Rompant avec l'une de ses promesses de campagne, Donald Trump a renoncé jeudi à déménager pour l'instant l'ambassade des États-Unis en Israël de Tel-Aviv à Jérusalem, le président invoquant l'espoir d'un accord de paix avec les Palestiniens.

Sans surprise, ces derniers se sont dits satisfaits et Israël «déçu».

Donald Trump, qui s'était maintes fois engagé à déplacer la chancellerie américaine dans la Ville sainte, a finalement repoussé sa décision d'au moins six mois, a annoncé la Maison-Blanche, quelques heures avant une échéance juridique.

En effet, une loi du Congrès adoptée en 1995 (Jerusalem Embassy Act) stipule que la représentation diplomatique de Washington dans l'État hébreu doit se trouver à Jérusalem, reconnaissant ainsi de facto cette ville comme la capitale d'Israël.

Mais depuis deux décennies, une clause dérogatoire à cette loi permet à l'exécutif américain de bloquer son application et tous les présidents américains successifs ont depuis la fin des années 1990 signé tous les six mois cette clause.

Cela a permis à Washington, comme la plupart des autres pays, de maintenir son ambassade à Tel-Aviv.

La dernière fois que la clause fut activée, ce fut en décembre par le président démocrate Barack Obama, un mois avant de céder le bail de la Maison-Blanche au républicain Donald Trump.

L'échéance pour M. Trump tombait ce jeudi, une minute avant minuit.

Alors que le nouveau locataire de la Maison-Blanche s'était montré ces dernières semaines beaucoup plus flou sur ses intentions, des experts et des diplomates tablaient cette semaine sur le fait qu'il allait signer la clause dérogatoire.

Mais la Maison-Blanche s'est défendue de tout renoncement.

«Bien que le président Donald Trump ait signé une dérogation au Jerusalem Embassy Act et repoussé le déménagement de l'ambassade (...), personne ne devrait considérer que cette mesure marque un retrait dans l'appui solide du président à Israël et à l'alliance» entre les deux pays.

«Intention de déménager»

En outre, la présidence a martelé que M. Trump avait bien «l'intention de déménager l'ambassade» et que «la question n'(était) pas de savoir si cela se produira, mais seulement quand».

Reste que l'imprévisible milliardaire septuagénaire et son administration avaient envoyé récemment des signaux indiquant qu'ils renonceraient provisoirement à une décision aux conséquences géopolitiques lourdes.

D'abord, Donald Trump s'était bien gardé d'aborder le sujet lors de son voyage en Israël et en Cisjordanie la semaine dernière.

Ensuite, son nouvel ambassadeur dans l'État hébreu, l'avocat américain juif David Friedman, chaud partisan du déménagement de la chancellerie et de la colonisation israélienne, s'était montré moins catégorique lors de son audition de confirmation devant le Sénat en février.

Les Palestiniens, des dirigeants arabes et même l'ancien secrétaire d'État américain John Kerry avaient plusieurs fois mis en garde contre le risque d'une explosion de violences entre Palestiniens et Israéliens en cas de déplacement de l'ambassade.

L'argument a semble-t-il été entendu au moment où le nouveau président entend relancer le processus de paix israélo-palestinien, au point mort complet depuis le printemps 2014.

Alors que tous ses prédécesseurs se sont cassé les dents sur le dossier, «le président Trump a pris cette décision pour maximiser les chances de négocier avec succès un accord entre Israël et les Palestiniens», a argumenté la Maison-Blanche.

Israël «déçu»

Dans un communiqué du bureau du premier ministre Nétanyahou, l'État hébreu s'est déclaré «déçu» mais a relevé «l'expression de l'amitié du président Trump envers Israël et son engagement à déménager l'ambassade à l'avenir». Même «déception» pour le lobby américain pro-israélien classé à droite, l'AIPAC (American Israel Public Affairs Committee).

En revanche, le porte-parole de la présidence palestinienne s'est félicité d'une décision qui «renforce les chances de parvenir à la paix». L'organisation juive américaine de gauche J Street a aussi salué le fait que Donald Trump «a décidé de poursuivre la politique prudente de ses prédécesseurs».

Garder l'ambassade des États-Unis à Tel-Aviv est une «sage décision», a estimé le porte-parole de l'ONU Stephane Dujarric, en rappelant que le statut de Jérusalem «ne peut être résolu que par un règlement politique négocié» du conflit.

La communauté internationale n'a jamais reconnu Jérusalem comme capitale d'Israël ni l'annexion de sa partie orientale conquise en 1967, si bien que les ambassades étrangères sont installées à Tel-Aviv. Si Israël considère la Ville sainte comme sa capitale «éternelle et réunifiée», les Palestiniens estiment au contraire que Jérusalem-Est doit être la capitale de l'État auquel ils aspirent.