New York compte quelque 75 000 sans-abris, du jamais vu depuis les années 1930 selon certains experts, et le problème est un embarras croissant pour son maire démocrate Bill de Blasio, accusé de l'avoir sous-estimé.

Bill de Blasio a annoncé mardi le départ de son conseiller chargé des itinérants, Gilbert Taylor, et l'examen approfondi, à des fins de refonte, de deux agences spécialisées de la mairie. Déjà en septembre, l'adjointe responsable des services sociaux Lilliam Barrios-Paoli, avait démissionné.

Le maire, interpellé depuis des mois sur la question des sans-abris, souligne les efforts faits par son administration, dont un plan pour construire des appartements pour les itinérants, une aide aux familles pour éviter qu'elles se retrouvent à la rue, et un engagement à hauteur d'un milliard de dollars supplémentaires dans les quatre ans pour des programmes à destination des sans-logis.

Mais il a souligné qu'il avait hérité d'un problème vieux de 30 à 40 ans. «Ce sera un long combat qui ne sera pas gagné facilement», en dépit des efforts engagés, a-t-il insisté mardi.

New York, qui compte 8,4 millions d'habitants, concentre 14 % des sans-abris des États-Unis (75 323 personnes) selon une récente étude du ministère du Logement et du Développement urbain. Et la tendance y est inverse à celle du pays, où le nombre d'itinérants a régulièrement baissé entre 2007 et 2015, passant de 647 258 personnes à 564 708 personnes, selon cette étude.

Des milliers de familles

La ville de New York compte différemment, et estimait fin octobre à 59 000 personnes les sans-logis hébergés la nuit dans des foyers, hôtels ou résidences dédiées. La ville a en effet obligation, de par la loi, de procurer un endroit où dormir à ses itinérants.

S'y ajoutent entre 3000 et 4000 personnes qui selon le maire dorment dans la rue, dans les parcs, dans les gares, le métro ou sur un bout de trottoir. Les New-Yorkais s'en plaignent de plus en plus.

La situation «a explosé ces deux dernières années», confiait le mois dernier le chef de la police Bill Bratton, en suggérant que M. de Blasio, en fonction depuis janvier 2014, avait au départ sous-estimé le problème.

«Ces dernières années, le nombre d'itinérants à New York a atteint les niveaux les plus élevés depuis la Grande Dépression», affirme la Coalition pour les sans-abris (Coalition for the Homeless). Parmi les sans-logis hébergés fin octobre par la ville, on comptait, selon la Coalition, 23 858 enfants, 21 967 adultes hébergés en famille, 3687 femmes seules et 10 056 hommes seuls.

En dix ans, leur nombre a augmenté de 86 %.

«Il y en a beaucoup que vous ne voyez pas dans la journée parce qu'ils vont travailler. Il y a beaucoup d'enfants qui vont à l'école», souligne le maire, reconnaissant que beaucoup d'autres errent dans la rue, n'étant pas autorisés à rester dans les centres d'accueil dans la journée.

Selon lui, «de plus en plus de sans-abris le sont pour des raisons économiques», n'ayant plus les moyens de payer un loyer dans une ville aux inégalités vertigineuses. Le prix médian d'un logement à Manhattan dépasse désormais un million de dollars, quand le salaire minimum est de 8,75 $ de l'heure.

Le nombre de ceux qui dorment dehors est «sous-estimé de manière significative», estime la Coalition pour les sans-abris. Ils étaient jusqu'à présent comptabilisés une seule fois par an en janvier. Mais jeudi, la mairie a annoncé qu'ils le seraient désormais tous les trimestres, et elle a également annoncé une surveillance quotidienne accrue pour mieux répondre aux problèmes.

«Ce sera une longue bataille». «C'est un défi majeur dans tout le pays», insiste M. de Blasio. «Aucune ville n'a réglé le problème», ajoute-t-il, soulignant que San Francisco, Los Angeles et d'autres villes ont «proportionnellement un problème plus important d'itinérants».

Los Angeles compte 41 174 sans-logis, selon le ministère du Logement, suivie de Seattle (10 122) et San Diego (8742). San Francisco arrive en huitième position des grandes villes, avec 6775, derrière Las Vegas (7509), Washington (7298) et Chicago (6786).