Barack Obama et Benyamin Nétanyahou ont étalé leurs divergences lundi à propos du nucléaire iranien, le président des États-Unis accusant le Premier ministre israélien de s'être trompé par le passé sur le bien-fondé d'un accord entre Téhéran et les grandes puissances.

M. Nétanyahou est à Washington en pleine offensive diplomatique contre l'Iran et doit s'adresser solennellement mardi au Congrès américain, au moment où Washington et Téhéran négocient en Suisse pour conclure fin mars un règlement définitif qui encadrerait le programme nucléaire controversé de la République islamique.

Lundi, M. Obama a défendu un premier accord provisoire scellé en novembre 2013 entre les grandes puissances et Téhéran et prévoyant le gel d'une partie de ses activités nucléaires en échange d'une levée partielle des sanctions. Sur ce dossier, le président américain a jugé que Premier ministre israélien avait eu tort.

«M. Nétanyahou a fait toutes sortes de déclarations», a critiqué Barack Obama dans un entretien à l'agence Reuters. «Cela allait être un très mauvais accord. Cela allait permettre à l'Iran de récupérer 50 milliards de dollars. L'Iran ne respecterait pas l'accord. Rien de cela ne s'est vérifié», a-t-il dénoncé.

«A de nombreux égards, l'Iran a fait machine arrière sur certains éléments de son programme», a insisté le président américain qui veut, comme les autres pays du groupe 5+1 (États-Unis, Russie, Chine, France, Royaume-Uni et Allemagne), signer d'ici au 31 mars un accord politique définitif avec l'Iran.

M. Obama désire en outre un rapprochement des États-Unis et de la puissance chiite, 35 ans après la rupture de leurs relations diplomatiques.

Mais Benjamin Nétanyahou est vent debout contre un tel scénario.

Il s'est dit «en mission historique» en terre américaine pour torpiller l'accord sur le nucléaire. Il en va de la «survie» de l'État hébreu fondé en 1948, a-t-il tonné devant 16.000 délégués du groupe de pression américain pro-israélien Aipac (American Israel Public Affairs Committee).

Après Israël, les États-Unis comptent le plus grand nombre de juifs au monde (de 4,5 à 5,7 millions).

M. Nétanyahou a encore exhorté le monde à empêcher l'Iran de posséder un jour la bombe atomique.

«Israël et les États-Unis sont d'accord pour que l'Iran n'ait pas d'armes nucléaires. Mais nous ne sommes pas d'accord sur la meilleure manière de l'empêcher de développer ces armes», a reconnu le dirigeant israélien, hostile depuis des années à un Iran puissance militaire atomique.

Israël est convaincu qu'un règlement international n'empêcherait pas Téhéran de se doter à terme de la bombe.

Coup de froid américano-israélien 

Et le voyage de M. Nétanyahou aux États-Unis a provoqué un nouveau coup de froid entre les deux alliés.

Il s'est fait à l'invitation du Congrès républicain, dans le dos de l'administration démocrate, a déclenché la colère de la Maison-Blanche. M. Obama a exclu toute rencontre avec le chef du gouvernement israélien.

Il a toutefois balayé tout «problème personnel» avec M. Nétanyahou, même si les deux hommes ont des relations notoirement exécrables.

Après des semaines de tensions et de déclarations acerbes, les deux alliés ont toutefois aussi joué l'apaisement.

«L'annonce de la fin de la relation avec les États-Unis est non seulement prématurée mais fausse», a affirmé M. Nétanyahou.

«Malgré les désaccords occasionnels, l'amitié entre l'Amérique et Israël s'est renforcée décennie après décennie et elle résistera aux désaccords du moment pour se renforcer à l'avenir», a-t-il promis, sous les ovations de l'Aipac.

La conseillère à la sécurité nationale de la Maison-Blanche Susan Rice lui a succédé à la tribune pour vanter «l'alliance entre deux États enracinée dans une amitié indestructible entre deux peuples».

«L'engagement du président Obama aux côtés d'Israël est profond et personnel», a-t-elle assuré, quelques jours après fustigé un voyage de M. Nétanyahou «destructeur pour les bases mêmes des relations américano-israéliennes».

Et le Premier ministre israélien a juré que son discours exceptionnel mardi au Congrès ne sera pas «irrespectueux» envers le président de la première puissance mondiale et l'alliée militaire d'Israël.

«20 milliards de dollars d'aide» 

Mme Rice lui a rappelé que l'administration Obama depuis 2009 lui avait apporté «plus de 20 milliards de dollars d'aide militaire».

A la veille de l'offensive israélienne devant les parlementaires américains, Susan Rice a aussi exhorté le Congrès à ne pas voter de nouvelles sanctions contre l'Iran: cela «ferait voler en éclats les discussions» en cours entre le 5+1 et Téhéran.

D'ailleurs, le secrétaire d'État John Kerry a retrouvé lundi, à Montreux en Suisse, son homologue iranien Mohammad Javad Zarif pour la dernière ligne droite de ces pourparlers. Les deux ministres, qui affichent une bonne entente, doivent continuer mardi et mercredi.

Mais John Kerry a mis en garde Israël sur d'éventuelles fuites concernant le contenu de l'accord discuté, après que l'entourage de M. Nétanyahou eut affirmé détenir d'«excellentes informations» sur ce texte.

«La confiance serait trahie» entre les États-Unis et Israël, a tempêté le département d'État.