Le président américain Donald Trump a intensifié ce week-end ses attaques contre son prédécesseur Barack Obama, à qui il reproche de n'avoir «rien» fait contre l'ingérence russe, tandis que la gestion de cette affaire par l'ancien président démocrate suscitait quelques critiques dans son propre camp.

«C'est un truc incroyable. Et s'il avait l'information, pourquoi n'ont-ils rien fait? Il aurait dû faire quelque chose», a déclaré M. Trump dans une interview à l'émission Fox and Friends, réalisée vendredi et diffusée dimanche.

Selon le Washington Post de vendredi, la CIA, la centrale américaine de renseignement, avait averti Barack Obama dès août 2016 que des piratages du parti démocrate avaient été ordonnés par le président russe Vladimir Poutine dans le but de nuire à la démocrate Hillary Clinton et d'aider Donald Trump pour la présidentielle du 8 novembre.

En octobre, toutes les agences du renseignement américain faisaient état publiquement d'une ingérence de Moscou. En janvier, elles précisaient que Poutine en était le cerveau.

Le 29 décembre, M. Obama avait annoncé des sanctions contre la Russie, expulsant notamment 35 diplomates considérés comme des agents russes.

Du bout des lèvres

Le dirigeant républicain, dont la présidence est empoisonnée par cette affaire, a multiplié depuis vendredi les tweets contre l'administration Obama, suggérant qu'elle n'avait pas agi, car elle «ne voulait pas nuire à Hillary» Clinton.

«Puisqu'on a dit bien avant l'élection de 2016 à l'administration Obama que les Russes interféraient, pourquoi aucune mesure n'a été prise? Concentrez-vous sur eux, pas sur T» (Trump), s'est-il indigné dans un autre tweet samedi.

Les reproches de Donald Trump à l'égard du président Obama sont surprenants, car le magnat de l'immobilier avait lui-même admis du bout des lèvres que Moscou avait pu participer à des piratages du parti démocrate.

Le président américain n'a jamais repris véritablement à son compte les conclusions de ses agences de renseignement selon lesquelles la Russie a interféré dans la présidentielle américaine par des piratages informatiques et une campagne de désinformation.

Il s'en était même pris violemment à ses services en les accusant de vouloir le discréditer, expliquant en décembre qu'il les écouterait quand il en aurait «besoin».

Interrogé encore mardi sur cette ingérence, le porte-parole de la Maison-Blanche Sean Spicer a éludé et répondu «ne pas avoir parlé» de ce dossier avec le président.

Donald Trump nie surtout que la Russie ait pu avoir un quelconque impact sur les résultats de l'élection, les machines et les systèmes électoraux eux-mêmes n'ayant pas été piratés.

Il dément aussi systématiquement toute «collusion» entre des membres de son équipe de campagne et le renseignement russe, à propos de laquelle le procureur spécial Robert Mueller enquête actuellement.

Rôle d'Obama en question

Reste que le rôle de Barack Obama sur ce dossier suscitait dimanche des interrogations, y compris dans son propre camp.

Adam Schiff, chef de file des démocrates à la commission du Renseignement de la chambre des Représentants, lui a reproché de n'avoir pas agi plus tôt contre Moscou.

«Compte tenu de la gravité de cela, l'administration aurait dû intervenir plus tôt contre la Russie, dissuader et sanctionner la Russie plus tôt, car c'est une erreur grave», a-t-il déclaré sur CNN.

Le sénateur démocrate Ron Wyden s'était dit déçu vendredi sur CNN que l'administration Obama ne se soit pas montrée plus agressive.

«Je suis perturbé par ces nouvelles informations selon lesquelles l'administration Obama n'en a pas fait beaucoup».

Le chef de file des démocrates au Sénat Chuck Schumer a lui défendu l'ancien président.

«Il faut savoir si Donald Trump veut faire quelque chose sur la Russie et l'ingérence russe. Au lieu de dire qu'Obama n'en a pas fait assez, soutenez notre loi de sanctions», a-t-il lancé à l'adresse de Trump.

Barack Obama avait reconnu début janvier avoir «sous-estimé» l'impact de ces interférences sur les démocraties.

«Je pense avoir sous-estimé la manière dont, dans cette nouvelle ère d'information, il est possible que la désinformation, les attaques informatiques et ce genre de choses aient un impact sur nos sociétés ouvertes», avait-il déclaré sur ABC.