Puisant dans son expérience personnelle, le président des États-Unis Barack Obama a lancé jeudi un appel solennel à améliorer les perspectives des jeunes issus des minorités, dont la situation est selon lui actuellement «révoltante».

Six mois après avoir célébré le 50ème anniversaire de la «marche sur Washington» de Martin Luther King pour l'égalité raciale, M. Obama a noté que «les faits sont têtus: les chances moyenne de réussir d'un Noir ou d'un Hispanique dans ce pays sont plus faibles (que celles des Blancs), et c'est pire pour les garçons et les jeunes hommes».

«Si vous êtes noirs, vous avez une chance sur deux de grandir sans père», a déclaré M. Obama à la Maison-Blanche. «Si vous êtes hispanique, c'est une sur quatre. Et nous savons que des jeunes hommes qui grandissent sans père ont davantage de risques d'être pauvres et de ne pas réussir à l'école».

Selon la présidence, 86% des Noirs et 82% des Hispaniques n'ont pas le niveau requis de lecture à l'âge de dix ans, alors que ce chiffre est de 58% chez les Blancs.

Les minorités sont aussi surreprésentées dans la population carcérale, entretenant un cercle vicieux d'éclatement familial. Les jeunes issus de ces minorités ont six fois plus de risques d'être victimes de meurtre que les Blancs.

«Le pire dans tout cela, est que nous devenons insensibles à ces statistiques. Elles ne nous surprennent pas. Nous pensons qu'elles sont normales. Nous pensons que c'est une composante inévitable de la vie aux États-Unis, alors que c'est une situation révoltante», s'est indigné le président.

Mais ces chiffres, problème à la fois «moral» et «économique» pour l'avenir du pays, «devraient nous briser le coeur et nous forcer à agir», a ajouté M. Obama, qui dévoilait une opération de partenariat avec des fondations et des entreprises pour aider davantage de jeunes à réussir, intitulée «My brother's keeper».

«Importance nationale»

«My brother's keeper» (le gardien de mon frère) fait référence à un passage de la Genèse, et M. Obama a eu recours à cette expression de nombreuses fois lors de ses discours électoraux pour illustrer son credo de solidarité.

«My brother's keeper» vise à fédérer 200 millions de dollars sur cinq ans pour promouvoir l'éveil lors de la petite enfance, réduire l'illettrisme et sensibiliser à la discipline, entre autres.

Dans ce discours passionné et ému à la Maison-Blanche, le premier président américain issu d'une minorité raciale a expliqué que son parcours initial n'était pas différent de ceux de jeunes Noirs des quartiers difficiles, en butte à l'échec scolaire, à la drogue et à la violence.

«J'ai fait de mauvais choix. Je me suis drogué sans penser au mal que cela pouvait faire. Je n'ai pas toujours pris l'école au sérieux. Je me suis trouvé des excuses», a rappelé le président.

«La seule différence est que j'ai grandi dans un environnement qui pardonnait davantage», a ajouté M. Obama, qui a vécu la plus grande partie de sa jeunesse à Hawaii (Pacifique).

«Donc, quand j'ai fait des erreurs, les conséquences n'étaient pas aussi graves», a poursuivi le président, en soulignant que même s'il avait grandi en l'absence de son père, sa famille «n'a jamais cessé de croire en moi. Et donc, je n'ai jamais arrêté de croire en moi».

La question des jeunes issus des minorités «est un dossier d'importance nationale. C'est un dossier aussi important que tous ceux sur lesquels je travaille», a encore dit celui qui a commencé sa vie publique comme animateur social dans les quartiers défavorisés du sud de Chicago.

L'ancien basketteur Earvin «Magic» Johnson et l'ex-maire de New York Michael Bloomberg, ainsi que l'ancien secrétaire d'État Colin Powell, tous actifs dans le domaine de la philanthropie, étaient présents à la Maison-Blanche jeudi.

M. Obama, qui a prononcé son discours sur une estrade, entouré de jeunes hommes issus des minorités, les a aussi invités à prendre leur destin en main et à ne pas se trouver d'«excuses».

«Il vous faudra rejeter le cynisme qui dit que les circonstances de votre naissance ou les injustices persistantes de la société vous définissent, vous et votre avenir», a-t-il martelé.