Le président Barack Obama a reconnu dimanche avoir échoué dans ses efforts pour convaincre les Américains du bien-fondé de sa politique conduisant à la défaite démocrate aux dernières élections législatives de mi-mandat et promis de tendre la main à ses opposants.

«Je dois reconnaître ma responsabilité» dans cet échec et «c'est le message que j'ai entendu dans les résultats de cette élection», a-t-il déclaré lors d'une interview sur la chaîne CBS enregistrée vendredi avant son départ pour une tournée en Asie. «Nous avons été vaincus», a-t-il concédé.

Le président américain répondait à une question sur des déclarations d'un haut responsable démocrate du Sénat qui avait souligné que l'impopularité de M. Obama, avec seulement 40 % d'opinions favorables, expliquait leur défaite au Congrès.

«Je pense que nous n'avons pas réussi à expliquer aux Américains ce que nous essayons de faire et pourquoi nous allons dans la bonne direction ce qui constitue un échec politique que nous devons corriger», a-t-il poursuivi.

«Il faut vraiment tendre la main à l'opposition et essayer de persuader autant que possible», a jugé le président.

Six ans après son élection triomphale à la Maison-Blanche, Barack Obama se retrouve avec la plus forte majorité républicaine au Congrès depuis des décennies. Les républicains ont repris mardi le Sénat et conforté leur majorité à la Chambre, élisant aussi des gouverneurs dans des États qui n'avaient pas vu la couleur républicaine depuis longtemps.

«Les gens ont le sentiment que les choses ne marchent pas même s'il ne fait aucun doute que l'économie s'est nettement améliorée», a insisté Barack Obama.

Il a cité le taux de chômage à 5,8 %, les plus de 200 000 créations nettes d'emplois en octobre et plus de 10 millions depuis son arrivée à la Maison-Blanche quand le pays faisait face à la plus grave récession depuis la grande dépression des années 30. Il a aussi relevé que grâce à son programme d'assurance maladie, des millions de personnes ont désormais une couverture.

«Nous faisons donc des progrès, mais les Américains voient que leurs revenus n'ont pas augmenté, que c'est difficile d'épargner pour la retraite et d'envoyer leurs enfants à l'université», a-t-il relevé avant d'ajouter: «ils déplorent aussi les blocages à Washington et la seule personne qu'ils connaissent c'est le président».

Agir par décret

Malgré sa volonté affichée de travailler avec les républicains, M. Obama n'en a pas moins réitéré dimanche son désir d'agir par décret sur la réforme de l'immigration tout en souhaitant que le Congrès adopte rapidement une loi sur le modèle de celle votée par le Sénat en 2013, mais enterrée à la Chambre des représentants.

«En parallèle, je vais faire tout ce que je peux par décret (...) et dès que le Congrès adoptera une loi sur l'immigration je la signerai», a-t-il expliqué.

Les chefs républicains du Congrès Mitch McConnell et John Boehner ont mis en garde le président Obama contre toute décision unilatérale visant en particulier à régulariser une partie des 11 millions de sans-papiers aux États-Unis.

M. Boehner a averti cette semaine qu'une telle initiative, «supprimerait toute chance de réforme de l'immigration et rendrait plus difficile la coopération entre le Congrès et la Maison-Blanche dans d'autres domaines où il pourrait y avoir des terrains d'entente».

Le président Obama, dont le mandat expire en janvier 2017, a encore aussi promis des changements à venir à la Maison-Blanche pour y apporter du sang neuf. «Nous allons faire venir de nouvelles personnes, car les gens sont fatigués (...) c'est un travail épuisant».

Pour sa part, a-t-il ajouté, «je continue à considérer la présidence des États-Unis comme le meilleur boulot de la Terre».

«Nouvelle étape» en Irak, plus offensive

Barack Obama a aussi annoncé dimanche qu'une «nouvelle étape» s'ouvrait en Irak où les Américains ne veulent plus seulement stopper les djihadistes, mais «lancer une offensive» contre eux.

Cette nouvelle phase débute alors que Bagdad et Washington cherchent à déterminer si le chef du groupe Etat islamique (EI), Abou Bakr al-Baghdadi, faisait partie ou non de dirigeants djihadistes tués ou blessés vendredi par des raids aériens de la coalition.

Baghdadi, qui a proclamé fin juin un «califat» sur les vastes régions conquises par l'EI en Irak et Syrie, est l'un des deux hommes les plus recherchés par Washington, qui offre 10 millions de dollars pour sa capture.

Pour Barack Obama, l'envoi annoncé vendredi de 1500 conseillers militaires supplémentaires en Irak marque l'entrée dans une «nouvelle étape» contre l'EI.

«La première étape était d'obtenir la formation d'un gouvernement irakien représentatif et crédible et nous l'avons fait», a fait valoir le président américain sur la chaîne CBS. «À présent, plutôt que de simplement viser à arrêter la progression de l'EI, nous voulons être en position de lancer une offensive».

Le quasi doublement du contingent américain en Irak est destiné à rendre rapidement opérationnelles les forces irakiennes, y compris kurdes, afin qu'elles puissent «commencer à repousser» les forces de l'EI, selon le président.

«Dès qu'elles seront prêtes à attaquer l'EI, nous leur prêterons un soutien aérien rapproché», a ajouté M. Obama, en réaffirmant que les «soldats américains ne combattront pas».

Incertitudes autour de Baghdadi

En attendant, Washington et ses alliés vont poursuivre la campagne de frappes aériennes sur les positions, les bâtiments et les convois des djihadistes débutée le 8 août.

Une série d'entre elles a visé vendredi «un rassemblement de dirigeants de l'EI» près de Mossoul, la deuxième ville d'Irak, que les djihadistes contrôlent.

Des télévisions arabes ont ensuite indiqué que Baghdadi faisait partie des victimes de ces frappes.

Mais «il n'y a jusqu'à présent pas d'informations fiables disponibles» en ce sens, a réagi dimanche un responsable irakien.

De son côté, le Commandement américain pour le Moyen-Orient (Centcom) n'a «pas pu confirmer» si le chef des djihadistes était bien présent sur le site des frappes, qui ont «détruit un convoi de véhicules formés de dix camions armés de l'EI».

La mort de cet homme discret représenterait un succès majeur pour la coalition internationale menée par les États-Unis, qui appuie notamment dans les airs les forces pro-gouvernementales -armée fédérale, peshmergas, milices chiites et tribus sunnites- affrontant les djihadistes au sol.

Dans le cadre du renforcement annoncé vendredi, les soldats américains seront pour la première fois déployés en dehors de Bagdad et Erbil, la capitale du Kurdistan irakien (nord). Fin octobre, le Pentagone avait ainsi jugé «nécessaire» la présence de soldats américains à Al-Anbar, où l'armée irakienne est sur la défensive.

Cette province de l'ouest du pays est quasiment entièrement aux mains des djihadistes, qui y ont dernièrement exécuté plus de 200 membres d'une tribu sunnite ayant pris les armes contre eux.

Plus de 1000 morts à Kobané

En Syrie, le régime a mené un raid sur un fief de l'EI dans le nord, tuant au moins 21 civils et faisant une centaine de blessés, d'après l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH). «Sept barils d'explosifs et trois obus» ont été largués sur Al-Bab, ville tenue par les djihadistes dans la province d'Alep (nord), selon l'ONG.

Le régime de Bachar al-Assad a initialement évité la confrontation avec l'EI quand le groupe est apparu en Syrie en 2013. Mais plusieurs attaques meurtrières des djihadistes contre des bases militaires ont convaincu cet été l'armée de frapper le groupe extrémiste dans ses bastions du nord et de l'est du pays.

Les forces du régime ont subi un revers dimanche dans le sud en perdant la ville de Nawa, conquise par des combattants rebelles et du Front Al-Nosra, la branche syrienne d'Al-Qaïda, selon l'OSDH.

Dans le nord, les combats se poursuivent entre l'EI et les forces kurdes dans la ville de Kobané où le cap des 1000 morts a désormais été dépassé depuis que l'EI a lancé son offensive à la mi-septembre, selon un décompte de l'OSDH. Ce chiffre ne prend pas en compte les victimes des frappes de la coalition.

Alors que la guerre en Syrie a fait plus de 195 000 morts en trois ans et demi, l'envoyé spécial de l'ONU Staffan De Mistura poursuivra mardi sa nouvelle visite à Damas pour discuter d'un «plan d'action» visant à relancer les efforts de paix.