Les républicains du Congrès américain cherchaient mercredi le moyen d'empêcher Barack Obama de régulariser par décrets des millions de clandestins, quitte à perturber le processus budgétaire.

Le Congrès dispose d'un moyen de pression indirect pour bloquer les futurs décrets: il vote les crédits de l'État fédéral, et pourrait ajouter à cette occasion un article coupant les fonds aux services d'immigration chargés d'accorder des permis de travail provisoires aux clandestins, ce que Barack Obama semble déterminé à faire.

C'est par une tactique similaire que le Congrès avait empêché Barack Obama de fermer la prison de Guantanamo, en interdisant l'utilisation de fonds par le Pentagone pour transférer aux États-Unis les prisonniers.

«Il est toujours approprié d'utiliser le pouvoir du porte-monnaie», a déclaré Mitch McConnell, chef des républicains du Sénat. «Mais il est important d'avoir à l'esprit que le président dispose d'un atout important: le veto. Il y aura donc des négociations sur le financement de l'État, à la fois cette année et l'année prochaine».

En clair, les républicains estiment que Barack Obama serait prêt à opposer son veto pour sauver l'une de ses priorités. Ils savent qu'ils ne disposent pas de la majorité de deux tiers requise pour surmonter un veto, ce qui provoquerait une paralysie des administrations fédérales («shutdown») --un scénario de crise que les chefs de file républicains ont d'emblée exclu.

«On ne peut pas capituler, mais il faut aussi savoir résister de façon intelligente. Si on surréagit, cela risque de se retourner contre nous au lieu du président Obama», a concédé le sénateur républicain Lindsey Graham.

Leur approche pourrait donc être plus subtile.

Des conservateurs ont suggéré de voter une série de lois de finances normales pour tout l'État fédéral, à l'exception du département de la Sécurité intérieure, dont dépendent les services d'immigration. Un éventuel «shutdown» ne concernerait donc que ces fonctionnaires, et épargnerait le reste des administrations.

«Si le président refuse d'accepter la loi de finances du département de la Sécurité intérieure (...) il sera le seul responsable des conséquences», a affirmé le sénateur républicain Ted Cruz, du Tea Party, mercredi dans une tribune sur Politico.

«Nous serons forcés d'avoir recours aux outils donnés au Congrès par la Constitution pour empêcher votre administration de mettre en place votre plan», ont menacé dans une lettre les présidents de deux commissions de la Chambre qui ont la tutelle de l'immigration, Bob Goodlatte et Michael McCaul.

Nominations et plaintes en justice 

Les républicains n'ont pas encore entériné cette stratégie, car les obstacles ne sont pas négligeables: les démocrates gardent le contrôle du Sénat jusqu'en décembre et, à partir de janvier, ils y conserveront une minorité de blocage.

En outre, le Congrès doit impérativement adopter une loi de finances d'ici le 11 décembre.

«Nous sommes en train d'examiner de nombreuses options», a dit John Boehner, président républicain de la Chambre des représentants, qui consulte activement ses troupes.

Au moins deux autres armes se trouvent dans son arsenal.

Le Sénat, sous contrôle républicain à partir de janvier, pourrait décréter une trêve des confirmations d'ambassadeurs, juges et responsables de l'administration nommés par le président américain, handicapant ainsi le travail de l'exécutif et de la justice fédérale. Selon la Constitution, le Sénat doit confirmer des milliers de candidats à des postes fédéraux.

«Le nouveau chef de la majorité, qui prendra ses fonctions en janvier, devrait annoncer que le Congrès ne confirmera plus une seule personne, nommée dans l'administration ou la justice, sauf pour les postes vitaux de sécurité nationale, tant que l'amnistie illégale persiste», plaide Ted Cruz.

Le sénateur texan est très loin de faire l'unanimité au sein du groupe républicain du Sénat, mais son influence est forte auprès des dizaines de représentants du Tea Party à la Chambre.

Enfin, le Congrès pourrait voter pour condamner symboliquement le président, ou contester ses décrets en justice, comme sur la réforme du système de santé.

«Le président peut être frappé de censure. Il peut être poursuivi en justice par le Congrès», a dit le républicain Bob Goodlatte, président de la commission Justice de la Chambre, sur CNN. «Il y a beaucoup d'autres solutions».