Un responsable de Guantanamo a révélé jeudi qu'une photo du World Trade Center en feu était passée au travers des fouilles systématiques, dont se plaignent les avocats, car il affecte leur courrier confidentiel.

Au troisième jour d'une audience à Guantanamo, le commandant George Massucco était interrogé sur les fouilles mises en place dans le camp 7, où sont incarcérés les détenus «de grande valeur», dont les cinq accusés du 11 septembre.

En présence de quatre des cinq accusés, le témoin a admis «plusieurs fouilles» réalisées régulièrement depuis février dans les boîtes contenant le courrier «privilégié» entre les avocats et leurs clients.

Les défenseurs des cinq hommes, qui encourent la peine capitale pour le meurtre de près de 3000 personnes le 11 septembre 2001, protestent contre la saisie de leurs documents confidentiels estampillés «courrier judiciaire», et la disparition de certains d'entre eux.

Le juge James Pohl s'est montré agacé que cette question lui revienne de manière récurrente: «Cela fait au moins deux ans que cette question ressurgit, vous ne pensez pas que cela devrait être une priorité, afin que je ne l'entende pas toujours et encore», a-t-il dit, en référence à son jugement récent, ordonnant aux autorités de la prison de respecter les consignes et de ne pas saisir le courrier des avocats.

L'équipe chargée de ces fouilles dans le camp 7 ultra-protégé, baptisée la «Task Force Platinum», «cherche des éléments de contrebande» et ne s'intéresse pas «au contenu» des documents juridiques, a voulu rassurer le commandant Massucco.

«Nous le faisons pour la sécurité de nos gardiens», s'est défendu le responsable, à la recherche de trombones, attaches ou autres petits objets métalliques pouvant servir d'armes, mais aussi en quête de documents de propagande formellement interdits.

C'est ainsi qu'une photo «troublante» montrant des cercueils recouverts du drapeau américain sur fond du World Trade Center en feu a été découverte parmi les documents tamponnés de Khaled Cheikh Mohammed, cerveau du 11 septembre, a-t-il affirmé, questionné par le procureur.

Des journaux en arabe et 87 pages d'articles de presse rassemblés par le site GitmoWatch, trop récents pour avoir pu passer le contrôle, ont été également retrouvés sur le lit du Pakistanais, a-t-il ajouté.

En revanche, une liste de projets de recours que l'avocat Walter Ruiz voulait déposer devant le tribunal militaire a été saisie, bien que marquée «stratégie de la défense», et a été conservée dans le local du «gardien des preuves», a dû admettre le responsable, sous le feu des questions de l'avocat.

Certains documents «ont disparu», a-t-il aussi admis, mentionnant des pages manquantes d'un bloc note, et il arrive que des gardiens fraîchement arrivés sur la base lisent le contenu des documents, car ils ont reçu des instructions contradictoires.

Dès mardi, au premier jour de cette audience préliminaire, les avocats avaient attiré l'attention du juge sur le contrôle de leur courrier. «Il est confidentiel et ils n'arrêtent pas de s'infiltrer», avait alors protesté l'avocate Cheryl Bormann.

Le général Mark Martins, procureur en chef, avait alors rappelé que le magazine de propagande islamiste Inspire avait pu être saisi ainsi. «La contrebande n'est pas le problème, il s'agit des privilèges de la défense», avait rétorqué David Nevin, l'avocat de M. Mohammed.