Les New-Yorkais n'ont pas vu un afro comme ça depuis les années 70. Aussi volumineux qu'une boule de disco, il coiffe la tête de Dante de Blasio, un adolescent de 15 ans qui a contribué à chambouler la course à la mairie de New York.

Dante tient la vedette de la première publicité télévisée de son père Bill, un des candidats démocrates à la succession de Michael Bloomberg à la mairie de New York. Pendant 30 secondes, il s'adresse à la caméra en évoquant les promesses progressistes de son paternel, dont celle de mettre fin au «stop-and-frisk», pratique policière consistant à arrêter et fouiller un individu dans la rue sur la base du soupçon. Cette méthode «cible injustement les personnes de couleur», dit Dante, un jeune métis issu d'un père italo-américain et d'une mère afro-américaine, dans la pub lancée le 8 août.

Cinq jours plus tard, Bill de Blasio a créé la surprise en prenant la tête de la course à la mairie chez les démocrates, selon un sondage qui le créditait de 30% des intentions de vote contre 24% pour la présidente du Conseil municipal de New York, Christine Quinn, et 22% pour Bill Thompson, candidat malheureux lors de l'élection à la mairie de 2009.

La montée en flèche de de Blasio ne tient pas seulement à un spot publicitaire ou à son fils adolescent, aussi charmants et efficaces soient-ils. Né à Brooklyn il y a 52 ans, l'ancien conseiller municipal a hérité d'une bonne partie de l'électorat qui a déserté Anthony Weiner après les plus récentes révélations concernant son exhibitionnisme en ligne.

Élu en 2009 au poste de «public advocate», sorte de protecteur du citoyen dont le rôle est de jouer les médiateurs entre l'administration municipale et les électeurs, de Blasio a également profité de l'appui de plusieurs personnalités connues. Figurent parmi celles-ci le milliardaire George Soros, l'économiste Jeffrey Sachs et le chanteur et militant des droits civiques Harry Bellafonte. Les acteurs Alec Baldwin et Susan Sarandon, qui vivent à New York, font également partie de son fan-club.

Un tableau familial séduisant

Mais il ne fait pas de doute que Bill de Blasio a choisi de mettre de l'avant les membres de sa famille dans sa campagne. Son fils, sa fille et sa femme incarnent la «superbe mosaïque» culturelle que vantait le premier maire noir de New York, David Dinkins à la fin des années 80. Nul doute que ce tableau familial a séduit plusieurs électeurs démocrates, notamment au sein des communautés afro-américaines et hispaniques.

Ceux-ci ont également dû prendre bonne note de l'opposition au stop-and-frisk exprimée par le jeune Dante dans la pub de son père. D'autant plus qu'une juge fédérale a légitimé cette position la semaine dernière en jugeant inconstitutionnels les contrôles et fouilles pratiqués par le NYPD.

«En particulier, les policiers doivent cesser de viser les jeunes hommes noirs et hispaniques dans leurs fouilles», a écrit la juge Shira Scheindlin en accusant la Ville de pratiquer «une politique de profilage racial» qui privé de leur liberté fondamentale «bien trop de gens à New York» qui n'avaient rien à se reprocher.

Furieux, le maire de New York Michael Bloomberg a fait appel de ce jugement, déclarant notamment que la juge Scheindlin, cette «femme quelconque», ne connaissait «absolument rien» au travail policier. Mais les New-Yorkais semblent en avoir assez de son approche où la compétence rivalise souvent avec l'arrogance.

L'empathie au sommet

En juillet, le New York Times publiait un sondage indiquant qu'une bonne majorité de New-Yorkais placent l'empathie au sommet des qualités qu'ils recherchent chez leur prochain maire, devant l'expérience en gestion ou la capacité d'attirer de nouvelles entreprises.

Reste à voir si Bill de Blasio est cet homme de coeur dont rêvent les New-Yorkais. Il se dit certainement le candidat le plus progressiste en lice, un titre que lui disputent certains de ses rivaux démocrates. S'il est élu, il promet de s'attaquer aux inégalités économiques qui se sont accentuées selon lui durant les années Bloomberg.

«En matière de santé et d'environnement, Michael Bloomberg est Franklin Roosevelt. En matière de justice économique, il est Adam Smith», dit Bill de Blasio en campagne, faisant à la fois référence au père du New Deal et à celui du capitalisme libéral.

Le candidat démocrate propose notamment d'augmenter les impôts des New-Yorkais gagnant plus de 500 000$ par année pour pouvoir étendre la prématernelle à tous enfants de la ville. Ses critiques disent que ses idées de gauche ont en commun avec l'afro de son fils Dante d'appartenir aux années 60 ou 70.

Mais si les New-Yorkais avaient l'envie d'un maire rétro?