Les chefs républicains de la Maison-Blanche et du Congrès se préparent à dévoiler leur projet d'abrogation et de remplacement de la réforme de l'assurance maladie Obamacare, un engagement de campagne de Donald Trump qui se révèle compliqué à appliquer.

L'aile conservatrice du parti, majoritaire au Congrès, a donné de la voix ces dernières semaines pour s'opposer à un premier brouillon considéré comme trop laxiste avec les finances publiques. Et le texte préparé reste à ce jour un mystère.

« Le cauchemar Obamacare est bientôt fini », a déclaré vendredi le vice-président Mike Pence, en déplacement dans le Wisconsin avec Paul Ryan, le président de la Chambre des représentants, et homme clé du dispositif républicain.

« Nous mettons les dernières touches à notre plan ce week-end », a-t-il dit.

Le président américain, lors d'un discours au Congrès mardi dernier, a fixé le cadre et promis d'« abroger et remplacer » Obamacare, qualifiée de « désastre ».

Il souhaite mettre fin à l'obligation individuelle de souscrire une couverture-maladie, la clé de voûte de la réforme de 2010, qui permettait théoriquement d'attirer dans le système les Américains jeunes et en bonne santé afin de compenser le coût des patients les plus âgés.

La philosophie de la réforme républicaine est de libéraliser et décloisonner le plus possible le marché privé de l'assurance maladie, en limitant le coût pour le budget fédéral.

Mais Donald Trump s'est engagé à conserver un acquis d'Obamacare très populaire : l'interdiction pour les assureurs de discriminer les patients en fonction de leurs antécédents médicaux.

Plus troublant, pour la droite du parti, il a endossé l'idée de Paul Ryan d'aider les Américains à payer leur assurance via des crédits d'impôt. À ces mots, plusieurs sénateurs républicains sont restés les bras croisés mardi soir.

« On ne peut pas reprendre des idées démocrates et mettre une étiquette républicaine dessus », s'est offusqué le sénateur libertarien Rand Paul.

Obamacare populaire

De l'autre côté, des gouverneurs républicains s'inquiètent d'une baisse des aides fédérales pour financer le programme Medicaid, créé dans les années 60 et destiné aux ménages les plus modestes. L'État fédéral assume aujourd'hui une portion importante des coûts du programme, le reste étant à la charge des États.

Chambouler le marché de la santé est un chantier titanesque, aux conséquences imprévues, comme Barack Obama s'en est aperçu.

Sa réforme visait principalement les travailleurs indépendants dont les employeurs ne fournissaient pas de couverture-maladie; or ce marché individuel s'est avéré moins rentable que prévu, et beaucoup d'assureurs s'en sont retirés, provoquant une forte hausse des prix pour les patients.

Mais bon an mal an, la réforme Obamacare, votée en 2010 par les démocrates sans une voix républicaine, a permis de couvrir plus de 20 millions d'Américains supplémentaires. Beaucoup d'entre eux sont des électeurs républicains. D'où le dilemme de certains élus par rapport à leurs électeurs.

Donald Trump s'est d'ailleurs engagé à « une transition stable ».

Les chefs républicains pourraient décider de passer en force en appelant à la discipline de parti, sachant qu'aucun texte ne fera l'unanimité.

Mais rien n'indique que tous les républicains accepteront de plier.

D'ores et déjà, le clan des conservateurs, comme Rand Paul ou encore le sénateur du Texas Ted Cruz, ont appelé au vote d'une version plus dure de l'abrogation d'Obamacare, adoptée en 2015 et contre laquelle Barack Obama avait mis son veto.

La minorité démocrate observe les dissensions républicaines avec délectation et sait que ses voix seront sans doute nécessaires dans un éventuel compromis.

« Ils n'ont pas les voix », a assuré vendredi Nancy Pelosi, chef des démocrates de la Chambre.

Autre avantage pour l'opposition : la relative popularité d'Obamacare dans le pays. Selon le sondage de la Kaiser Family Foundation, 48 % des Américains ont une opinion favorable de la loi, contre 42 % de défavorable. C'est la plus haute cote depuis 2010.