Avant d'entrer à la Maison-Blanche, Donald Trump avait exprimé son admiration pour Vladimir Poutine et prôné un rapprochement. Mais depuis qu'il est président, son administration est aussi ferme envers la Russie que l'équipe de Barack Obama.

Deux mois après son arrivée au pouvoir, le président américain flatte un peu moins son homologue russe, dans un climat politique alourdi à Washington par des enquêtes officielles sur des collusions possibles entre la galaxie Trump et des responsables russes pendant la campagne présidentielle américaine de 2016.

Dans ce contexte, les deux plus importants ministres américains - le chef de la diplomatie Rex Tillerson et le patron du Pentagone James Mattis -, en tournée en Europe vendredi, ont eu des mots très durs contre Moscou, tant sur le conflit en Ukraine que sur d'éventuelles ingérences de Moscou dans les élections aux États-Unis et en Europe.

Une ligne de fermeté de l'administration Trump face à Moscou, dans la continuité de celle d'Obama.

«Agression russe»

Ancien PDG d'ExxonMobil et à ce titre proche de Vladimir Poutine, successeur de John Kerry, le nouveau secrétaire d'État Tillerson, qui faisait ses premiers pas vendredi à l'OTAN, a ainsi dénoncé «l'agression il y a trois ans de l'Ukraine par la Russie qui a ébranlé les fondements de la sécurité et de la stabilité en Europe».

Il s'est engagé à ce que les sanctions prises par Barack Obama «restent en vigueur» tant que Moscou ne respectera pas les accords de paix de Minsk (2015) pour l'est de l'Ukraine et ne rétrocèdera pas la Crimée «occupée» à Kiev.

Reprenant ce que martelait la diplomatie Obama-Kerry, Rex Tillerson a promis que «le soutien de l'Amérique et de l'OTAN à l'Ukraine resterait ferme» et que les États-Unis «n'accepteraient pas que la Russie tente de modifier les frontières» ukrainiennes.

Dans une déclaration quasiment identique en mars 2016 à Moscou après une rencontre avec M. Poutine, M. Kerry avait averti que «les États-Unis étaient fermement attachés à la protection de la souveraineté et de l'intégrité territoriale de l'Ukraine, dont la Crimée».

Vendredi, lors d'un déjeuner à huis clos à l'OTAN, M. Tillerson aurait été «ovationné debout» pour avoir «déclaré que la Russie n'était plus digne de confiance», a vanté un responsable du département d'État.

Moscou a dénoncé le «mythe de "la menace russe"».

«Farfouiller dans les élections»

Le secrétaire à la Défense Mattis n'a pas non plus mâché ses mots.

En visite à Londres, il a accusé Moscou de «violations du droit international en Crimée» et de «farfouiller dans les élections d'autres» pays.

De fait, dans une atmosphère lourde à Washington, des commissions du Congrès et le FBI enquêtent sur une éventuelle ingérence russe dans la campagne présidentielle de 2016. Le FBI tente d'établir une possible «coordination» entre le camp Trump et des responsables russes.

Le milliardaire américain et le Kremlin ont plusieurs fois démenti. Mais Donald Trump a souvent loué Vladimir Poutine et milité pour un rapprochement américano-russe après les tensions de l'ère Obama et la Guerre froide.

Le 30 décembre, élu, mais pas encore investi, il avait salué dans un tweet l'«intelligence» du président russe pour ne pas avoir riposté aux dernières sanctions prises par l'administration Obama.

En 2013, alors que l'homme d'affaires organisait à Moscou son concours de beauté Miss Univers, il espérait sur Twitter que «Poutine vienne et devienne (son) meilleur ami».

Mais depuis qu'il est à la Maison-Blanche, le président a mis en sourdine ses éloges de son homologue russe. Le 5 février, sur la chaîne conservatrice FoxNews, Donald Trump avait dit «respecter» M. Poutine. Mais, ajoutait-il, «Ça ne veut pas dire que je vais m'entendre avec lui».

«Grande continuité»

Au même moment, début février, des violences en Ukraine avaient poussé la nouvelle administration américaine à promettre le maintien des sanctions antirusses.

«La ligne dure de Tillerson et de Mattis traduit une grande continuité» entre les administrations Obama et Trump, notamment sur les sanctions contre Moscou, explique Jeffrey Rathke, ex-porte-parole du département d'État sous John Kerry.

Pour cet expert du Center for Strategic and International Studies (CSIS), la politique étrangère des États-Unis aura «extrêmement de mal à changer de trajectoire sur la Russie», en raison «des enquêtes à Washington sur l'implication russe dans l'élection et avec la campagne de Trump».