En la prenant comme cible régulière, au point de renoncer au débat républicain de jeudi du fait de sa présence, Donald Trump a fait de la journaliste de la chaîne Fox News Megyn Kelly une icône.

Tout a commencé le 6 août, à Cleveland, par une question lors du tout premier débat entre candidats à l'investiture républicaine, retransmis par Fox News.

Dans une salle tout acquise à Donald Trump, Megyn Kelly lui demande si ses fréquentes déclarations misogynes correspondent «au tempérament de quelqu'un que nous devrions élire comme président».

«Je pense que le principal problème qu'a ce pays c'est d'être politiquement correct», lui répond le promoteur milliardaire.

À l'issue du débat, l'homme d'affaires avait suggéré que la journaliste l'avait injustement traité, car elle avait ses règles.

Suivront au cours des cinq mois suivants plusieurs dizaines de tweets ou retweets, qui attaquent systématiquement, de manière plus ou moins frontale, cette ancienne avocate de 45 ans.

Donald Trump retweete des messages de ses partisans qualifiant la journaliste de «surcotée», «irritée», «partiale», voire de menteuse ou même de «bimbo».

Megyn Kelly, refuse, elle, de répondre à ces critiques.

Lundi, le candidat new-yorkais a remis le couvert à l'approche d'un nouveau débat sur Fox News, jeudi.

«Je ne l'aime pas», reconnaît-il. «Elle ne m'a pas traité de manière juste».

Mardi, il renonce au débat, après que Fox News a renouvelé son soutien à la journaliste.

Depuis ce premier échange tendu il y a cinq mois, Megyn Kelly, déjà vedette de la télévision américaine, est devenue une icône.

Son compte Twitter a gagné 300 000 abonnés et son émission The Kelly File réalise régulièrement de meilleures audiences que The O'Reilly Factor, émission emblématique de Fox News.

Le prestigieux magazine Vanity Fair lui a consacré la une de son dernier numéro, ainsi qu'un long portrait.

«Ne cherchez pas Megyn Kelly. La vedette de Fox News la plus dure à cuire et la plus brillante», prévient le mensuel en couverture.

Son physique avantageux n'est sans doute pas pour rien dans ce coup de projecteur, mais Megyn Kelly incarne surtout la première journaliste de télévision à avoir tenu tête à Donald Trump.

«Je suis peut-être la meilleure chose qui lui soit arrivée. Qui avait entendu parler d'elle avant le débat précédent?», a lancé l'homme d'affaires lundi.

Un ton à part

Directe, voix grave et puissante, assumant sa féminité sans en jouer, Megyn Kelly est une journaliste à part dans l'univers Fox News, chaîne connue pour sa ligne éditoriale très conservatrice.

Son ton est globalement plus équilibré que celui des autres présentateurs, avec une approche plus sobre et plus en retrait, malgré une ambition évidente.

Mère de trois enfants, Megyn Kelly se veut avant tout journaliste, plutôt qu'éditorialiste, et rêve de marcher dans les traces des grandes figures féminines du journalisme télévisé aux États-Unis: Barbara Walters, Diane Sawyer ou Katie Couric.

«Elle ne cède rien et ne se laisse pas embobiner», a dit d'elle Katie Couric dans le portrait de «Vanity Fair». Mais c'est aussi quelqu'un qui «sait écouter».

Désormais très bien positionnée dans le paysage médiatique, Megyn Kelly a déjà laissé entendre qu'elle aimerait se voir proposer des formats plus longs, lui permettant notamment de réaliser de plus longues interviews.

«Je pense qu'il y a une dimension spirituelle dans ma personnalité qui est complètement sous-exploitée dans mon emploi actuel», a-t-elle dit à Vanity Fair.