Barack Obama a exhorté jeudi ses adversaires à cesser d'avoir recours à des crises préjudiciables selon lui aux États-Unis, appelant le Congrès à s'accorder sur un budget à long terme et une réforme de l'immigration.

«Les dysfonctionnements politiques encouragent nos ennemis et affaiblissent nos amis», a déclaré le président américain lors d'une intervention solennelle et au ton sombre depuis la Maison-Blanche, quelques heures après avoir promulgué une loi mettant fin à 16 jours de paralysie de l'État.

Le Congrès, sous la pression de l'échéance d'un éventuel défaut de paiement sans précédent de la première économie mondiale, a adopté in extremis mercredi soir un compromis budgétaire et un relèvement du plafond de la dette.

Mais la solution provisoire trouvée fait craindre de nouveaux affrontements entre les républicains et M. Obama, toujours en quête de succès législatifs pour son second mandat.

Jeudi, le président a enjoint à ses adversaires d'abandonner «la stratégie de la corde raide» qui menace l'économie et ébranle la confiance des Américains dans leur gouvernement selon lui.

Plus spécifiquement, il a demandé aux élus républicains majoritaires à la Chambre des représentants de s'atteler à la réforme de l'immigration, déjà adoptée cet été au Sénat contrôlé par ses alliés démocrates. Il a aussi évoqué la nécessité de voter une loi sur l'agriculture, également bloquée.

Des centaines de milliers de fonctionnaires fédéraux ont repris le chemin du travail jeudi matin, après plus de deux semaines de congés forcés.

Mais cet épilogue n'est que provisoire: le plafond de la dette n'est relevé que jusqu'au 7 février 2014, alors que la Maison-Blanche aurait, dans l'idéal, préféré voir cette échéance repoussée à fin 2014, après les élections législatives de mi-mandat.

La loi budgétaire court quant à elle jusqu'au 15 janvier, date à laquelle une nouvelle paralysie de l'État se profilera si aucun accord n'est scellé entre les troupes du président de la Chambre, John Boehner, et l'administration démocrate.

«Aucun gagnant»

Une commission bicamérale doit être convoquée et élaborer d'ici au 13 décembre les contours d'un budget pour le reste de l'année 2014. Mais une telle «supercommission» n'avait pas réussi à se mettre d'accord en 2011, accouchant en mars dernier d'une cure d'austérité forcée qui n'a pas été altérée par le compromis de mercredi.

Il s'agit d'une contrainte supplémentaire sur la reprise de l'économie, qui peine toujours à prendre de l'élan cinq ans après la récession et la crise financière.

Les plus de deux semaines de paralysie des administrations n'ont rien arrangé: selon l'agence Standard and Poor's, la crise coûtera 0,6 point de pourcentage à la croissance économique américaine au quatrième trimestre, l'équivalent de 24 milliards de dollars de richesse produite en moins.

«Soyons clairs. Il n'y a aucun gagnant ici. Ces dernières semaines ont infligé un tort complètement gratuit à notre économie», a commenté jeudi M. Obama.

«Il n'y a probablement rien qui ait fait plus de tort à notre économie et à notre crédibilité dans le monde que le spectacle auquel nous avons assisté ces dernières semaines», a-t-il insisté, tout en assurant que les États-Unis «rebondiraient» après ce revers.

Près d'un an après sa réélection, le bilan législatif du second mandat de M. Obama reste squelettique, faute de coopération des républicains.

Ces derniers, qui ont subi mercredi une défaite politique après avoir insisté depuis des semaines sur des concessions de l'exécutif pour voter un budget, restent hostiles à toute augmentation des impôts, que ce soit par une hausse des prélèvements pour les particuliers les plus aisés ou une suppression des niches fiscales.

Les conservateurs ont bloqué ces derniers mois tous les grands chantiers législatifs de M. Obama, qu'il s'agisse d'une réforme de la fiscalité ou d'un encadrement plus strict de la circulation des armes à feu.

Avant M. Obama, le vice-président Joe Biden, venu saluer jeudi matin les employés de l'agence de protection de l'environnement (EPA) revenus à leurs postes, a reconnu qu'une nouvelle ère de coopération n'était pas acquise.

«Il n'y a aucune garantie. Mais je pense qu'hier soir (au Congrès), des démocrates et un nombre important de républicains ont dit "ça suffit". Il n'y avait aucune justification économique» cette crise, a affirmé le numéro deux de l'exécutif.

«J'espère que tout le monde en a tiré les leçons», a-t-il ajouté.