Le procès du gendre de Ben Laden a touché à sa fin lundi à New York, l'accusation le dénonçant comme un confident et messager du chef d'Al-Qaïda, la défense le décrivant à l'inverse comme un imam respecté n'ayant jamais été un terroriste.

Les jurés entameront mardi leurs délibérations.

Souleymane Abou Ghaith était un «confident de confiance», un «messager» qui adhérait pleinement à l'idée d'Oussama Ben Laden de tuer des Américains, a affirmé dans son réquisitoire final le procureur John Cronan.

Il a rappelé que c'était vers cet imam koweïtien que le chef d'Al-Qaïda s'était tourné dans les heures suivant «le terrible chaos» des attentats du 11-Septembre. Souleymane Abou Ghaith deviendra alors selon lui, via ses diatribes enflammées, le «principal messager» et porte-parole de Ben Laden.

L'accusé de 48 ans (bien 48), arrivé en juin 2001 en Afghanistan avec sa femme et ses sept enfants, n'était pas un «robot» ou une «marionnette» de Ben Laden, a insisté le procureur.

Les deux hommes se faisaient confiance et se respectaient mutuellement, a-t-il ajouté.

En 2001 et 2002 il était «littéralement assis à la droite d'Oussama Ben Laden, dans la période la plus importante de l'histoire sauvage d'Al-Qaïda», a insisté John Cronan, repassant à l'envi les photos le montrant effectivement assis à côté de Ben Laden dans les montages afghanes.

Avec lui, «la propagande d'Al-Qaïda est devenue mondiale», a ajouté le procureur, soulignant ses qualités d'orateur.

Discours enflammés 

Dans la salle comble du tribunal fédéral de Manhattan, le procureur a aligné les «preuves claires et accablantes», selon lui, dont de nombreux extraits des discours d'Abou Ghaith, prononcés dans les semaines ayant suivi les attentats du 11-Septembre. L'accusé y affirmait notamment à l'adresse des États-Unis que «la tempête ne s'arrêterait pas, spécialement celle des avions», et glorifiait les auteurs des attentats.

«Le but premier d'Al-Qaïda est de tuer des Américains», a insisté le procureur. L'accusé, a-t-il ajouté, avait accepté de faire partie de ce complot.

Les procureurs l'ont également accusé d'avoir été en contact avec Richard Reid, un Britannique qui avait tenté de faire exploser un vol Paris-Miami avec des chaussures piégées trois mois après le 11-Septembre.

Souleymane Abou Ghaith, qui avait ensuite épousé une fille de Ben Laden, est inculpé de complot visant à tuer des Américains, complot visant à apporter un soutien à des terroristes et soutien matériel à des terroristes.

Il a plaidé non coupable et risque la réclusion à perpétuité.

Barbu, crâne dégarni, il a écouté attentif le long réquisitoire, via un système de traduction en arabe.

Son principal avocat, Stanley Cohen, a ensuite dans sa plaidoirie finale dénoncé les témoignages à charge, parmi lesquels deux terrroristes qui ont selon lui menti, un expert qui s'est contredit à la barre, et des policiers qui n'ont jamais rencontré l'accusé.

«Il n'y a pas la moindre preuve» liant Abou Ghaith à Richard Ried, a-t-il également affirmé.

Il a présenté son client comme un homme pieux, devenu imam et enseignant, qui n'avait «pas de problème» avec les Américains ayant libéré son pays --le Koweit-- après l'invasion irakienne en 1990.

Selon lui, son installation en 2001 en Afghanistan relevait d'une «crise de milieu de vie», par un homme qui voulait «aider les gens dans le besoin».

«Certaines de ses associations peuvent vous donner la nausée, mais cela ne prouve pas un complot pour tuer des Américains», a-t-il affirmé.

«Cet homme, cet être humain n'est pas coupable de toutes les charges» retenues contre lui, a ajouté l'avocat.

Abou Ghaith avait créé la surprise jeudi, en prenant longuement la parole pour sa défense, du jamais vu à New York pour un responsable d'Al-Qaïda de ce calibre.

Il avait entraîné des jurés médusés dans la grotte où l'avait convoqué Ben Laden le soir du 11-Septembre dans les montagnes afghanes. Mais il avait affirmé qu'il n'avait jamais voulu recruter «qui que ce soit» et pas non plus voulu tuer des Américains.

Abou Ghaith avait travaillé pour Al-Qaïda jusqu'en 2002, année où il est parti s'installer en Iran.

Il avait été arrêté fin janvier 2013 à Ankara, après avoir traversé la frontière avec l'Iran. Expulsé ensuite vers la Jordanie, il y a été arrêté et extradé vers les États-Unis.