Anna Mockler reconnaît à Hillary Clinton certaines qualités. «Elle est très intelligente et elle n'a pas été une mauvaise secrétaire d'État, dit cette auteure et professeure en création littéraire à l'Université de New York. En tant que femme, je serais heureuse d'avoir une femme à la présidence, mais pas cette femme-là.»

Il suffit de jeter un coup d'oeil au t-shirt que porte cette quinquagénaire pour connaître sa préférence en matière de candidate pour l'élection présidentielle de 2016. On peut y lire: «Elizabeth Warren à la présidence».

«Elle est à la fois efficace et morale. C'est rare qu'on retrouve ces deux qualités chez la même personne», dit Anna Mockler au sujet de la sénatrice du Massachusetts, dont elle attend l'arrivée en compagnie d'environ 250 personnes au quatrième étage de la librairie Barnes&Noble d'Union Square, à Manhattan.

Elizabeth Warren doit y présenter l'édition de poche de son livre à succès A Fighting Chance, dans lequel cette ancienne professeure de droit à l'Université de Harvard, spécialisée dans l'analyse des faillites des ménages, raconte ses combats pour défendre la classe moyenne contre la rapacité des banques. Des combats qui ont fait d'elle la bête noire de Wall Street et la coqueluche de la gauche du Parti démocrate, qui rêve de la voir briguer la présidence en 2016.

Son passage au Barnes&Noble d'Union Square, lundi dernier, a permis de constater chez ses admirateurs une insatisfaction certaine face à l'absence de compétition dans la course à l'investiture démocrate pour l'élection présidentielle de 2016. Le couronnement qui semble attendre Hillary Clinton ne les réjouit pas.

«Nous avons besoin d'un changement», estime Eva Klein, gérante d'une boutique spécialisée dans les mariages dans Queens. «Même si j'aime Hillary, je pense qu'Elizabeth est plus honnête.»

Ed Mandell, un avocat de Manhattan, éprouve également du mal à s'enthousiasmer pour l'ancienne secrétaire d'État, qui devrait officialiser sa candidature ce mois-ci.

«Je ne pense pas qu'elle ait l'énergie et la pensée novatrice que j'aimerais voir», dit-il. Et d'ajouter, en parlant d'Elizabeth Warren, qui est issue d'une famille modeste de l'Oklahoma: «J'aime sa vision du monde, ses opinions sur la façon d'aider les gens dans le besoin, ses positions contre les inégalités et sa reconnaissance du fait que nous sommes tous dans le même bateau.»

«Run, Liz, run»

En arrivant devant les spectateurs réunis au Barnes&Noble, Elizabeth Warren, mince silhouette vêtue d'un tailleur-pantalon, est accueillie par des applaudissements nourris et des cris lancés par des membres de l'organisation Ready For Warren (prêts pour Warren), qui l'encouragent à se lancer dans la course à la Maison-Blanche. «Run, Liz, run!», scandent-ils.

Ils ne sont pas les seuls à répéter ce refrain ces jours-ci. Dans son numéro dominical du 23 mars, le Boston Globe a publié quatre textes d'opinion, dont un long éditorial, appelant celle qui représente le Massachusetts au Sénat depuis janvier 2013 à briguer la présidence. «Les démocrates ont besoin de la voix d'Elizabeth Warren dans la course à la présidence de 2016», a titré le Globe au-dessus de son édito.

L'organisation progressiste MoveOn.org fait également la promotion de cette idée depuis plusieurs mois. Et elle organisera à New York, le 20 avril, une conférence à laquelle participeront plusieurs personnalités progressistes qui tenteront de convaincre Elizabeth Warren de déclarer sa candidature à la présidence.

Pas intéressée

Le hic, c'est que l'intéressée ne cesse d'opposer son refus à ce genre d'appel. «Non, je ne brigue pas la présidence. Et je ne briguerai pas la présidence», a-t-elle répété lors d'un échange avec ses admirateurs au Barnes&Noble de New York.

Âgée de 65 ans, Elizabeth Warren dit vouloir continuer à promouvoir ses priorités au Sénat, dont la réforme du programme de prêts étudiants, la hausse du salaire minimum et la sauvegarde du Bureau de protection financière des consommateurs, dont elle a été l'instigatrice au sein de l'administration de Barack Obama.

Et elle promet de poursuivre sa lutte contre les abus des banquiers de Wall Street. Et ce, même si cette combativité a poussé récemment certains d'entre eux à menacer les sénateurs démocrates de cesser de contribuer au financement de leurs campagnes électorales. Questionnée au Barnes&Noble à savoir si elle prenait cette menace au sérieux, elle a répliqué: «Vous pouvez être sûr que c'est une menace sérieuse. C'est tellement flagrant, effronté. Mais j'ai des nouvelles pour eux: bring it on [allez-y]!»

Il n'en fallait pas plus pour que les membres de Ready For Warren se remettent à scander: «Run, Liz, run!»