Le président de la Chambre américaine des représentants, John Boehner, a annoncé lundi que les élus voteraient à nouveau sur un texte finançant provisoirement l'État fédéral et s'attaquant à la nouvelle loi sur la santé, à quelques heures d'une paralysie gouvernementale.

«Dans les prochaines heures, nous allons voter sur le texte du Sénat et y ajouter un report d'un an de l'obligation individuelle (de souscrire à une couverture maladie) et la suppression des exemptions pour les membres du Congrès», a-t-il annoncé après une réunion à huis clos du groupe républicain.

Ce vote serait le troisième dans la Chambre sur le budget en dix jours. Il s'attaquerait une nouvelle fois à la réforme du système de santé de Barack Obama, qui prévoit que tous les Américains seront obligés d'avoir une assurance maladie à partir du 1er janvier 2014, sous peine d'amende. C'est cette obligation que les républicains entendent reporter d'un an.

Le président Barack Obama va s'exprimer depuis la Maison Blanche à 16h45, à quelques heures d'une paralysie annoncée de l'Etat fédéral américain, a indiqué la présidence.

L'intervention de M. Obama depuis la salle de presse est prévue à un peu plus de sept heures de la fin de l'année budgétaire. Faute d'accord de toute dernière minute entre républicains et démocrates au Congrès, des centaines de milliers de fonctionnaires seront mis en congés sans solde.

La mesure républicaine sur les «exemptions» des membres du Congrès vise à supprimer les subventions publiques dont bénéficient les parlementaires américains pour payer leurs propres plans d'assurance maladie.

Le Sénat a déjà rejeté un plan républicain similaire lundi après-midi, et le chef de la majorité démocrate, Harry Reid, a prévenu que le Sénat rejetterait tout nouveau texte qui toucherait à la réforme du système de santé.

Des centaines de milliers de fonctionnaires américains ignoraient lundi s'ils devraient rester chez eux à partir de mardi matin, leur sort étant suspendu à un éventuel accord de dernière minute au Congrès pour éviter une paralysie de l'État fédéral.

Le Sénat a rejeté en quelques minutes lundi un projet de loi de finances temporaire adopté ce week-end par la Chambre des représentants, qui aurait financé l'Etat fédéral jusqu'au 15 décembre mais reporté d'un an l'entrée en vigueur du coeur de la réforme du système de santé, loi emblématique du premier mandat de Barack Obama mais contestée par la droite américaine.

Le Congrès dispose de quelques heures seulement, jusqu'au début de l'exercice budgétaire 2014 à minuit lundi, pour adopter un texte commun. Les démocrates ont sommé leurs adversaires de voter un budget provisoire «propre», qui ne touche pas à la loi sur la santé.

«Nous ne négocions pas avec des anarchistes», a lancé le chef de la majorité démocrate du Sénat, Harry Reid. «Les négociations sont terminées (...) Ils sont en train de fermer l'État fédéral».

De l'autre côté du Capitole, les républicains de la Chambre se sont réunis à huis clos. Ils pourraient décider de voter lundi soir, selon plusieurs médias américains, sur un troisième texte qui s'en prendrait à la réforme du système de santé, défiant une nouvelle fois les démocrates.

Barack Obama a affirmé qu'il n'était «pas du tout résigné» et annoncé qu'il parlerait aux responsables du Congrès lundi et mardi. Mais il a répété qu'il ne négocierait pas sous la menace d'une paralysie.

Les deux camps se rejetaient mutuellement la faute dans l'espoir d'influencer l'opinion. Selon un sondage CNN/ORC International publié lundi, 46% des Américains estiment qu'une fermeture des services fédéraux serait la faute des républicains, contre 36% qui accusent Barack Obama, alors que 13 % les renvoient dos à dos (3,5 points de marge d'erreur).

La paralysie serait la 17e de l'histoire du pays et la première depuis janvier 1996, culmination de près de trois années de confrontation sur le budget.

Les effectifs des administrations seraient réduits au minimum vital. Plus de 800 000 employés jugés non essentiels pourraient être mis en congés sans solde, sans garantie de paie rétroactive.

Marchés fébriles

Les fonctions régaliennes de l'État fédéral (justice, sécurité, FBI, guerre en Afghanistan...) seront assurées dans tous les cas, mais à l'équivalent du ministère de l'Environnement, par exemple, environ 15 000 des 16.000 employés seraient renvoyés chez eux. Partout dans le pays, les portes des parcs et musées nationaux n'ouvriraient pas mardi.

Plus anecdotique, la très populaire «Giant Panda Cam» du zoo de Washington cessera de transmettre.

«Je m'étonne que les responsables de la Chambre nous mènent droit vers la fermeture gouvernementale», a dit à l'AFP David Cox, président du plus grand syndicat américain de fonctionnaires, en décrivant une situation «chaotique» pour les fonctionnaires. Des manifestations devaient avoir lieu à Chicago et Boston lundi.

Le syndicaliste rappelle que des coupes budgétaires automatiques ont déjà conduit à six jours de congés sans solde en moyenne depuis le printemps.

En avril 2011, une confrontation similaire n'avait été résolue qu'une heure avant la date limite par un accord de financement de sept jours. Ce scénario d'urgence était à nouveau évoqué lundi.

Les marchés ont manifesté leur inquiétude: à New York, le Dow Jones a ouvert en net recul, et les bourses de Tokyo, Paris, Londres et Francfort ont terminé en baisse.

Quel que soit le contenu d'un éventuel accord in extremis, tout compromis n'assurerait le financement de l'État fédéral que pour quelques semaines, durant lesquelles démocrates et républicains devront négocier une loi de finances pour le reste de l'année 2014.

Un accord à court terme empoisonnerait aussi le débat sur le relèvement du plafond de la dette, qui doit intervenir impérativement avant le 17 octobre pour éviter le premier défaut de paiement de l'histoire des États-Unis.