Au terme d'une longue bataille judiciaire, le prêcheur radical britannique Abou Hamza a été reconnu coupable lundi à New York par un jury populaire de prise d'otages et terrorisme.

L'ancien imam de la mosquée londonienne de Finsbury Park, qui s'est défendu lui-même durant son procès, encourt la réclusion à perpétuité. Sa peine sera prononcée le 9 septembre.

En tee-shirt bleu et pantalon de sport, l'ancienne figure de proue du «Londonistan» n'a montré aucune réaction particulière à l'énoncé du verdict, annoncé après quatre semaines de procès. Les jurés avaient délibéré 12 heures sur deux jours au tribunal fédéral de Manhattan.

Borgne et amputé des deux avant-bras après une explosion accidentelle au Pakistan, Abou Hamza, 56 ans, barbe et cheveux blancs, était accusé de complot et prise d'otages, pour avoir aidé les ravisseurs de 16 touristes occidentaux au Yémen en 1998. Quatre des otages avaient été tués lors d'une opération des forces yéménites pour les libérer.

Il était également accusé d'activité terroriste en lien avec un projet de camp d'entraînement au jihad en 1999 dans l'Oregon, qui n'a jamais vu le jour. Il était également accusé d'avoir envoyé des candidats au jihad s'entraîner en Afghanistan.

Les jurés l'ont reconnu coupable des 11 charges retenues contre lui.

De son vrai nom Mustafa Kamel Mustafa, l'imam d'origine égyptienne a durant le procès rejeté toutes les accusations le visant, tout en reconnaissant avoir eu parfois des termes très durs dans ses prêches et discours enflammés, dont de nombreux extraits avaient été montrés aux jurés. Il a également reconnu qu'il aimait et admirait Oussama ben Laden «pour certaines raisons», mais souligné qu'il n'avait jamais été membre d'Al-Qaïda.

Prenant la parole pendant trois jours pour sa défense, il a reconnu avoir fourni un téléphone satellitaire au groupe islamiste «Armée islamique d'Aden-Abyane» ayant enlevé les touristes occidentaux au Yémen, mais affirmé qu'il avait été mis au courant de leur enlèvement après coup, et avait alors essayé d'éviter le pire.

Prêches au vitriol

Il a aussi affirmé avoir jeté à la poubelle le fax dans lequel un jeune ayant fréquenté sa mosquée lui parlait d'un projet de camp d'entraînement au jihad dans l'Oregon en 1999. Et ajouté qu'il n'avait pas davantage su qu'un autre était parti combattre en Afghanistan.

Son procès avait démarré à New York trois semaines après celui du gendre de Ben Laden et ancien porte-parole d'Al-Qaïda, Souleymane Abou Ghaith, dans le même tribunal. Abou Ghaith a été reconnu coupable fin mars de complot visant à tuer des Américains et soutien au terrorisme, et risque aussi la réclusion à perpétuité.

«Ces procès montrent que, dans un tribunal civil, les Américains et toutes les victimes de terrorisme peuvent obtenir justice, sans sacrifier nos principes», a déclaré le procureur Preet Bharara, une allusion aux tribunaux militaires utilisés pour certains suspects de terrorisme détenus à Guantanamo.

«L'accusé a été condamné pour ce qu'il a fait, non ce qu'il a dit», a-t-il insisté.

«Sa condamnation est aussi juste qu'elle est rapide», a aussi estimé le ministre de la Justice Eric Holder. «Avec chaque verdict de culpabilité contre une figure haut placée liée à Al-Qaïda, ce débat sur la manière de chercher au mieux la justice dans ces affaires s'éteint doucement», a ajouté M. Holder.

La défense à l'inverse a annoncé son intention de faire appel, critiquant la «rapidité» du verdict.

Un juré a expliqué sous couvert d'anonymat que les charges «les plus faciles» avaient été celles liées à l'enlèvement des touristes au Yemen. Il a ajouté que les jurés avaient trouvé «très perturbante» la «vision» d'Abou Hamza sur le 11-Septembre.

Abou Hamza, père de neuf enfants et ingénieur de formation, était devenu imam de la mosquée de Finsbury Park en 1997, une figure haute en couleur, aux prêches au vitriol, notamment contre le grand Satan américain.

Le Britannique Richard Reid, qui avait ensuite tenté de faire exploser un avion transatlantique avec des chaussures piégées, ou le Français Zacarias Moussaoui, condamné à la prison à vie en liaison avec le 11-Septembre, étaient notamment allés l'écouter, mais il a affirmé ne pas les connaître.

La mosquée de Finsbury avait été fermée en 2003, après une perquisition et la découverte d'armes.

Abou Hamza avait été arrêté en 2004 à la demande des autorités américaines, qui l'avaient inculpé des 11 charges dont il a été reconnu coupable.

Il avait ensuite été jugé en Angleterre en 2006, pour incitation au meurtre et à la haine raciale, et avait passé sept ans en prison. Il avait tenté en vain d'éviter son extradition aux États-Unis en octobre 2012.