Choisi par Barack Obama pour diriger la CIA et ensuite le Pentagone, Leon Panetta emboîte le pas de Robert Gates et Hillary Clinton. Dans Worthy Fights, titre de ses mémoires parus hier, ce démocrate centriste couche à son tour sur papier ses désaccords avec le président en matière de sécurité nationale, tout en critiquant le leadership de son ancien patron. Décryptage.

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BARACK OBAMA

Barack Obama est «un réaliste et un pragmatiste» dont l'action est guidée par une «vision raisonnée pour le pays», écrit Leon Panetta dans Worthy Fights, en expliquant son admiration pour le président. Mais il «évite la bataille, se plaint et rate des occasions», ajoute-t-il en faisant notamment référence à un des bras de fer budgétaires entre la Maison-Blanche et les républicains du Congrès. «Cet épisode a illustré ce que je considère comme sa faiblesse la plus évidente, une réticence frustrante d'engager le combat avec ses adversaires et de mobiliser des soutiens pour sa cause», écrit Panetta. «Ce n'est pas un problème d'idées ou d'intellect. Cependant, il manque de fougue.»

IRAK

L'ancien chef du Pentagone est catégorique: le gouvernement américain avait le pouvoir de conclure avec l'Irak un accord qui aurait pu permettre d'y laisser des soldats américains après 2011. Une telle force résiduelle aurait pu, selon lui, «aider à conseiller l'armée irakienne par rapport à la résurgence d'Al-Qaïda et aux violences communautaires qui ont noyé le pays». Mais l'équipe du président a rejeté ce scénario, déplore-t-il. «Ceux qui étaient de notre côté ont vu la Maison-Blanche tellement désireuse de se débarrasser de l'Irak qu'elle semblait vouloir s'en retirer plutôt que de verrouiller des arrangements qui auraient préservé notre influence et nos intérêts», écrit-il.

SYRIE

Leon Panetta évoque dans son livre son désaccord avec Barack Obama sur la question de l'aide militaire directe aux rebelles syriens «modérés». Sa crainte était de laisser en Syrie un vide que les djihadistes étaient susceptibles de combler. «Si nous n'empêchons pas ces extrémistes sunnites de prendre de vastes parties de territoire au Moyen-Orient, ce ne sera qu'une question de temps avant qu'ils nous prennent pour cible», écrit-il. L'ex-secrétaire à la Défense reproche également au président d'avoir «vacillé» après avoir promis de punir Damas pour son attaque à l'arme chimique contre les civils syriens en août 2013. «Cette incapacité à répondre a envoyé un mauvais message au monde», écrit-il.

HILLARY CLINTON

«Une chose est certaine au sujet des Clinton: ils veulent accomplir le boulot. Il ne s'agit pas seulement d'en parler, il s'agit d'accomplir quelque chose.» Cette phrase tirée du livre de Leon Panetta ne se veut pas seulement un hommage à Bill, que l'auteur a notamment servi comme chef de cabinet. Il s'applique aussi à Hillary, dont Panetta ne cesse de vanter les mérites dans les entrevues qui accompagnent la sortie de Worthy Fights. «Je sais qu'Hillary pourrait faire le boulot», a-t-il répondu hier à une journaliste qui lui demandait qui, de Hillary Clinton ou de Joe Biden, ferait le meilleur commandant en chef.

CIA

Très critique de la CIA durant la présidence de George W. Bush, Leon Panetta en est devenu l'un des plus ardents défenseurs après sa nomination par Barack Obama à la tête de cette agence. Il s'est notamment opposé à la décision du président de rendre publiques les notes du ministère de la Justice justifiant le recours à la torture pour faire parler les suspects de terrorisme. «Les interrogatoires musclés ont forcé des prisonniers à céder devant leurs gardiens et à fournir des informations qui ont aidé notre gouvernement à comprendre le leadership, les méthodes et l'organisation d'Al-Qaïda», écrit-il dans Worthy Fights.