Jusqu'où peut-on être responsable de la mort de quelqu'un qu'on a encouragé à se suicider? C'est la question qui se pose près de Boston, dans le nord-est des États-Unis, où une jeune femme est jugée pour avoir, par textos, poussé son petit ami au suicide.

Michelle Carter, 20 ans aujourd'hui et 17 à l'époque des faits, le 12 juillet 2014, est en procès depuis mardi pour homicide involontaire, devant le tribunal pour enfants de Taunton, à 60 kilomètres au sud de Boston.

Son petit ami, Conrad Roy, 18 ans à l'époque, avait été retrouvé mort dans son camion, garé dans le stationnement d'un supermarché près d'une pompe à eau qu'il a utilisée pour remplir son véhicule de monoxyde de carbone.

L'assistante du procureur, Maryclare Flynn, a, dès l'ouverture du procès retransmise sur YouTube, cité une série de textos envoyés par Carter à Roy, l'enjoignant à passer à l'acte.

«C'est maintenant ou jamais», écrivait-elle notamment au jeune homme.

Alors qu'il sortait de son camion, pris de doutes, le jeune homme lui a parlé longuement au téléphone et «elle lui a dit de revenir dans la voiture: elle s'est comportée de façon vicieuse et dangereuse», a affirmé Mme Flynn, soulignant que Carter l'avait aussi conseillé sur les meilleures méthodes de suicide et encouragé à cacher ses projets à ses parents.

Mais l'avocat de la défense, Joseph Cataldo, a fait valoir que Roy, qui venait de finir son lycée et avait une bourse pour l'université, avait des idées suicidaires depuis des années, évoquant un séjour en hôpital psychiatrique.

«Il était suicidaire, et voulait se donner la mort, c'était son choix», a-t-il affirmé.

Il a souligné l'influence limitée qu'avait sur lui la jeune fille: les deux adolescents, qui s'étaient rencontrés en 2012, ne s'étaient vus ensuite «que deux ou trois fois», entretenant essentiellement «une relation par textos».

L'avocat a également affirmé que Carter avait plusieurs fois, pendant les mois qu'a duré leur relation, «essayé de le dissuader de se donner la mort», prévenant notamment sa soeur qu'il voulait se tuer.

Pour compliquer les choses, l'État du Massachusetts n'a pas, contrairement à d'autres États américains, de loi pénalisant l'encouragement au suicide.

Le procès pourrait durer deux semaines. Michelle Carter a renoncé à un procès avec jury, laissant le soin au juge, Lawrence Moniz, de trancher.

Elle encourt jusqu'à 20 ans de prison en cas de condamnation. On ignore encore si elle pourrait témoigner et s'exposer à un contre-interrogatoire toujours risqué.