L'appel téléphonique entre Donald Trump et la présidente taïwanaise était totalement censuré samedi dans les médias d'État chinois, qui préféraient souligner la visite à Pékin de l'ex-secrétaire d'État américain Henry Kissinger, un «vieil ami de la Chine» qui a récemment prodigué ses conseils à M. Trump.

L'échange téléphonique, vendredi, entre le président élu des États-Unis et la présidente de Taïwan Tsai Ing-wen -- rupture spectaculaire avec 40 ans de diplomatie américaine--, n'était pas évoqué samedi matin sur les sites internet des médias d'État chinois et soigneusement censuré sur internet.

Sur la plateforme de microblogues Weibo, quelques commentaires d'internautes subsistaient cependant sous l'article d'un média hongkongais ayant échappé aux ciseaux de la censure.

«Notre «Dada» (surnom donné au président chinois Xi Jinping) ne sert à rien ! Les États-Unis peuvent avoir l'audace d'accepter l'indépendance de Taïwan, et nous, nous n'osons même pas réunifier le pays par la force!», s'indignait un usager de Weibo.

«Quelle «Chine» reconnaît Trump ? Quel fourbe ! On devrait arrêter ce «président businessman»!», abondait un autre.

Washington soutient la politique de la «Chine unique», qui l'a vu reconnaître Pékin et rompre à la fin des années 1970 ses relations diplomatiques avec Taïwan. L'île est un pays de facto indépendant de la Chine communiste, mais Pékin la considère toujours comme faisant partie de son territoire.

À l'inverse, les médias officiels chinois consacraient samedi manchettes et une à l'entretien vendredi entre Xi Jinping et l'ancien diplomate américain Henry Kissinger, 93 ans.

Ce dernier avait été l'artisan en 1972 de la visite historique du président américain Nixon en Chine populaire. M. Kissinger est immanquablement qualifié depuis par le régime communiste de «vieil ami de la Chine».

«Dr. Kissinger, votre visite tombe à pic ! Nous sommes impatients de connaître vos vues sur l'évolution des relations sino-américaines (...) C'est une période de transition», a déclaré M. Xi, selon la presse d'État.

Des propos qui reflètent l'anxiété du géant asiatique face au flou persistant qui entoure les orientations diplomatiques du président élu.

L'ironie veut que M. Kissinger a rencontré Donald Trump à plusieurs reprises à New York au cours des dernières semaines, pour discuter notamment de la Chine. «J'apprécie mes échanges de vue avec lui», avait commenté le bouillonnant milliardaire.

Le fait que Donald Trump ait appelé Mme Tsai par son titre de «présidente», dans sa déclaration de vendredi, était également très commenté par les quelques posts d'internautes chinois sur le sujet.

Les médias de Chine populaire n'attribuent jamais à Tsai Ing-wen le qualificatif de «président» (ce qui serait reconnaître un gouvernement indépendant), mais simplement la formule plus vague de «dirigeante de Taïwan».