Après avoir menacé d'intenter des poursuites judiciaires, le Chicago Tribune a finalement obtenu les données du service de police de la ville qui recensent tous les cas où un policier a ouvert le feu au cours des six dernières années. La grande majorité des personnes atteintes étaient des hommes ou des garçons noirs.

Il y a eu 435 incidents impliquant des tirs de la police de 2010 à 2015, dans lesquels des policiers ont tué 92 personnes et en ont blessé 170 autres. Au total, les policiers ont tiré 2623 balles.

Le quotidien a calculé que quatre fois sur cinq, la personne atteinte était un homme afro-américain. Environ la moitié des policiers impliqués étaient afro-américains ou hispaniques, et la plupart d'entre eux comptaient plusieurs années d'expérience et n'étaient pas des débutants.

L'analyse des données montre également que le nombre d'incidents durant lesquels des policiers ont ouvert le feu a diminué durant cette période, passant de plus de 100 en 2011 à 44 l'an dernier.

La Ville de Chicago procède à plusieurs changements au sein de son service de police et de plusieurs entités chargées de le superviser, après le tollé suscité par une vidéo de 2014 dans laquelle on voit un policier tirer 16 balles sur un adolescent noir. La vidéo de cet incident, qui a été rendue publique sur ordre d'un juge en novembre, contredisait la version des policiers, qui affirmaient que l'adolescent avait brusquement avancé dans leur direction en les menaçant avec un couteau. Le policier qui a tiré a été accusé de meurtre prémédité.

Malgré la surveillance publique accrue du service de police et les promesses de transparence de la Ville, le Chicago Tribune affirme qu'il lui a fallu sept mois d'argumentation et la menace d'une poursuite judiciaire pour pousser la municipalité à lui fournir les données.

La plupart des incidents se sont produits dans les quartiers South Side et West Side, plombés par la violence des gangs et la pauvreté. Au moins une fusillade sur cinq impliquait des agents en civil affectés à la lutte contre les gangs, a constaté le quotidien.

Le président du syndicat des policiers, Dean Angelo, a défendu le bilan du service de police contre les allégations de profilage racial.

«Lorsque vous regardez la carte, 80 pour cent des arrestations liées aux stupéfiants, aux armes à feu et aux gangs se produisent dans ces quartiers pauvres, a-t-il dit au journal. Là où il y a de la drogue, il y a des armes. Cela n'a rien à voir avec l'ethnicité - cela concerne l'implication criminelle.»

M. Angelo a également affirmé que les policiers devaient prendre des décisions en une fraction de seconde lorsqu'il est question d'utiliser la force létale pour se protéger.

Un militant communautaire, Charles Jenkins, croit que l'origine ethnique des personnes atteintes par des tirs de la police influence les enquêtes sur ces incidents.

«Parce qu'ils sont Noirs, il est plus facile de croire qu'un policier craignait pour sa vie et qu'il a dégainé», a-t-il déclaré au Chicago Tribune.