L'homme qui a foncé mardi sur des piétons et cyclistes à New York était un Ouzbek qui planifiait depuis des semaines, «au nom de l'État islamique», cet attentat, le plus meurtrier commis à New York depuis 2001, a indiqué mercredi la police new-yorkaise.

Le suspect, Sayfullo Saipov, arrivé aux États-Unis en 2010, «planifiait cela depuis des semaines», a déclaré John Miller, adjoint au chef de la police new-yorkaise en charge de la lutte contre le terrorisme, lors d'une conférence de presse avec le maire de la ville et le gouverneur de l'État.

«Il l'a fait au nom de l'EI» et «des notes manuscrites en arabe» mentionnant l'EI, dont il semble «avoir suivi» les instructions, ont été retrouvées sur les lieux de l'attaque, dans le sud-ouest de Manhattan, a précisé M. Miller.

La police a précisé qu'elle avait pu interroger sur son lit d'hôpital le suspect de 29 ans, blessé au ventre par un policier, sans donner de détails. Elle n'a pas confirmé qu'il avait été opéré mardi soir, comme l'ont rapporté plusieurs médias américains.

Les policiers tentent maintenant de reconstituer précisément l'itinéraire de ce résident de Paterson, à 60 km de New York dans le New Jersey, marié et père de plusieurs enfants.

S'il était connu pour des infractions au code de la route, Sayfullo Saipov n'avait jusqu'ici «jamais fait l'objet d'une enquête» du FBI ou des services anti-terroristes de la police, a indiqué M. Miller.

Selon la police, il a loué la camionnette à Passaic, dans le New Jersey, juste après 14h00, ralliant rapidement Manhattan avant de foncer peu avant 15 heures sur la promenade qui longe la Hudson River, où se pressaient beaucoup de promeneurs et de cyclistes pour Halloween.

Le marathon maintenu

Saipov, dont plusieurs médias ont rapporté qu'il fréquentait régulièrement la mosquée de Paterson, «s'est radicalisé» aux États-Unis, a souligné le gouverneur démocrate de l'État de New York, Andrew Cuomo, en le qualifiant de «lâche perverti».

«Tous les éléments dont nous disposons indiquent que nous avons un modèle de loup solitaire», a souligné le gouverneur, alors que le maire Bill de Blasio soulignait qu'il n'y avait selon les enquêteurs «aucune autre menace» planant sur New York.

Les mesures de sécurité ont néanmoins été considérablement renforcées, avec une police plus visible que d'habitude dans cette ville pourtant déjà très surveillée.

La police a indiqué avoir doublé ses effectifs déployés dans les lieux stratégiques, les gares et les aéroports, en prévision notamment du marathon de New York dimanche, qui attire chaque année plus de 50 000 coureurs et quelque 2,5 millions de spectateurs.

«Nous allons de l'avant et attendons avec impatience le marathon de dimanche», a déclaré le maire, qui joue sa réélection mardi prochain. «Il se déroulera comme prévu (...) Il sera protégé, comme il l'est toujours, et nous allons prendre des mesures de sécurité supplémentaires», a-t-il ajouté, en se félicitant que le traditionnel défilé de Halloween mardi soir ait lui aussi été maintenu et attiré «un million de participants» malgré l'attentat.

Les responsables ont mis en garde contre toute stigmatisation de la communauté musulmane et le gouverneur a vivement critiqué les tweets du président Donald Trump mardi soir.

«Ils n'ont vraiment pas aidé, et je pense qu'ils n'étaient pas exacts», a déclaré le gouverneur, opposant notoire du président républicain. «On fait le jeu des terroristes en divisant et en effrayant les gens», a-t-il ajouté.

Le président américain a appelé dès mardi soir à renforcer les contrôles des personnes souhaitant entrer aux États-Unis, invoquant la nécessité d'empêcher «l'EI de revenir ou d'entrer dans notre pays».

Fin de la loterie ?

Mercredi, il a aussi appelé à supprimer le système de loterie qui permet à certains étrangers d'obtenir un titre de séjour permanent, et a évoqué la possibilité d'envoyer le suspect à Guantanamo, la prison pour jihadistes présumés à la sinistre réputation que le président Barack Obama avait échoué à fermer.

La police a confirmé que sur les huit personnes qui ont péri, six étaient des étrangers - cinq Argentins et un Belge - et deux des Américains. La Belge était originaire de Roulers, selon Bruxelles, et les Argentins étaient d'anciens camarades d'école qui fêtaient le 30e anniversaire de leur diplôme, originaires de la ville de Rosario.

Douze personnes ont été blessés, selon les pompiers: neuf étaient toujours hospitalisées mercredi matin, dont quatre dans un état «critique mais stable», ont-ils précisé.

De Moscou à Londres en passant par Paris et Berlin, plusieurs pays ont dénoncé l'attentat et exprimé leur solidarité avec les États-Unis dans le combat contre le terrorisme.

Dans le quartier de TriBeCa où s'est déroulée l'attaque et où se trouvent de nombreuses écoles, plusieurs pâtés de maison étaient toujours bouclés et beaucoup de gens étaient encore sous le choc mercredi matin.

Après que l'attentat eut gâché pour nombre d'enfants la fête d'Halloween, beaucoup de parents avaient choisi de garder leurs enfants à la maison.

«Plusieurs de mes amis ne viennent pas aujourd'hui. Mon père m'a juste dit: «Fais attention à toi». C'était clair qu'il était inquiet», a indiqué Lucca Arnella, au prestigieux lycée Stuyvesant, tout proche du lieu de l'attentat.

«J'ai peur», a expliqué Megan Brostermann, en déposant malgré tout à l'école ses deux enfants de quatre et six ans. «C'est arrivé partout ailleurs et maintenant ça se passe ici aussi. Je redoute ça depuis (les attentats de) Londres. Ça réveille des souvenirs du 11-Septembre, mais je ne peux pas changer ma routine à cause de ça».

La bourse de New York a aussi observé une minute de silence en hommage aux victimes.

AP

Parmi les 11 blessés hospitalisés mardi, on comptait aussi plusieurs étrangers, témoin des centaines de milliers de touristes qu'attire New York: trois Belges et une Allemande, selon Bruxelles et Berlin.

REUTERS

Des enquêteurs arpentent mercredi matin la piste cyclable où le drame a eu lieu.

Les principales attaques liées à la mouvance islamiste aux États-Unis

Le système d'attribution à la loterie des cartes vertes donnant droit à s'installer aux États-Unis était mercredi au coeur d'une vive polémique, l'auteur de l'attentat meurtrier à New York en ayant bénéficié selon le président Donald Trump.

«Le terroriste est entré dans notre pays grâce au Programme de loterie de visas de diversité, une merveille de Chuck Schumer», a ironisé dans un tweet le président républicain, en ciblant le chef de l'opposition démocrate au Sénat.

Les responsables de l'enquête n'ont pas confirmé que l'homme d'origine ouzbèke qui a tué huit personnes mardi, en percutant avec une camionnette cyclistes et piétons à Manhattan, avait obtenu un permis de résident permanent par ce dispositif de tirage au sort.

Mais les républicains ont sans attendre exploité l'événement pour dénoncer une mesure en vigueur depuis une vingtaine d'années et qui est depuis longtemps dans leur ligne de mire.

«Nous luttons avec force en faveur d'une immigration basée sur le mérite, (nous ne voulons) plus de systèmes démocrates à la loterie. Nous devons être BIEN PLUS fermes (et plus malins)», a écrit M. Trump dans un autre tweet.

Le président Trump a également cité un officier américain à la retraite qui a déclaré sur Fox News que Chuck Schumer favorisait «l'importation de problèmes européens» en Amérique.

«J'ai toujours cru et je continue à croire que l'immigration est une bonne chose pour l'Amérique», a réagi dans un communiqué mercredi M. Schumer.

«Le président Trump, plutôt que de politiser et de diviser les États-Unis, ce qu'il semble toujours faire en des temps de tragédie nationale, devrait se concentrer sur la solution effective --le financement antiterroriste-- qu'il a proposé de réduire dans son dernier budget», a ajouté le ténor démocrate.

Le système d'attribution à la loterie des cartes vertes offre une chance aléatoire à 50 000 candidats par an de pouvoir vivre aux États-Unis.

Le système favorise les pays avec un taux d'émigration en Amérique relativement bas sur les cinq années précédentes. Une grosse moitié de ces visas sont attribués à l'Afrique.