Hillary Clinton espérait mettre fin à la polémique sur ses emails mais la favorite des démocrates pour la Maison-Blanche en 2016 a laissé de nombreuses questions sans réponses - au risque d'alimenter la controverse, et de bousculer le calendrier de sa candidature.

Pendant 21 minutes mardi, l'ancienne secrétaire d'État de Barack Obama a répondu aux questions de journalistes sur son usage exclusif d'un compte personnel pour gérer la diplomatie américaine, de 2009 à février 2013, un choix qu'elle a dit regretter mais dont elle a défendu la légalité.

Les médias énuméraient mercredi les zones d'ombre qui restaient à éclaircir.

Une phrase reste: «J'ai choisi d'utiliser un compte email personnel pour des raisons pratiques». Selon elle, utiliser un seul téléphone était plus pratique que d'en avoir un pour chaque compte.

«Je ne pense pas que l'aspect pratique doive passer avant la sécurité nationale», dit à l'AFP l'un de ses potentiels rivaux républicains pour la présidentielle, le sénateur Rand Paul.

Hillary Clinton a expliqué qu'elle avait choisi de communiquer pour ses responsabilités officielles et sa correspondance privée via une seule et même messagerie privée, sur un serveur installé dans sa maison de Chappaqua, dans l'État de New York, avec le nom de domaine @clintonemail.com, préférée à un compte officiel en .gov.

La moitié des messages ont été classés comme officiels par ses avocats, et transmis pour archivage en décembre au département d'État, qui les avait réclamés.

L'autre moitié, d'ordre personnel, a été supprimée. Soit quelque 30 000 messages reçus et envoyés de mars 2009 à février 2013.

«Déjà vu»

Le parti républicain, et les républicains du Congrès, réclament l'examen par un tiers indépendant du serveur des Clinton pour vérifier qu'aucun des courriels effacés n'avait trait à la diplomatie.

En particulier, ils s'étonnent qu'aucun des messages transmis récemment à la commission d'enquête parlementaire sur les attaques de Benghazi ne soit daté du voyage en Libye d'Hillary Clinton, en octobre 2011, une visite immortalisée par une photo de la secrétaire d'État, dans un avion militaire, en train de lire sur son smartphone.

Hillary Clinton a expliqué, fin février lors d'une conférence en Californie, qu'elle utilisait un iPhone et un Blackberry; est-ce une pratique nouvelle, depuis son départ de l'administration, ou y a-t-il contradiction?

Quant à la sécurité, la démocrate a expliqué que ses serveurs n'avaient jamais été compromis. Comment en être certain, demande le parti républicain. «Elle ne peut pas le prouver», écrit Raj Shah, un porte-parole à la presse.

Au-delà des républicains, les éditoriaux dans la presse reprochaient à la démocrate des explications insuffisantes.

Le grand journal USA Today l'a appelée à remettre son serveur aux Archives nationales ou à l'inspecteur général du département d'État. Le Washington Post lui reproche de ne pas avoir suivi les consignes officielles de l'administration recommandant l'usage d'un compte officiel.

Le tabloïd New York Daily News évoque lui un sentiment de «déjà vu»: «Clinton, trop souvent, a l'habitude de se soustraire à l'esprit de la loi, tout en fournissant des explications habiles, et en laissant des questions sans réponses».

L'agence Associated Press a même engagé des poursuites judiciaires mercredi pour obtenir les correspondances de l'ancienne chef de la diplomatie, au nom de la Freedom of Information Act, la loi sur la transparence.

Les démocrates s'étonnent qu'une experte politique comme Hillary Clinton, entourée des collaborateurs les plus aguerris du monde démocrate, semble improviser une réponse au fil de l'eau. Ils s'inquiètent des conséquences pour celle qui représente leur meilleur espoir pour succéder à Barack Obama.

«Ils auraient pu gérer cette situation plus rapidement et plus proprement depuis la semaine dernière. Ils ont mis trop longtemps à répondre», dit à l'AFP une source proche de la sphère Clinton, qui ne souhaite pas critiquer publiquement Hillary Clinton.

«Tout le monde admet, même les démocrates, que c'est grave, mais le degré de gravité dépend de la façon dont les événements évolueront», dit à l'AFP l'ancien candidat républicain à la présidentielle en 2008, le sénateur John McCain.

Conséquence, l'entrée officielle en campagne d'Hillary Clinton se rapprocherait, après avoir fluctué entre le printemps et le mois de juillet. Selon Politico, la déclaration pourrait avoir lieu d'ici deux à cinq semaines.