Hillary Clinton ne s'attendait sans doute pas à ouvrir la porte à ses ennemis en publiant ce message sur Twitter en septembre : « Chaque survivante d'une agression sexuelle mérite d'être entendue, crue et soutenue. »

Trois mois plus tard, une femme s'est levée pendant une assemblée de la candidate présidentielle au New Hampshire pour lui poser une question qui n'avait rien de spontané. En lisant un texte écrit sur une feuille de papier, elle a déclaré : «Vous dites que toutes les victimes de viol doivent être crues. Mais diriez-vous ça à propos de Juanita Broaddrick, Kathleen Willey ou Paula Jones ?»

En 1992, l'expression bimbo irruption a fait son apparition dans l'entourage de Bill Clinton pour décrire les rumeurs d'infidélité concernant celui qui briguait alors la présidence pour la première fois. Vingt-quatre ans plus tard, elle refait surface dans le contexte de la deuxième campagne présidentielle de Hillary Clinton. La différence, c'est qu'il n'est plus question de relations consensuelles avec les Gennifer Flowers de l'Arkansas, mais de présumées agressions sexuelles.

«J'avais 35 ans quand Bill Clinton, alors ministre de la Justice de l'Arkansas, m'a violée, et Hillary a tenté de me faire taire. J'ai aujourd'hui 73 ans... la souffrance sera toujours présente», a écrit récemment sur Twitter Juanita Broaddrick, qui travaillait au sein de l'équipe électorale du futur gouverneur de l'Arkansas au moment des faits allégués.

Kathleen Willey et Paula Jones ont également pris la parole au cours des derniers jours. La première accuse Bill Clinton d'avoir tenté de l'embrasser et de la peloter dans un couloir de la Maison-Blanche, où elle a travaillé comme bénévole en 1993. La deuxième a poursuivi le 42e président pour harcèlement sexuel en 1994. Elle a affirmé qu'il avait baissé son pantalon devant elle, trois ans plus tôt, en lui demandant de poser ses lèvres sur son pénis en érection.

Bill Clinton a nié les allégations de Broaddrick et Willey et versé 850 000 $ à Paula Jones pour régler sa poursuite à l'amiable sans préjudice ni admission. Depuis les années 90, ses alliés accusent toutes ces femmes de faire partie d'un complot de la droite destiné à le détruire. Certains d'entre eux ont cependant admis que Clinton et Broaddrick avaient probablement eu un rapport sexuel consensuel.

La réplique de Trump

Aujourd'hui, Broaddrick est une partisane avouée de Donald Trump, ce qui pourrait nuire à sa crédibilité. Mais le candidat à l'investiture républicaine a profité de cette énième bimbo irruption pour tenter de priver Hillary Clinton de deux de ses principaux atouts : sa défense de longue date des droits des femmes, et son mari.

Il faut dire que Hillary Clinton a provoqué Donald Trump en l'accusant d'avoir «démontré un penchant pour le sexisme». Le lendemain de Noël, le milliardaire a répliqué sur Twitter : «Hillary a annoncé qu'elle permettrait à son mari de faire campagne, mais IL A DÉMONTRÉ UN PENCHANT POUR LE SEXISME.»

PHOTO ARCHIVES AP

Paula Jones

Le lendemain, à CNN, il en a remis une couche en qualifiant Bill Clinton de «plus grand agresseur de femmes de l'histoire» et Hillary Clinton de «complice».

La semaine dernière, Trump a poursuivi sur cette lancée en diffusant sur Instagram une vidéo de 15 secondes où défilent une série d'images : Bill Clinton avec Monica Lewinsky ; la une d'un tabloïd new-yorkais traitant l'ex-président de «menteur» ; Hillary Clinton et Anthony Weiner, qui a démissionné du Congrès après avoir envoyé des photos de son pénis à des femmes sur l'internet ; et Hillary Clinton avec Bill Cosby, accusé d'agressions sexuelles par plusieurs femmes.

Intitulée Hillary et ses amis, la vidéo est accompagnée de la voix de l'ex-première dame des États-Unis prononçant un discours à Pékin en 1995 : «Les droits des femmes sont des droits de l'homme, et les droits de l'homme sont les droits des femmes. Continuons à nous battre pour l'égalité et la dignité.»

Le but de la vidéo est de laisser entendre que Hillary Clinton est hypocrite.

Est-ce que tout cela finira par lui nuire ? Des électeurs concluront sans doute que les attaques de Donald Trump relèvent elles-mêmes du sexisme. Pourquoi la femme de Bill Clinton aurait-elle à répondre des écarts de son mari ? Mais le fait est qu'elle fait aujourd'hui appel à son aide et que les mentalités ont changé depuis les années 90 par rapport aux affaires de harcèlement et d'agression sexuelle.

Chose certaine, Hillary Clinton a intérêt à trouver une meilleure réponse à la question qui lui a été posée au New Hampshire. «Eh bien, a-t-elle dit sur un ton glacial, je dirais que chacun devrait être cru au début, jusqu'à ce qu'il ne le soit plus en fonction des éléments de preuve.»