Le vice-président américain, Joe Biden, a ajouté sa voix hier à celles de milliers d'autres personnes qui appuient une jeune femme de 23 ans victime d'un viol sordide commis par un étudiant de la prestigieuse Université Stanford, en janvier 2015. Retour sur le scandale de l'heure aux États-Unis.

Un vice-président en colère

Joe Biden a fait parvenir hier une lettre aux médias dans laquelle il se dit empli d'une « furieuse colère ». Dans sa missive très émouvante de plus de 800 mots intitulée « Lettre à une jeune femme courageuse », le vice-président dit toute son admiration pour la jeune femme qui a eu le courage de dénoncer « le mal qui lui a été fait ». « Ce que vous avez dû endurer n'est jamais, jamais, jamais, JAMAIS la faute des femmes », écrit-il. Rappelons que Joe Biden est impliqué dans la campagne It's On Us, qui dénonce les agressions sexuelles dans les campus. Il a aussi été à l'origine de la Loi contre la violence faite aux femmes adoptée en 1994.

> Lisez la lettre de Joe Biden (en anglais)

PHOTO NOAH BERGER, ARCHIVES REUTERS

Le campus de l’Université Stanford

Des Américains révoltés

La semaine dernière, le juge Aaron Persky a condamné Brock Allen Turner, 20 ans, à six mois de prison pour le viol de la jeune femme alors qu'elle se trouvait derrière une benne à ordures inconsciente et à demi nue après une soirée entre amis sur le campus de l'Université Stanford. Le jeune homme avait été reconnu coupable à l'unanimité par le jury de trois chefs d'agression sexuelle. Il était passible d'une peine pouvant aller jusqu'à 14 ans de prison. Depuis, près de 1 million de personnes ont signé une pétition en ligne demandant la révocation du juge californien. Une autre pétition a aussi été lancée sur le site internet de la Maison-Blanche. Elle a déjà recueilli plus de 100 000 signataires, ce qui lui assure d'être « examinée » par l'administration Obama.

PHOTO ARCHIVES REUTERS

Brock Allen Turner

Un juge accusé de ne pas être impartial

Le juge Aaron Persky est un ancien étudiant et athlète de l'Université Stanford. Aux yeux de beaucoup, son jugement est teinté d'un parti pris évident pour Brock Allen Turner, vedette de l'équipe de natation de la même université. Dans sa décision, le juge a mentionné qu'une peine de prison aurait un impact sur la suite de la carrière du jeune homme et que celui-ci avait manifesté des « remords sincères ». Depuis, le juge Persky a reçu des menaces de mort.

PHOTO JASON DOIY, ARCHIVES THE RECORDER/ASSOCIATED PRESS

Le juge Aaron Persky

Une cause qui émeut le monde entier

La victime, dont l'identité est protégée, a lu une lettre à son agresseur pendant son procès. Son témoignage a rapidement fait le tour du monde. « J'ai appris dans les médias que mes fesses et mon vagin étaient à découvert, qu'on m'avait peloté les seins, qu'on m'avait enfoncé des doigts, des aiguilles de pin et d'autres détritus, que ma peau dénudée et ma tête avaient râpé le sol derrière une benne à ordures pendant qu'une première année en érection se frottait contre mon corps inanimé et à demi nu. Mais je ne me souviens de rien, alors comment prouver que je n'ai pas aimé ça ? »

PHOTO FOURNIE PAR TESSA ORMENYI, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS

Sur cette photo prise le 16 septembre 2015, des étudiants de l’Université Stanford dénoncent les mesures – qu’ils jugent insuffisantes – mises en place par l’institution pour prévenir les violences à caractère sexuel.

Une victime consentante, affirme l'agresseur

Ce sont deux étudiants témoins de la scène du viol qui ont empêché Brock Allen Turner de fuir les lieux du crime. Selon la police, l'agresseur avait une alcoolémie deux fois supérieure à la limite légale pour conduire aux États-Unis et celle de la victime était trois fois supérieure à la limite. Pendant son procès, l'étudiant a affirmé que la victime était consentante pour une relation sexuelle et qu'elle avait également joui pendant la pénétration. La jeune femme n'a pourtant repris connaissance à l'hôpital que trois heures après son agression. Selon une étude de la Maison-Blanche, 10 % des étudiantes dans les universités américaines ont été victimes d'une agression sexuelle en 2015, 4 % ayant subi un viol.

PHOTO DAN HONDA, BAY AREA NEWS/ASSOCIATED PRESS

Le procureur du district de Santa Clara – où a été jugé Brock Allen Turner –, Jeff Rosen, se dit en désaccord avec la peine imposée à l’étudiant, mais s’oppose à ce que le juge Aaron Persky soit démis de ses fonctions.

Un père qui défend son fils

Les réseaux sociaux se sont enflammés de nouveau quand le père de l'agresseur, Dan Turner, a rédigé une lettre qui a été rendue publique par Michele Dauber, professeure de droit à Stanford. Dan Turner dit refuser d'admettre la culpabilité de son fils. « Mon fils écope d'une peine sévère pour 20 minutes d'action sur une vie de 20 ans », écrit-il. Le père consacre d'ailleurs plusieurs phrases au fait que son fils a perdu l'appétit depuis les événements. Plusieurs personnes ont dénoncé les propos du père, qui illustrent bien la culture du viol toujours présente dans certains milieux.

Sources : Agence France-Presse, BuzzFeed, L'Obs et The Guardian

PHOTO TIRÉE DE FACEBOOK

La professeure de droit à l'Université Stanford, Michele Dauber