Deux élus du Maryland ont annoncé mardi un projet de loi restreignant l'accès de la compagnie ferroviaire française SNCF aux marchés publics tant qu'elle n'aura pas versé d'indemnités pour son rôle dans la déportation des juifs.

Les deux élus démocrates, qui siègent au Sénat du Maryland, exigent de la SNCF qu'elle indemnise les survivants et leurs familles avant de pouvoir se porter candidate à un projet ferroviaire public-privé actuellement en gestation dans cet État.

«Le refus persistant de la SNCF d'assumer sa responsabilité pour son rôle dans l'Holocauste reste une insulte pour ses victimes», a estimé l'une des auteurs de la proposition de loi, Joan Carter Conway, dans un communiqué.

Filiale américaine de la SNCF, Keolis America est candidate à un appel d'offres pour un contrat de 6 milliards de dollars sur la création et l'exploitation d'une ligne ferroviaire d'environ 25 kilomètres dans l'État, rappelle-t-elle.

A l'appui de leur démarche, les deux élus citent la pétition lancée sur le site change.org par un ancien déporté, Léo Bretholtz, qui a recueilli plus de 50.000 signatures.

«C'est tout à fait inconcevable que la filiale américaine de la SNCF soit désormais en compétition pour construire et exploiter (cette nouvelle liaison ferroviaire, ndlr) tout en refusant de répondre à ses responsabilités,» a déclaré cet ancien déporté du camp d'Auschwitz, cité dans le communiqué.

Réagissant à l'initiative des deux élus, le président de SNCF America, Alain Leray, a déclaré à l'AFP que la compagnie se livrerait à une «lecture critique» de cette proposition de loi afin de détecter une «éventuelle discrimination» à son égard vis-à-vis des autres entreprises engagées dans cet appel d'offres.

Ces dernières années, la SNCF a dû se replonger dans ses activités passées pendant la Seconde Guerre mondiale. Réquisitionnée par le régime de Vichy, l'entreprise avait déporté 76 000 juifs de France dans des wagons de marchandises à travers le pays et vers les camps d'extermination entre 1942 et 1944.

En 2011, le groupe avait reconnu avoir été un «rouage de la machine nazie d'extermination» mais a, jusque-là, refusé toute indemnisation systématique des survivants et familles d'anciens déportés.

Ce rôle a déjà valu à la SNCF d'autres actions aux États-Unis. En août, des élus du Congrès américain ont déposé un projet de loi pour autoriser des poursuites contre la SNCF, après un précédent texte infructueux déposé deux ans auparavant.

Fin 2010, le patron de la SNCF, Guillaume Pépy, avait également dû présenter des excuses en Floride où la compagnie espérait remporter un vaste contrat, abandonné depuis, pour relier les villes d'Orlando et Tampa.