Les États-Unis ont signé mercredi à l'ONU le premier traité réglementant le commerce international des armes conventionnelles, un texte âprement négocié auquel il se sont longtemps opposés.

Avec 30% d'un marché de quelque 90 milliards de dollars, les États-Unis sont le premier exportateur d'armes au monde.

Adopté le 2 avril par l'Assemblée générale de l'ONU après sept années de négociations, ce traité est le premier texte international majeur sur le désarmement depuis le traité sur l'interdiction des essais nucléaires de 1996.

«L'objectif est d'éviter que les armes ne tombent entre les mains de terroristes et d'acteurs voyous», a déclaré le secrétaire d'État John Kerry après avoir signé le document au siège de l'ONU, à New York.

«Ce traité renforce notre sécurité et la sécurité mondiale sans affaiblir le légitime commerce international d'armes conventionnelles», a-t-il ajouté, saluant «une étape significative».

L'objectif du traité, qui doit encore être ratifié par le Congrès américain, est de moraliser les transactions: chaque pays signataire devra évaluer avant toute transaction si les armes vendues risquent d'être utilisées pour contourner un embargo international, violer les droits de l'homme ou être détournées au profit de terroristes ou de criminels.

Les armements couverts vont du pistolet aux avions et navires de guerre, en passant par les missiles. Le traité porte sur tous les transferts internationaux (importation, exportation, transit, courtage), sans toucher aux législations nationales sur l'acquisition et le port d'armes.

«Assaut contre notre liberté fondamentale»

Les États-Unis ont obtenu que les munitions soient traitées à part, avec des contrôles moins complets. Le texte laisse aussi ouverte la possibilité que certaines aides militaires bilatérales soient exemptées.

Lors de l'adoption du texte à l'ONU, la Russie avait fait part de ses réserves, déplorant des «lacunes», comme l'absence de contrôle spécifique des livraisons d'armes aux rébellions ou des «critères d'évaluation du risque pas assez clairs».

Preuve des résistances que suscite ce texte dans un pays où le droit de porter une arme est inscrit dans la constitution, John Kerry s'est quant à lui surtout employé, dans son discours, à rassurer ses concitoyens sur la portée du document.

«Ce traité ne diminuera la liberté de personne», a-t-il martelé. «De fait, il reconnaît le droit, pour les individus comme des Etats, d'obtenir, de posséder et d'utiliser des armes pour des raisons légitimes». «Nous n'envisagerions jamais de soutenir un traité qui ne soit pas en adéquation avec les droits des citoyens américains», a-t-il ajouté.

Si le Sénat américain refuse de ratifier le texte, les États-Unis pourraient se retrouver dans une situation similaire à celle du Protocole de Kyoto sur le réchauffement climatique, qu'ils ont signé, mais qui n'a jamais été ratifié.

Le très puissant lobby des armes à feu aux États-Unis, la NRA, redoute que cette convention internationale ne limite les droits des Américains à porter une arme, en plein débat dans le pays après une succession de fusillades meurtrières, dont la dernière, le 16 septembre à Washington, a fait 12 morts.

Mercredi, elle a fait part de sa «forte opposition» à un texte qui constitue, selon elle, «une violation du deuxième amendement de la constitution américaine». «La NRA continuera à se battre contre cet assaut contre notre liberté fondamentale», a commenté Chris W. Cox, l'un de ses dirigeants.

Le texte n'entrera en vigueur qu'après avoir été ratifié par 50 États. Cinq pays l'ont fait à ce jour, l'Italie étant le dernier en date.