à l'échec: «Les républicains ont le Sénat, les républicains ont la Chambre, les républicains ont la Maison-Blanche. C'est très inhabituel. Nous devons saisir cette chance pour libérer notre économie», a-t-il déclaré mercredi.

Si la réforme est adoptée par les sénateurs, il faudra harmoniser leur projet avec celui adopté le 16 novembre par la Chambre des représentants. Les deux chambres sont dominées par les républicains, mais leurs plans diffèrent sur certains détails.

L'opposition démocrate, unie contre le projet, argumentera de son côté que la voiture est trop chère et ne profitera qu'aux riches. Des analyses montrent que tous les niveaux de revenus gagneront en pouvoir d'achat, mais que les 5% de ménages les plus aisés profiteront relativement plus de la refonte.