Persuadés de l'échec de la sévère politique pénale engagée aux États-Unis dans les années 1990, des démocrates et républicains ont dévoilé jeudi un projet de réforme des peines planchers, qui mènent en prison de petits délinquants pendant des dizaines d'années.

La proposition de loi vise d'abord à assouplir les condamnations pour les délits liés aux stupéfiants et non violents, à commencer par la règle emblématique des «trois coups», selon laquelle un délinquant est automatiquement condamné à la perpétuité après sa troisième condamnation grave. Cette peine automatique passerait à 25 ans de réclusion.

Les peines obligatoires de 20 ans seraient réduites à 15 ans, et les juges auraient davantage de flexibilité dans la fixation des peines.

Le but est par exemple, selon les promoteurs de la réforme, d'épargner à de jeunes vendeurs de cannabis des peines de dizaines d'années de prison.

«Les États-Unis incarcèrent un plus grand nombre de ses citoyens qu'aucun autre pays sur Terre», a déclaré le numéro deux des sénateurs démocrates, Richard Durbin, en présentant le texte avec des collègues des deux partis.

«Les peines minimums obligatoires étaient autrefois considérées comme très dissuasives. En réalité, elles sont souvent injustes, irresponsables d'un point de vue budgétaire, et une menace pour la sûreté publique».

Il est rare que démocrates et républicains s'accordent sur quoi que ce soit, et il a fallu trois ans à ce groupe de sénateurs pour parvenir à un compromis, première tentative crédible au niveau fédéral pour revenir sur deux décennies d'expérimentation pénale qui ont rempli les prisons sans rien faire contre le récidivisme, tout en coûtant une fortune aux contribuables.

Les conservateurs ont commencé depuis plusieurs années au niveau local. Au Texas, les personnes arrêtées pour des délits non violents liés à l'usage de stupéfiants échappent souvent à la prison à condition de se soumettre à des dispositifs de traitement.

«La précipitation pour renforcer les peines planchers venait des deux partis», a rappelé le démocrate Cory Booker. La loi fédérale sur les trois coups date de 1994, sous la présidence de Bill Clinton.

Les États ont décliné la règle au niveau local, comme la Californie, où d'absurdes histoires ont choqué l'Amérique. Telle celle de Curtis Wilkerson, condamné à la perpétuité pour le vol d'une paire de chaussettes en 1995. La Californie a assoupli sa loi en 2012.

Pour l'association American Civil Liberties Union (ACLU), la proposition est «un pas» dans la bonne direction, en attendant une remise en cause plus profonde des peines automatiques.