Rex Tillerson, nommé mardi par Donald Trump pour diriger la diplomatie américaine, a fait toute sa carrière au sein du géant pétrolier ExxonMobil, dont il est PDG depuis 2006.

Pour Tyson Slocum, directeur du programme énergie de l'organisation proche de la gauche Public Citizen à Washington, il sera quasiment impossible au patron de couper ses liens historiques avec ExxonMobil lorsqu'il sera au gouvernement et d'éviter des conflits d'intérêts avec la multinationale, présente dans une cinquantaine de pays, dont la Russie.

Quels conflits d'intérêts peuvent naître de sa carrière de patron pétrolier ?

Tyson Slocum : « Le problème, ce n'est pas seulement qu'il ait des actions Exxon. Le problème est que Tillerson n'a eu qu'un seul employeur dans sa vie, Exxon, où il a passé plus de 40 ans. »

« Le secteur des industries extractives est unique, car il faut souvent nouer des liens personnels et politiques proches avec des gouvernements douteux afin d'accéder aux ressources naturelles de ces pays. Tillerson a été très offensif pour établir des relations dans des pays souvent en opposition directe avec les intérêts américains. »

« Être un PDG n'est pas en soi disqualifiant pour entrer au gouvernement (...) Mais Exxon fonctionne de facto comme un fief indépendant et négocie directement avec des États. »

Quel est le risque pour les intérêts américains ?

Tyson Slocum : « Prenez la Russie... il s'est rendu au moins 20 fois à la Maison-Blanche pour parler des sanctions. Il a dit publiquement que les sanctions n'étaient pas un outil efficace, car de son point de vue de dirigeant d'entreprise, les sanctions restreignent les opportunités économiques ».

« Ce n'est pas seulement la Russie, cela concerne aussi l'Iran, ou tout type de dictature en Afrique ou en Asie. Quel sera le rôle de Tillerson ? »

Peut-il couper tous ses liens financiers avec ExxonMobil pour réduire ses conflits d'intérêts ?

Tyson Slocum : « Il doit toute sa fortune à Exxon, comment peut-il s'en dissocier financièrement ? (...) Il ne peut pas mettre ses actions dans une fiducie sans droit de regard («blind trust»), car il saura où se trouve son argent ».

« Quand il démissionnera, il aura aussi un parachute doré et une retraite. Il ne peut pas en faire abstraction ».

« Même s'il parvenait à être complètement désinvesti financièrement, il restera trop de conflits d'intérêts, car ses responsabilités à Exxon lui ont fait tisser trop de relations internationales en conflit avec les intérêts américains. Quand il voyagera dans le monde comme secrétaire d'État, il soulèvera des questions quant aux intérêts réels qu'il défendra ».