Israël, dont un ministre se rend mardi aux États-Unis, veut jouer de son influence au Congrès américain pour tenter d'empêcher la conclusion d'un accord sur le nucléaire iranien lors de la reprise des négociations entre les grandes puissances et l'Iran le 20 novembre.

«Israël fera tout pour convaincre les grandes puissances et leurs dirigeants d'éviter de conclure un mauvais accord» avec l'Iran, a affirmé le Premier ministre Benyamin Nétanyahou lors du conseil des ministres.

Devant l'influente assemblée générale des Fédérations juives d'Amérique du Nord (JFNA) à Jérusalem, M. Nétanyahou a martelé dimanche soir son intention à se battre contre un accord «mauvais et dangereux».

«J'ai été informé des détails de la proposition aux Iraniens. Ce qui est proposé actuellement est un accord selon lequel les capacités nucléaires de l'Iran ne reviennent pas en arrière alors que le régime des sanctions est rétrogradé», a-t-il déclaré.

«Quand il s'agit de la sécurité du peuple juif, je ne me tairai pas. Cela n'arrivera pas tant que je suis en fonction. Lorsque les Juifs se sont tus vous savez ce qui s'est passé», a-t-il ajouté, sous les applaudissements des représentants de la JFNA.

A l'issue d'une rencontre très tendue vendredi à Tel-Aviv avec le secrétaire d'État américain John Kerry, M. Nétanyahou avait déjà souligné avec force que l'accord en discussion avec l'Iran, ennemi juré d'Israël, était «un très mauvais accord».

M. Kerry a assuré dimanche que les États-Unis n'étaient ni «aveugles» ni «stupides» dans leurs pourparlers avec l'Iran, se défendant d'avoir cherché à précipiter un accord entre Téhéran et les grandes puissances.

«Nous sommes parfaitement en mesure d'évaluer si nous agissons dans l'intérêt de notre pays et du reste du globe, en particulier de nos alliés comme Israël et les pays du Golfe», a-t-il déclaré dans un entretien avec la chaîne américaine NBC depuis Genève.

«Il n'y a aucune divergence» entre le gouvernement américain et Israël sur le dossier iranien, a-t-il insisté en réponse à M. Nétanyahou.

Le ministre israélien de l'Economie Naftali Bennett a annoncé à la radio militaire qu'il se rendrait à partir de mardi aux États-Unis pour «mener une campagne auprès de dizaines de membres du Congrès» à qui il veut expliquer que «la sécurité d'Israël est en jeu».

«Don Quichotte»

A l'inverse, la secrétaire d'État adjointe américaine Wendy Sherman, qui mène les négociations avec l'Iran, est arrivée en Israël dimanche, a indiqué la porte-parole du département d'État Jen Psaki.

«Elle mènera des consultations avec ses homologues au sein du gouvernement d'Israël sur les négociations du groupe des 5+1 à Genève et poursuivra notre coordination étroite avec Israël sur nos efforts en cours pour empêcher l'Iran de se doter de l'arme nucléaire», a indiqué Mme Psaki.

Dimanche, les médias israéliens mettaient en avant l'ampleur des divergences entre Israël et les États-Unis.

Pour le quotidien Maariv (droite), les «dirigeants israéliens ont décidé de lancer une attaque contre l'administration américaine sur le dossier iranien».

Israël Hayom, un quotidien gratuit proche de M. Nétanyahou, dénonce à sa une la «reddition américaine» face à l'Iran et déplore: «Le président Obama pratique la politique d'"après-moi le déluge"».

En revanche, l'éditorialiste du quotidien Yédiot Aharonot raille M. Nétanyahou qui «ambitionne de devenir un nouveau Winston Churchill et pourrait finir en Don Quichotte, le chevalier errant qui part à l'assaut de vrais et de faux ennemis».

Tous les experts considèrent qu'en dépit des efforts du Premier ministre israélien, un accord sera ratifié entre les grandes puissances et l'Iran.

«C'est un choix stratégique de Barack Obama qu'Israël ne peut pas remettre en cause», a ainsi assuré un commentateur de la radio publique.

Shelly Yachimovich, la dirigeante de l'opposition travailliste, a elle aussi critiqué l'attitude de confrontation de M. Nétanyahou, tout en s'opposant au projet d'accord actuellement en discussion.

Trois jours d'intenses négociations entre l'Iran et six puissances mondiales à Genève se sont achevés dans la nuit de samedi à dimanche sans déboucher sur un accord sur le programme nucléaire iranien.

Israël, considéré comme la seule puissance atomique de la région, et l'Occident accusent l'Iran de dissimuler un volet militaire derrière son programme civil, ce que Téhéran dément, revendiquant son droit au nucléaire civil.